DANS UN espace très dégagé où quelques meubles suffisent à suggérer les lieux, Michel Fagadau met en scène avec beaucoup de finesse la nouvelle comédie de Florian Zeller. Avec « Si tu mourais », le jeune auteur, romancier et dramaturge, confirme toutes les qualités que l’on devinait dans ses propositions précédentes.
Le thème est intéressant : après la mort accidentelle de son mari, écrivain, auteur de théâtre, une femme est prise d’un doute en découvrant l’ébauche d’une pièce dans laquelle il évoque souvent une jeune comédienne. Elle s’en ouvre à un ami, très embarrassé.
S’il n’était question que de jalousie, de soupçon, la pièce filerait son train, sans originalité. Mais Florian Zeller organise la collision des temps. Ici, le disparu est présent (Robin Renucci, remarquable de délicatesse vénéneuse, ambigu à souhait) et parle avec sa femme (Catherine Frot, souveraine, avec sa voix si particulière, ce phrasé unique, tout en infimes nuances).
La jeune actrice, Laura Dame (Chloé Lambert, lumineuse et mystérieuse à la fois) change de version sans arrêt, ment, envenime tout. Quant à Daniel, le confident (Bruno Putzulu, très bien en place) il est dans le plus profond embarras.
A la fin, bien malin qui saurait dire où est la vérité... A la fin on peut même se dire que ce « Si tu mourais... » n’est qu’une élaboration d’Anne. Il y a du Pinter dans la manière de suspendre les phrases, d’installer les soupçons. Il y a du Godard dans l’alacrité des dialogues, des relations entre les hommes et les femmes. Et un vertige à la Pirandello qui menace sans cesse les lisses apparences d’une vie qui semblait heureuse et calme...
Comédie des Champs-Elysées, à 21 h du mardi au samedi, en matinée le samedi et le dimanche à 16 h 30. (01.53.23.99.19). Durée : 1 h 30 sans entracte.
Le texte est publié dans L’Avant-scène, n°1212 (12 euros).
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