SA MISSION a pris fin le 17 avril lorsqu'il a remis son rapport à l'Élysée. Enfin, pas complètement : Gérard Larcher rempilera à l'automne pour une courte mission que lui a confiée Nicolas Sarkozy. Il examinera l'avant-projet de loi SPT (santé, patients et territoires) pour vérifier que son contenu reprend «l'esprit de la réforme» qu'il a proposée au printemps. «Le sénateur que je suis sera attentif à ce texte lors de son examen à l'automne par le Parlement», a-t-il ajouté lors d'une rencontre Lipp organisée par « Décision santé » avec « le Quotidien ».
La rencontre-débat en question a tourné autour de l'hospitalisation privée.
L'importance de la future autorité de la concurrence.
Gérard Larcher a rappelé son opposition aux «monopoles privés». Il insiste sur l'urgence à réguler la concurrence dans le champ hospitalier, et espère que la future autorité de la concurrence – prévue par la loi de modernisation de l'économie – s'emparera du dossier. «Peut-être faut-il obliger tel ou tel à vendre un établissement s'il veut en acheter un autre», suggère ainsi Gérard Larcher.
Une ARH (agence régionale de l'hospitalisation), aujourd'hui, n'a pas son mot à dire lorsqu'une clinique change de mains. Il lui est impossible de refuser une autorisation au motif que la clinique appartient à tel groupe financé par des capitaux étrangers. Tout au plus l'ARH peut-elle se tourner vers le tribunal de commerce si elle souhaite connaître la composition du capital d'un établissement. Dès l'automne, la future autorité de la concurrence devrait disposer de compétences élargies en matière de contrôle des concentrations économiques et de pratiques anticoncurrentielles. Reste à voir comment elle agira dans le champ de la santé.
La rencontre Lipp, organisée alors que les rumeurs vont bon train concernant la mise en vente de Vitalia (voir « le Quotidien » du 20 mai), a donné l'occasion à Gérard Larcher de critiquer la volatilité de certains capitaux. Deux ans à peine après avoir fondé Vitalia, numéro deux de l'hospitalisation privée en France, le fonds américain Blackstone veut s'en séparer. Hasard ou pas, l'action du numéro un du secteur, Générale de santé, a bondi de + 13 % en une semaine. Qu'en déduire ? À ce petit jeu, personne ne se risque.
L'inquiétude des médecins libéraux.
Mais pour Gérard Larcher, une certitude : ce turnover des actionnaires des cliniques menace le service public de santé. Le sénateur propose de favoriser l'investissement d'acteurs institutionnels comme la Mutualité, les assurances vie ou la caisse des dépôts et consignations (CDC). «Il faut les intéresser à ce secteur car ils n'auront pas la préoccupation du court terme ni celle d'une rentabilité à deux chiffres», assure-t-il. En Auvergne par exemple, Vitalia détient 90 % des cliniques. Demain, qui va les reprendre ? À quelles conditions ? L'incertitude tenaille les médecins libéraux du groupe, comme l'explique le président de la FHP Auvergne (Fédération de l'hospitalisation privée), le Dr Richard Simon : «Une régulation des rachats par les fonds est souhaitable, sinon des cliniques risquent de fermer pour doper la rentabilité. Un rachat de Vitalia par un investisseur français aidé par l'État est une solution, mais qui peut se permettre un investissement de ce type? C'est un coût énorme.»
Une autre perspective inquiète les médecins libéraux : si Gérard Larcher voit son souhait inscrit dans la loi, ceux qui exercent en clinique ayant une concession de service public devront signer un contrat individuel les engageant à réaliser une partie de leur activité en secteur I.
La plupart des patrons de clinique sont acquis à la cause – «Le secteurII dessert l'hospitalisation privée», affirme Lamine Gharbi, président FHP Languedoc-Roussillon. Mais les manettes leur échappent pour limiter les dépassements d'honoraires –, seul le groupe Vitalia a su imposer par contrat un quota d'actes en secteur I à tous ses médecins. Le sujet est épineux. L'ancien président de la FHP, Ken Danis, en sait quelque chose, lui qui a voulu encadrer les dépassements. «Ken Danis a voulu aller plus vite que sa base, il en a fait les frais, mais il a tracé un chemin. Les mentalités évoluent, ce n'est plus tabou», commente un observateur. «Nous ne sommes pas friands des contrats individuels. La réponse, c'est le secteur optionnel», réplique le Dr Jean-Paul Ortiz, président du SYMHOP.
Quel avenir pour le ministère de la Santé ?
Gérard Larcher le dit sans détour : la structuration du ministère de la Santé doit impérativement évoluer. Sinon, «la tentation sera grande de continuer à gérer l'hôpital depuis Paris et non depuis l'ARS», prédit le sénateur. Les futures ARS nommeront les médecins et les directeurs d'hôpital, un pouvoir dont ne disposent pas les actuelles ARH (agences régionales de l'hospitalisation). Mais reste à voir comment assurer l'indépendance des directeurs d'ARS. «C'est un vrai sujet à arbitrer», admet Gérard Larcher.
S'il faut réorganiser le ministère de la Santé et ses rapports avec l'assurance-maladie, faut-il en passer par la création d'une Agence nationale de santé (ANS) ? Roselyne Bachelot s'y oppose fermement. «Je ne suis pas celle qui fermera le ministère de la Santé», répète-t-elle. La question, néanmoins, reste posée. Même si la création d'une ANS à court terme semble bel et bien écartée, la mission RGPP (révision générale des politiques publiques) y réfléchit et devrait faire des propositions de réforme à ce sujet dans le courant du mois de juin. Ces pistes seront étudiées et validées en conseil de modernisation des politiques publiques, instance de décision de la RGPP. Il appartiendra ensuite au ministère d'assurer le suivi et la mise en oeuvre des réformes.
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