Plus que trois semaines pour accoucher du futur secteur optionnel ! La réforme Bachelot fait en effet obligation aux partenaires conventionnels de s’accorder sur un dispositif mettant en place ce troisième secteur tarifaire avant le 15 octobre prochain. Si les syndicats de médecins et les caisses doivent rapidement se revoir pour statuer sur l’architecture de ce nouveau système, on en connaît désormais les grandes lignes. Dans un premier temps, le nouveau secteur serait réservé aux spécialistes exerçant en plateau technique lourd. Il serait ouvert aux médecins du secteur 2 et aux anciens chefs de cliniques exerçant en secteur 1. A priori, le schéma suivant est retenu pour son fonctionnement : le praticien du secteur optionnel pourrait pratiquer des dépassements pour 70% de ses actes, ceux-ci étant limités à un plafond de 50% du tarif opposable. A côté de ce secteur coexisteraient en principe toujours secteur 2 et secteur 1.
A la veille de la reprise des négociations conventionnelles, dans son rapport annuel adopté jeudi 24 septembre, le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie, consacre donc de longs développements au nouveau secteur. En dépit de sa définition actuelle plutôt restrictive, il qualifie en effet le nouveau dispositif de « réforme profonde pour l’assurance maladie » : l’association plus étroite des complémentaires au remboursement des dépassements, et le fait de revaloriser ainsi des médecins sans passer par la nomenclature constituant aux yeux du Haut Conseil une petite révolution. Dans ce contexte, les membres du Haut conseil sont de surcroît persuadés qu’un jour ou l’autre le nouveau secteur aura vocation à concerner aussi les disciplines cliniques et à être ouvert de façon plus large au secteur 1. Et l’instance que préside Bertrand Fragonard redoute que le secteur optionnel ne vide à terme les effectifs de médecins secteur 1, sans parvenir à siphonner le secteur 2. « Si le secteur optionnel devait remplacer le secteur 1 tout en laissant demeurer le secteur 2, le but de protection des assurés ne serait évidemment pas atteint », lit-on dans le rapport 2009 du Haut Conseil.
Pour éviter ce scénario catastrophe, le document insiste sur l’attractivité suffisante que devra présenter le nouveau secteur, qui devra attirer la majorité des médecins à honoraires déjà opposables. « Son succès se mesurera à la faculté qu’il aura à terme d’occuper massivement la place tenue aujourd’hui par le secteur 2 », insiste le rapport. Au titre des contreparties à imaginer pour séduire les praticiens à honoraires libres, le Haut Conseil cite « une prise en charge partielle de leurs cotisations sociales, » mais table aussi sur un niveau d’engagement suffisant des mutuelles et assureurs complémentaires. Sur ce dernier point, le rapport 2009 évoque une piste qui viserait, via le panier prévu dans les « contrats responsables », à faire mieux prendre en charge les dépassements des médecins dans le secteur optionnel qu’en secteur 2. Les assurés se verraient ainsi indirectement incités à se rendre plutôt chez les praticiens du secteur optionnel.
L’hostilité des associations de patients
Inacceptable ! Sur le secteur optionnel, les associations de patients réunies au sein du CISS sont beaucoup moins nuancées que le Haut Conseil présidé par le très pondéré Bertrand Fragonard. Déterrant la hache de guerre, le CISS ne veut tout simplement pas entendre parler du futur secteur sur lequel médecins et caisses doivent s’accorder. Pour le CISS, le nouveau secteur, loin de limiter les dépassements d’honoraires, seraient une façon de les avaliser. A ses yeux, le rapport 70% de dépassements-30% de tarifs opposables représente à peu près la réalité actuelle en secteur 2, "puisque les 30% sont "déjà couverts par les bénéficiaires de la CMU, de l’AME et des minima sociaux."
Au total, le CISS estime que la création du dispositif tel qu’il est actuellement envisagé par les caisses et les syndicats de médecins pourrait conduire à augmenter de 50% le coût des tarifs de spécialistes pour les assurés, qu’il risque de renchérir le prix des complémentaires et d’aggraver les finances de la Sécu. Comme le Haut Conseil, le Collectif de patients craint aussi que le secteur optionnel soit bientôt une sorte d’auberge espagnole ouverte à terme à toutes les disciplines : nous ne sommes «pas dupes sur le fait qu’à terme le secteur optionnel sera ouvert à toutes les spécialités médicales, à l’instar de ce qui s’est produit avec le secteur II, » souligne le communiqué du CISS. Et les associations de patients sont d’autant plus inquiètes qu’elles craignent que les passages soient à terme nombreux du secteur 1 vers le secteur optionnel. A la place du secteur optionnel, le Ciss propose donc un "mécanisme général de tarification", avec lettres clées révisées à échéance régulière, tous les cinq ans par exemple, et à la hause comme à la baisse, en fonction de l’évolution des technologies. Il n’est pas dit que cette suggestion d’un retour aux "lettres clés flottantes" conviennent aux syndicats de médecins libéraux...
Pour les différents protagonistes du secteur optionnel, le temps presse désormais: selon Christian Saout, le président du CISS, c’est par un amendement du PLFSS 2010 déposé au Sénat que les pouvoirs publics pourraient officialiser cet automne le nouveau secteur.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature