Pour ouvrir le chantier de l'amélioration des conditions d'exercice des libéraux, la direction de l'Hospitalisation et de l'Organisation des soins (DHOS), qui s'occupe de l'opération au ministère de la Santé, a mis les petits plats dans les grands.
Ont accueilli les représentants des médecins à cette « simple » réunion technique rien de moins que deux ministres - Elisabeth Guigou, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, et Bernard Kouchner, ministre délégué à la Santé -, ainsi que les pilotes de la DGS (direction générale de la santé) et de la DHOS.
Tapis rouge, donc, pour MG-France, dont la délégation avait fait une place à deux représentants des coordinations de médecins, mais aussi pour SOS-Médecins, pour le SMIF (Syndicat des médecins indépendants de France), la Fédération des maisons médicales de garde, les jeunes médecins généralistes (ISNAR et SNJMG), pour l'Ordre et pour la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français).
La CSMF a donc retrouvé le chemin du ministère. Un geste de pure forme : l'organisation, qui orchestre depuis près de trois mois avec le SML (Syndicat des médecins libéraux) le mouvement de grève des généralistes, n'entend pas pratiquer « la politique de la chaise vide ». Au ministère, son secrétaire général, le Dr Hubert Wannepain, a trouvé la discussion « correcte et polie », mais n'a pas modifié son discours d'un iota ; il a regretté de « ne pas encore avoir été entendu » et revendique inlassablement la consultation à 20 euros, la visite à 30 euros, ainsi qu'une convention unique (commune aux généralistes et aux spécialistes).
Une impression mitigée
Or là n'était pas l'ordre du jour de la réunion de lundi. Tenant pour acquis l'accord passé le 24 janvier dernier entre MG-France et l'assurance-maladie, les pouvoirs publics sont passés à autre chose : l'astreinte de garde et les aides à l'installation, en l'occurrence. Sur ces deux questions, le président de MG-France, le Dr Pierre Costes, attendait Elisabeth Guigou et Bernard Kouchner au tournant. Il est ressorti de la DHOS avec une impression mitigée, surtout à propos des astreintes, dans la mesure où les aides à l'installation promises fonctionneront avec un effet rétroactif au 1er février. Pour les astreintes, « ce n'est pas gagné, commente Pierre Costes, et pourtant, tout retard à la rémunération des médecins ne ferait que rendre plus douloureuse la mission de service publique que ceux-ci assurent réellement depuis des années ».
Si au ministère, le Dr Costes est un peu resté sur sa faim, ce n'est pas seulement parce que les discussions n'ont pas été closes à la fin de cette première réunion technique - les débats doivent se poursuivre sur les mêmes dossiers mercredi prochain 20 février. Elisabeth Guigou a eu beau, selon MG-France, faire preuve d'un « fort volontarisme » et « s'engager avec détermination à ce que le forfait d'astreinte de garde puisse se faire au début du mois de mars », Pierre Costes a besoin de signes évidents et rapides pour convaincre ses troupes du bien-fondé de son action.
Sur le terrain, la grève des gardes continue
Que la ministre insiste dans les colonnes du « Généraliste » sur le fait qu'elle traite « très vite » et « selon un calendrier extrêmement précis » le dossier des médecins ne suffit pas. Que Bernard Kouchner, évoquant la vie quotidienne des médecins, déclare que « la crise est profonde » et que la « désamorcer » prendra « des semaines et peut-être des mois » va sans doute dans le sens inverse de ce que souhaite MG-France. Que l'Ordre ait déposé un recours partiel en référé contre le protocole d'accord du 24 janvier, dont il considère qu'il le « dépossède de sa mission relative à l'organisation des gardes d'urgence », n'arrange rien.
Car, sur le terrain, les libéraux s'impatientent. Le week-end dernier, la grève des gardes n'a pas faibli. « Elle continue à perturber gravement le fonctionnement des centres 15. Le mouvement est extrêmement suivi », souligne le Dr Michel Chassang, président de l'UNOF (Union nationale des omnipraticiens français). Les coordinations ne désarment pas non plus. En Charente-Maritime, une miniguerre s'est ouverte par presse locale interposée entre les médecins appliquant de manière sauvage le C à 20 euros et la caisse primaire d'assurance-maladie. Les mouvements de grève prévus pour la fin de la semaine sont plus que jamais d'actualité : surfacturation des actes de 1,5 euro jeudi par les coordinations au profit des Restos du Cur, nouvelle « Journée sans toubib » vendredi à l'appel de l'UNOF et du SML, à laquelle les médecins de centres de santé ont annoncé qu'ils allaient se joindre.
Lundi - c'était une première -, les coordinations étaient représentées au ministère (voir ci-contre). Le Dr Costes, avec lequel beaucoup partagent l'idée de défendre les conventions séparées, leur avait fait une place dans sa délégation. Le geste, quand on se souvient que c'est très souvent en réaction contre l'accord signé par Pierre Costes avec l'assurance-maladie que les conventions se sont constituées, est paradoxal. Il pourrait cependant se répéter. MG-France tend en effet la main aux « coordonnés » en leur disant qu'il reste des choses à négocier dans le cadre de la rénovation conventionnelle, le syndicat se disant « tout à fait prêt à élargir ses délégations » dans ce cadre.
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