Jean-François Mattei en parlait déjà à la fin de l'été dernier, la décision avait été prise par le ministre au mois de juin dernier, le « Journal officiel » du 27 août vient de publier l'arrêté ministériel et dresse la liste des 29 molécules concernées par le tarif forfaitaire de responsabilité (TFR).
Prévu par la loi de financement de la Sécurité sociale 2003, le TFR permet de fixer le niveau de remboursement de tous les médicaments d'un même groupe générique (générique et princeps) sur la seule et même base du prix moyen des génériques du groupe. Une disposition dont le but est de soulager les finances de la Sécurité sociale, et qui s'inscrit dans un vaste plan de promotion des génériques en France.
C'est en 1999 que le gouvernement socialiste de l'époque entreprend de donner un coup de pouce au décollage des génériques en donnant aux pharmaciens le droit de substitution (qui leur permet de remplacer par un générique moins coûteux un médicament princeps prescrit par un médecin). Un coup de pouce modeste qui se heurta tout à la fois à la réticence des patients - ils ne souhaitaient pas changer leurs habitudes de « consommateurs - et à celle d'un certain nombre de médecins : ils voyaient d'un mauvais il les pharmaciens modifier leurs prescriptions.
En juin 2002, les choses ont changé. Les génériques commencent à prendre modestement leur place dans l'arsenal thérapeutique français, et, en échange du « C » à 20 euros, les médecins prennent l'engagement de réaliser 25 % de leurs prescriptions en dénomination commune (DC), dont la moitié en génériques. Le tout accompagné d'une campagne publicitaire destiné à faire accepter au patient l'idée que les génériques sont en quelque sorte des « clones » des médicaments princeps correspondants.
Mais cela ne paraît pas suffisant aux yeux du ministre de la Santé qui, au vu des déficits abyssaux de la Sécurité sociale, souhaite désormais impliquer davantage le pharmacien d'officine dans son droit de substitution. Depuis 1999, les pharmaciens d'officine étaient incités financièrement à exercer leur droit de substitution grâce à un dispositif qui leur permettait peu ou prou de conserver la même marge en vendant un générique qu'en vendant un princeps. Mais la progression des ventes de génériques, pour réelle qu'elle ait été, n'a pas paru suffisante au ministre de la Santé et Jean-François Mattei annonça à l'automne dernier qu'il se réservait la possibilité d'utiliser le TFR pour les groupes dont la pénétration générique serait comprise entre 10 % et 45 %. Histoire d'inciter les pharmaciens à dépasser ce seuil pour conserver leurs marges. C'est aujourd'hui chose faite et la mesure s'appliquera dès le 8 septembre prochain (1).
100 à 105 millions d'euros d'économies
En annonçant la mesure, lors d'une réunion informelle avec la presse au début du mois de juin dernier, Jean-François Mattei avait avancé le chiffre de 100 millions d'euros d'économies pour l'assurance-maladie. Des chiffres qui paraissent corroborés par l'analyse effectuée par le LEEM (Les Entreprises du médicament, qui regroupe la plupart des laboratoires pharmaceutiques implantés en France). Selon cette analyse, qui part de l'hypothèse que tous les fabricants de princeps vont aligner leurs prix sur celui du TFR, les groupes génériques relatifs aux 29 molécules visées par l'arrêté verront leur chiffre d'affaire passer de 366 millions d'euros à 269, soit une baisse de 96 millions d'euros, tandis que la Sécurité sociale économiserait 105 millions d'euros. Reste que, même si le LEEM juge cette hypothèse suffisamment crédible pour la retenir dans son analyse, rien ne prouve actuellement que tous les fabricants de princeps aligneront leurs prix sur ceux du générique. Au LEEM même, on reconnaît ne pas disposer d'informations sur ce sujet. Seul un laboratoire, MSD, communique actuellement auprès des médecins sur l'alignement du prix d'un de ses hypotenseurs, le Renitec, sur celui du TFR, mais au service de presse de la filiale américaine, on indique ne pas savoir si d'autres princeps subiront la même baisse.
(1) Le texte complet de l'arrêté, la liste des molécules concernées ainsi que leur TFR sont en ligne sur le site www.legifrance.gouv.fr
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