Dans la glomérulopathie extramembraneuse idiopathique (ou « primitive » ou encore « sans cause identifiée »), qui est la cause la plus fréquente de syndrome néphrotique de l'adulte dans de nombreux pays, l'approche thérapeutique repose sur les corticoïdes et les immunosuppresseurs. Mais ces médicaments ne sont pas spécifiques et comportent un risque d'effets délétères.
Ces trente dernières années, le pronostic de la GEM idiopathique ne s'est pas amélioré de façon significative. Malgré la corticothérapie, les agents alkylants ou d'autres médicaments, jusqu'à 40 % des patients peuvent aboutir à l'insuffisance rénale terminale.
Une meilleure compréhension des mécanismes pathogéniques de la maladie pourrait aider à trouver des approches plus efficaces et plus sûres à long terme.
La protéinurie, indicateur majeur
La protéinurie est un indicateur majeur indépendant de la progression de la maladie. Des données provenant d'études chez l'animal suggèrent que les dépôts immuns typiques sous-épithéliaux glomérulaires sont provoqués par des réactions médiées par les lymphocytes B ; ce qui induit des lésions de la barrière glomérulaire et provoque une protéinurie. Ainsi, même si l'on ne connaît pas les auto-antigènes en cause dans la GEM idiopathique, et même si le rôle des lymphocytes B n'est pas totalement expliqué chez l'homme, des agents qui interféreraient spécifiquement avec les cellules B pourraient idéalement représenter une première étape vers un traitement sélectif. De plus, le succès de tels traitements prouverait l'existence d'un mécanisme lié aux lymphocytes B dans la GEM idiopathique.
Un anticorps monoclonal anti-CD20
Toutes ces considérations ont conduit une équipe italienne (Giuseppe Remuzzi et coll.) a tester chez 8 patients l'efficacité et la sécurité du rituximab, un anticorps monoclonal dirigé contre l'antigène de surface CD20 des cellules B.
La moyenne d'âge des patients était de 52 ans (24 à 75) ; la clairance de la créatinine était supérieure à 20 ml/mn ; la protéinurie était supérieure à 3,5 g/24 h depuis au moins six mois ; les patients étaient sous des doses élevées d'IEC ; enfin, il y avait absence de rémission (biopsie rénale) depuis plus de 29,7 mois en moyenne (13-49).
Le rituximab a été administré sous forme de perfusions (375 mg/m2).
Le suivi total a duré vingt semaines. La protéinurie ainsi que d'autres données cliniques ou biologiques ont été mesurées au début de l'étude, puis chaque semaine pendant la période de traitement, puis toutes les quatre semaines de la semaine 4 à la semaine 20.
Pendant la période de traitement, les protides urinaires ont diminué de façon significative et non linéaire chez tous les patients. Chez deux patients on a obtenu une « rémission complète » (protéinurie inférieure ou égale à 1 g/24 h) et chez trois autres une « rémission partielle » (protéinurie inférieure ou égale à 3,5 g/24 h).
A la fin de l'étude, la protéinurie avait baissé de 62 %, l'albuminurie de 70 % et la clairance fractionnée de l'albumine de 65 %. Dans le même temps, l'albuminémie avait augmenté de 31 %, cela avec une réduction du cholestérol sérique.
A chaque visite, de la semaine 8 à la semaine 20, l'augmentation de l'albuminémie était associée à une baisse de la clairance fractionnée de l'albumine.
Baisse des lymphocytes CD20
Les lymphocytes B CD20 ont diminué jusqu'à un niveau indétectable après la première dose de rituximab et sont restés inférieurs aux taux normaux jusqu'à la fin de l'étude. Aucune modification n'a été notée en ce qui concerne les globules blancs totaux, les plaquettes, le nombre de lymphocytes et les taux sériques d'IgG, IgA et IgM.
Des effets secondaires (frissons généralisés chez un patient, un rash cutané, deux cas de spasme laryngé qui a régressé en vingt minutes sous méthylprednisolone IV) étaient transitoires et liés aux perfusions et ne sont survenus que lors de la première administration de rituximab.
Le fait que la déplétion de CD20 circulants soit étroitement associée à une réduction de la protéinurie et de l'albuminurie après le premier traitement suggère une relation de cause à effet.
« Le profil risque/bénéfice à court terme du rituximab semble bien plus favorable que celui de tout autre immunosuppresseur utilisé pour traiter la GEM idiopathique », concluent les auteurs.
« Lancet » du 21 septembre 2002, pp. 923-924.
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