Généralistes : trois mois après, le bilan de l'accord MG-France-caisses

Publié le 23/04/2002
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• Tarifs : ce qui a changé
Plusieurs mesures tarifaires concernant les consultations, les visites de nuit et les soins à domicile sont entrées en vigueur depuis la signature de l'accord.
Le tarif de la consultation est passé de 17,53 euros à 18,50 euros depuis le 1er février. Mais cette revalorisation (+ 5,5 %) n'a pas permis d'éteindre le conflit des généralistes en grève des gardes depuis plus de cinq mois. Plusieurs milliers d'entre eux facturent régulièrement le C à 20 euros, au risque de s'exposer à des poursuites des caisses primaires.
Depuis le 1er février également, la majoration de dimanche (19,05 euros) est appliquée aux consultations assurées par le médecin de garde le samedi après-midi dans chacun des 3 100 secteurs répertoriés (elle n'était appliquée auparavant, le samedi après-midi, que pour les visites).
Par ailleurs, une consultation approfondie (CALD), rémunérée 23 euros, a été instaurée le 1er mars. Elle est réservée pour l'instant au seul bilan de santé annuel des patients atteints d'une ALD ouvrant droit à une prise en charge à 100 % (soit 5 millions de personnes concernées). Il semble toutefois que les généralistes aient assez peu utilisé cette opportunité. Une extension du périmètre de cette consultation lourde doit être décidée le 1er janvier 2003 « au vu des conclusions des travaux de la classification des actes cliniques ».
En ce qui concerne les visites, la majoration de nuit a été revalorisée depuis le 1er février. Cette majoration est passée de 25,15 euros à 35 euros pour les actes effectués de 20 h à minuit et de 6 h à 8 h et à 40 euros pour les actes effectués entre minuit et 6 h. A titre d'exemple, les visites de nuit effectuées entre minuit et 6 h sont désormais rémunérées 60,58 euros dans la plupart des villes (et 62,10 euros à Paris, Lyon et Marseille, compte tenu d'une indemnité de déplacement plus importante).
Enfin, le champ d'application de la majoration de maintien à domicile (MMD) a été considérablement élargi depuis le 1er mars. La MMD, dont le montant est de 9,15 euros, et qui était réservée auparavant aux seules visites auprès des personnes âgées de plus de 75 ans en ALD, s'applique désormais aux visites auprès des bénéficiaires de l'allocation tierce personne, des titulaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), des patients en HAD et de ceux ayant fait l'objet d'une intervention chirurgicale d'un coefficient supérieur à Kcc150. Un groupe de travail associant les parties signataires doit réfléchir à l'extension du bénéfice de la MMD en examinant d'autres cas particuliers.

Procédure retardée

• Aides à l'installation : les décrets d'application se font attendre
L'accord caisses-MG-France prévoit d'attribuer, sous conditions, une aide de 13 000 euros pour les généralistes qui s'engagent à exercer dans des zones déficitaires (rurales ou urbaines) pour cinq ans en secteur I. Mais les choses sont loin d'être aussi simples. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2002 (LFSS), qui a fourni le cadre légal au nouveau dispositif d'aides à l'installation, prévoit des décrets d'application qui, d'une part, fixent les critères permettant aux préfets de délimiter les zones éligibles aux aides et, d'autre part, précisent les obligations auxquelles seront soumis les médecins bénéficiant des primes. Ces textes se font attendre, ce qui bloque la procédure de financement. En ce qui concerne la détermination (par les préfets) des zones déficitaires éligibles, un projet de décret assez précis prévoit de retenir plusieurs critères « principaux » et « complémentaires », qui ont trait notamment à l'éloignement géographique du médecin, à la densité médicale ou encore au nombre d'actes annuels (« le Quotidien » du 22 février). Quant aux éventuelles contreparties aux aides, la réflexion est beaucoup moins aboutie, faute de consensus. Dans une lettre datée du 17 avril, que « le Quotidien » s'est procurée, Edouard Couty, directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) demande aux syndicats médicaux de lui faire parvenir « pour le 29 avril » des propositions sur « la durée d'installation » et « les obligations attendues des médecins qui bénéficieront de l'aide ». Cette contribution doit permettre d'élaborer le futur décret. L'accord MG-caisses stipule que les généralistes pourront obtenir la prime à l'installation dès le 1er juillet prochain pour des installations (ou regroupements effectifs des cabinets) « à compter du 1er février 2002 ». Pour ne pas retarder la procédure, le Fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale (FORMMEL) a voté l'ouverture d'une ligne budgétaire spécifique permettant le financement des aides à l'installation. Le dispositif sera donc opérationnel « sous réserve » de la publication des décrets ministériels.

• Forfaits d'astreinte : de nombreux blocages locaux
La concrétisation de ce volet de l'accord s'annonce délicate en raison de la nécessaire réorganisation préalable des gardes et astreintes et du rôle très contesté de l'Ordre dans cette affaire, défini dans le cadre d'un protocole « Etat - Ordre - assurance-maladie » qui a fait couler beaucoup d'encre. Le versement des forfaits d'astreinte aux généralistes (50 euros par tranche de 12 heures) est en effet conditionné à la sectorisation de la permanence des soins par les conseils départementaux de l'Ordre également chargés de désigner, dans chacun de ces secteurs, les médecins d'astreinte. Malgré la crise interne à l'Ordre, ouverte par la signature du protocole, malgré les protestations de nombreux syndicats médicaux qui dénoncent une usine à gaz gérée par l'Ordre et les caisses, le protocole reste officiellement en vigueur. Sur le terrain, la situation se révèle en fait très inégale. Selon MG-France, quelques conseils départementaux de l'Ordre ont déjà validé (et transmis aux pouvoirs publics) des secteurs de garde clairement identifiés, d'autres conseils ordinaux refusent cette procédure ; certains, enfin, expriment leur mécontentement mais vont jouer le jeu « pour ne pas pénaliser les généralistes ». Même si l'Ordre compte s'appuyer sur les associations de médecins existantes, la montée en charge du financement des astreintes risque d'être variable, au gré des situations locales. « Si l'Ordre, c'est-à-dire la profession, refuse de jouer son rôle dans l'organisation du nouveau système, c'est l'Etat qui prendra le relais », met en garde MG-France. Un bilan d'étape est prévu le 1er juin. Dans les départements où la sectorisation est en place, la rémunération des astreintes est théoriquement possible depuis le 1er mars puisque le FORMMEL a approuvé un « budget rectificatif » pour 2002 permettant le financement du système ; ainsi, un crédit de 23,4 millions d'euros correspondant à une base de 8 astreintes par semaine pour 1 500 secteurs de garde (dans un premier temps) a été inscrit au budget. Une circulaire doit également être envoyée aux caisses primaires cette semaine pour préciser les modalités de paiement de l'astreinte. A l'heure actuelle, quelques forfaits auraient été payés aux généralistes, dans l'Ain par exemple, « pour marquer le coup ».

• Fiscalité : pas de groupe de travail spécifique
Les parties signataires de l'accord avaient proposé la mise en place d'un « groupe de travail » sur la fiscalité des généralistes conventionnés. Finalement, cette discussion aura lieu dans le cadre, beaucoup plus large, de la négociation de l'accord-cadre commun aux professionnels de santé libéraux.

Cyrille DUPUIS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7114