L'émergence d'une coordination nationale des généralistes, qui affirme avoir fédéré 30 000 médecins de presque tous les départements, aura été un des faits marquants du conflit des généralistes.
A la fois aiguillon des syndicats médicaux, avec lesquels elle entretient des liens complexes et parfois étroits, bête noire des caisses et du gouvernement, boîte à idées radicales (les « tarifs sauvages », les lettres de déconventionnement), mais surtout catalyseur de la révolte des praticiens de terrain, la coordination, cette « nébuleuse à géométrie variable », comme la décrit un de ses porte-parole, doit relever le défi... du retour au calme.
En effet, les coordinations ne sont jamais aussi actives que dans les périodes de poussée de fièvre. Or, même si de nombreux dossiers ne sont pas réglés, l'accord sur la consultation à 20 euros met un terme à sept mois de crise ouverte.
La création d'un syndicat écartée
« Plusieurs scénarios sont envisageables, analyse le Dr Patrick Guenebeaud, généraliste à Laloubère (Hautes-Pyrénées), un des porte-parole de la coordination nationale. La création d'un syndicat semble très difficile. On peut aussi décider d'investir en bloc un seul syndicat existant. Troisième possibilité : à titre individuel, les médecins coordonnés investissent les centrales syndicales dont ils sont proches pour faire gonfler les effectifs. Autre hypothèse, chimérique, mais pour moi la plus efficace : réaliser l'unité syndicale dans une organisation unique. Enfin, on ne peut exclure que la coordination se désagrège progressivement... » Il souhaite que soit préservé l' « esprit » et le « ton » des coordinations, qui inspirent notamment les nombreux forums de discussions sur Internet. « Pour cette année au moins, ajoute le Dr Guenebeaud, nous devons continuer à faire pression, rester une force de frappe pour défendre la médecine générale sur trois dossiers : la démographie médicale, le statut social et fiscal, la permanence des soins et les gardes. »
Le Dr Jean-Marc Rehby (Lille), porte-parole national de la coordination, ne dit pas autre chose et met en garde les pouvoirs publics. « Si certains croient que tout est terminé, que nous allons rentrer dans le rang, alors que la plupart de nos revendications ne sont pas satisfaites, il y aura des lendemains qui déchantent », déclare-t-il, avant d'expliquer que pour les généralistes « il est hors de question de travailler comme hier, de reprendre les gardes ou la télétransmission comme avant ». Lui aussi veut entretenir la flamme. « On continue de recueillir des lettres de déconventionnement, le mouvement a été suspendu, pas arrêté », précise-t-il. Quant à la grève des gardes, elle est « maintenue ». Lucide, il estime que la coordination nationale « a à la fois conscience de son importance et de sa fragilité » et que les vacances risquent de mettre son activisme en sourdine. « Nous aurons peut-être une AG début juillet, on verra ce qui se passe en septembre », déclare le Dr Rehby. S'il confirme que la création d'un syndicat est écartée, il juge « possible » la constitution d'une association qui donnerait une visibilité et une légitimité accrues à cette émanation de la « base ».
Plus que jamais, la coordination nationale entend être « associée » à la négociation de la future convention, faute de pouvoir signer un accord. « Les généralistes n'accepteront plus des décisions d'en haut », affirme un autre porte-parole du mouvement, qui est « très dubitatif sur la situation du paysage syndical ».
L'accord sur le C à 20 euros a créé un précédent à cet égard, puisqu'une délégation de six représentants des coordinations a accompagné les syndicats dans la négociation. Certains n'hésiteraient pas à renouveler l'expérience. « On nous a parfois présenté comme des gens agressifs ; mais la réalité, c'est que les généralistes sont quasiment tous des conventionnistes », observe le Dr Guenebeaud, qui voit dans les coordinations une « aventure humaine extraordinaire ».« Les liens tissés pendant six mois ne disparaîtront pas », confirme le Dr Jean-Paul Hamon (Clamart), un des principaux animateurs du mouvement. Internet, qui a joué un rôle majeur dans l'éclosion du phénomène des coordinations, devrait aussi rester un vecteur puissant du ras-le-bol des généralistes. « L'informatisation nous a été imposée, ironise le Dr Rehby. Maintenant, elle nous permet de rester tous en contact, c'est l'effet boomerang ! »
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