PARMI 875 ETUDIANTS inscrits en 2003-2004 dans une université parisienne en médecine, pharmacie, sciences humaines et sociales, psychologie et droit, en première ou deuxième année – parmi lesquels un homme pour quatre femmes –, un sur deux a expérimenté le cannabis (55 % des garçons, 45 % des filles), révèle une enquête de la sociologue et démographe Laurence Simmat-Durand (INSERM/CNRS) réalisée en 2003-2004. Les potards se montrent les plus indifférents ou les plus sérieux, avec 25,9 % qui ont goûté au joint au moins une fois dans leur vie, devant les carabins (37,3 %). Viennent ensuite les juristes, les psychologues et les sociologues en herbe, avec respectivement 41 %, 65,2 % et 72 % d'expérimentateurs.
Déjà, les proportions varient suivant la filière suivie avant le bac, précise la chercheuse. Trente-neuf pour cent des bacs S ont goûté au cannabis, contre 59 % des ES (sciences économiques et sociales) et de 63 à 42 % des bacs pro. Les bacheliers qui ont eu leur bac en avance ou à l'âge attendu apparaissent comme les moins intéressés (37 % de fumeurs de cannabis contre 46 % et 58 % de ceux qui l'ont eu à 19 ans ou plus).
L'âge du «joint pour voir» se situe autour de 16 ans, même si une poignée (3 %) se laissent tenter après la sortie du lycée, essentiellement des étudiants en médecine et en psychologie.
13 % d'usagers à problèmes.
Quant à la consommation (non évaluée dans l'enquête), elle court sur trois ans en général. Cinquante pour cent l'arrêtent dans les quatre ans suivant l'expérimentation, dont 41 % avant le bac, 28 % l'année du bac et 31 % deux ans après. Quatorze pour cent des potards, 25,4 % des carabins, 24,6 % des étudiants en droit, 48,8 % en psychologie et 55,6 % en sociologie confessent «avoir fumé, souvent, lors de fêtes et de sorties». Quatre pour cent s'y adonnent seuls. Un sur deux justifie son geste par le besoin de se détendre, 13,8 % par le plaisir et 10,8 % par la convivialité. Quelques-uns mettent l'accent aussi sur la «défonce» ou l' «évasion», les garçons deux fois plus que les filles (12,6 %contre 6,4 %). Dans 13,6 % des cas, l'usager rencontre un problème, et dans 6 %, au moins deux, qu'il s'agisse d'une «consommation quotidienne pendant plus de 2 semaines», d' «être incapable de s'arrêter», d' «avoir dû abandonner une activité habituelle» ou «d'avoir pris le volant sous l'emprise du cannabis». Cela concerne 21,6 % des étudiants et 11,6 % des étudiantes fatigués ou déprimés, rapportant des idées noires ou une tentative de suicide, fumeurs de tabac et ayant une consommation d'alcool à risque.
Ainsi, «la majorité des étudiants expérimentent le cannabis au lycée et renonce à cette consommation avant l'entrée à l'université, qui dès lors ne constitue pas un nouvel espace de liberté, mais bien un début de la vie adulte, commente Laurence Simmat-Durand. A l'opposé, pour 13%, l'usage est fort, et 6% peuvent sans doute être décrits comme dépendants à la substance».
* 18 décembre.
Deux thèmes de recherche
Laurence Simmat-Durand, maître de conférence à l'université Paris-Descartes, travaille sur 2 thèmes de recherche : la périnatalité et la toxicomanie. Elle est l'auteure de « La lutte contre la toxicomanie, de la législation à la réglementation » (L'Harmattan, 2001) et d'un rapport sur les « Signalements et placements de mères toxicomanes »(Cesames Paris, 2006).
Autoquestionnaire anonyme
875 étudiants, sur 6 716 inscrits dans le 1er cycle à l'université Paris-Descartes, d'un âge moyen de 20,2 ans, ont rempli un autoquestionnaire anonyme pendant l'année 2003-2004. 89 % sont de nationalité française, 72 % vivent chez leurs parents (57,7 % de cadres ou professions intellectuelles supérieures) et 21 % ont un logement individuel et 7 % collectif.
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