À peine le rapport de Gilles Johanet lui était-il remis, le 24 février dernier, que le ministre de la Santé Xavier Bertrand décidait de réunir l’ensemble des acteurs dès le mois de mars pour une vaste concertation, afin de discuter des onze propositions émises par l’ancien directeur de la Cnam, qui devrait prendre la tête du Comité économique des produits de santé (CEPS). Un sujet qui tient à cœur à Xavier Bertrand. En effet, en 2006, déjà ministre de la Santé, il s’était saisi du dossier : il avait notamment fait adopter un décret du 7 décembre 2006, qui prévoyait l’octroi d’une aide à la souscription à une assurance, comprise entre 9 400 euros et 11 500 euros. Le problème avait été momentanément réglé, jusqu’à ce que le coût des primes d’assurance reparte à la hausse…
Limitation à dix ans
Déjà auteur d’un premier rapport sur la RCP rendu à la fin de l’année dernière à Roselyne Bachelot, Johanet récidive donc en proposant cette fois-ci une véritable réforme de la RCP. Deux principales propositions sont émises. Johanet encourage ainsi le gouvernement à étendre à l’ensemble des professionnels de santé la limitation à dix ans de la mise en cause de la responsabilité du professionnel de santé, alors même qu’elle ne concernait que les chirurgiens, obstétriciens et sages-femmes. Cette extension à l’ensemble des professionnels de santé va de pair avec une extension à l’ensemble de l’activité de soins. « La généralisation de la limitation à dix ans […] aurait une portée pratique très réduite, car il n’existe pratiquement pas de mises en jeu au-delà de cette durée. »
Mutualisation
En deuxième lieu, le rapporteur propose la mutualisation de l’ensemble des professionnels de santé libéraux pour les sinistres supérieurs à 3 millions d’euros, via la création d’une surcotisation, accompagnée de la création d’un pool réunissant tous les assureurs RCM. « La mutualisation de l’ensemble des professionnels de santé répond au constat d’une extension progressive et déjà entamée de l’exposition au risque de toutes ces professions. Elle permet d’éviter l’apparition de nouveaux trous de garantie, qui serait liée, cette fois, à l’appartenance à une profession non couverte par le pool. La plage de couverture envisagée par la FFSA1 est de 6 à 8 millions d’euros pour le seuil inférieur, et de 15 à 25 millions d’euros pour le seuil supérieur. » Toutefois, les assureurs se refusent pour le moment à mettre en place une garantie illimitée.
Transparence et visibilité
Autre problème auquel s’attaque Johanet : le manque de visibilité de la situation de la responsabilité civile médicale (RCM) et de son évolution. La transparence en la matière « ne peut être atteinte, tant que les données et les comptes de l’assurance RCM sont fondus dans l’assurance de RC générale ».
Pour clarifier le dispositif de RCM, Johanet préconise l’autonomie comptable de l’assurance RCM, la prise en charge par l’Observatoire des risques médicaux du rapport de l’ACP, l’expertise du provisionnement des sinistres.
Haute Autorité de santé
La prévention des risques fait également l’objet de propositions : « Une approche pragmatique de la prévention s’impose, ce qui revient à placer les praticiens au cœur de la démarche de prévention. Les organismes agréés par la Haute Autorité de santé pour l’accréditation paraissent les mieux placés pour organiser la prévention. » Pour prévenir ces sinistres, le rapport encourage la mise à disposition des expertises de sinistres aux organismes agréés par la HAS.
Barème unique d’indemnisation
Autre mesure phare : l’instauration d’un barème unique d’indemnisation. « L’adoption d’un référentiel unique d’indemnisation », également prévue par la proposition de loi, sous une forme atténuée, puisqu’est évoquée « une nomenclature non limitative des postes de préjudice qui ne peut être retenue que s’il est clair que son emploi est indicatif, ce qui est le cas du référentiel de l’Oniam2 ». Deux autres propositions, selon le rapport, sont de nature à sécuriser le processus d’indemnisation. La première vise à encourager la médiation en cas de sinistre, en rendant « inopposable aux assureurs le contenu des déclarations des praticiens effectuées dans le cadre d’une médiation ». La seconde consiste à effectuer une étude visant à mieux définir le champ de la responsabilité des professionnels de santé, en suivant deux axes : la formalisation du devoir d’information du praticien, et la définition de ce devoir d’information.
1. Fédération française des sociétés d’assurance.
2. Office national d’indemnisastion des accidents médicaux.
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