E NTRE août 1990 et février 1991, près d'un million de personnels militaires (dont 670 000 Américains et 45 000 Britanniques) ont été déployés dans le Golfe. De retour dans leur pays, nombre d'entre eux se sont plaints de troubles divers, et des centaines de millions de dollars et des millions de livres, notamment, ont été dépensés dans des recherches pour cerner, sans succès, un éventuel syndrome du Golfe. Une étude publiée dans « Occupational and Environmental Medicine » (2001, 58), met en tout cas en évidence un surplus significatif de troubles chez ceux qui sont allés dans le Golfe.
Sept ans après le conflit, un questionnaire sur leur état de santé dans le mois précédant l'enquête a été adressé à 14 372 hommes et femmes, dont près de 5 000 militaires qui n'ont pas été déployés dans le Golfe entre septembre 1990 et juin 1991. L'enquête comportait des questions sur 95 symptômes et deux dessins du corps sur lequel les personnes interrogées devaient cocher les ères de douleur, d'engourdissements ou de picotements. 11 914 réponses se sont révélées exploitables.
Chaque symptôme (fatigue, perte de cheveux, troubles digestifs, respiratoires, difficultés de concentration....) est signalé plus fréquemment par les anciens combattants du Golfe.
Ils sont en nombre supérieur dans les trois groupes faisant état des symptômes les plus sévères (23,8 %), alors que moins d'un sur dix des militaires qui nne sont pas allés dans le Golfe en font partie.
Injections et pesticides
L'équipe conduite par le Dr Nicola Cherry, à présent au Canada, a pris soin d'éliminer des facteurs tels que le tabac ou l'alcool, les anciens du Golfe ne fumant ni ne buvant pas plus que les autres personnels militaires. En revanche, les niveaux d'exposition à un certain nombre de substances (médicaments donnés en prévention, vaccins, pesticides, fumées émanant des feux de pétrole), évalués pour quelque 8 000 anciens du Golfe, ont une influence. La gravité des symptômes est en effet liée au nombre d'injections, au temps passé à manipuler des pesticides et au nombre de jours d'exposition aux fumées des champs de pétrole en feu. Les injections sont associées avec un plus grand nombre de plaintes portant sur des troubles cutanés et musculaires et les pesticides avec plus de problèmes d'ordre neurologique et de symptômes évocateurs de pathologie nerveuse toxique.
S'il n'y a pas plus de morts et d'hospitalisations parmi les anciens combattants du Golfe, les symptômes rapportés par un nombre important d'entre eux suggèrent « un déclin significatif de la santé », soulignent les auteurs, en concluant que les effets des injections et de la manipulation des pesticides doivent faire l'objet de nouvelles études.
Dans un éditorial associé, le Dr Khalida Ismail, psychiatre londonien, met en outre en garde quant à des conclusions hâtives, à cause du caractère subjectif de l'étude, les troubles invoqués n'ayant pas été corroborés par des examens médicaux et neurologiques. Il relève les retards pris dans le suivi de la santé des anciens combattants et espère que, lors d'un futur conflit, il n'en sera pas de même. En attendant, les mystères du syndrome du Golfe ne sont toujours pas percés.
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