Il n'y a toujours pas de sortie de crise qui se profile dans le conflit qui oppose, depuis deux mois et demi, le gouvernement aux médecins généralistes.
Malgré l'accord de revalorisation des honoraires, conclu entre MG-France et les trois caisses nationales d'assurance-maladie (« le Quotidien » du 28 janvier), et malgré une rencontre au ministère avec Elisabeth Guigou et Bernard Kouchner, la Confédération des syndicats médicaux (CSMF) et sa branche généraliste, l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF) campent sur leurs positions.
Les deux organisations appellent les médecins à poursuivre et même à intensifier leur mouvement de protestation (grève des gardes et de la télétransmission). « Nous sommes profondément déçus, c'était un dialogue de sourds : les médecins généralistes demandent des haricots verts et la ministre nous a proposé des frites », a résumé le Dr Claude Maffioli, président de la CSMF, à l'issue de cet entretien. Pour le Dr Michel Chassang, président de l'UNOF, « le gouvernement a délibérément choisi d'appuyer un accord minoritaire que nous rejetons. La situation est totalement ficelée et il n'y a plus d'espace pour le dialogue », a-t-il tranché, en considérant que cette rencontre n'avait montré « aucun signe d'ouverture ». Le Syndicat des médecins libéraux (SML) et la Fédération des médecins de France (FMF) invitent également les généralistes, mais aussi les spécialistes, à durcir le mouvement et à rester attentifs aux prochaines consignes syndicales.
Ateliers en février et mars
Elisabeth Guigou, qui avait affiché sa volonté d'avancer sur les « modifications structurelles » de la profession, a donc partiellement échoué dans sa tentative pour reprendre la main et renouer les fils du dialogue avec le corps médical. Un calendrier « précis » de discussions a bien été proposé aux syndicats mais la CSMF et l'UNOF, qui exigent en préalable la revalorisation du C à 20 euros et du V à 30 euros, rejettent cette méthode.
Pour autant, le Dr Michel Chassang n'exclut pas de participer à ces ateliers. « Nous n'avons pas dit de manière définitive que nous n'irons pas à des ateliers, même si ce n'est pas de nature à apaiser le malaise des généralistes », a-t-il déclaré au « Quotidien».
Le calendrier de travail prévoit quatre dates de réunions, en février et en mars, pour conduire les travaux concrets sur les futures aides à l'installation, la nouvelle organisation des gardes libérales, la sécurité, les relations quotidiennes avec l'assurance-maladie, la démographie médicale ou encore la formation médicale continue. Un chantier lourd que la CSMF refuse d'engager dans le contexte actuel. « La ministre n'a pas compris la gravité de la situation, commente le Dr Maffioli. L'incendie est là et on nous propose de créer des groupes de travail pour discuter des réseaux ou de la démographie médicale. »
Claude Pigement, délégué national du PS aux professions de santé, regrette pour sa part la « fuite en avant » de l'UNOF et de la CSMF qui, estime-t-il, « se figent dans une posture d'opposition ». Il invite à nouveau les syndicats à se mettre autour de la table table pour engager des « travaux sur le fond ».
MG-France va réaliser un état des lieux
Le conflit semble donc toujours dans l'impasse, même si la concrétisation des augmentations tarifaires au 1er février (vendredi) pourrait modifier quelque peu la donne. Egalement reçu au ministère, le Dr Pierre Costes, président de MG-France, veut croire en tout cas à la volonté du gouvernement d'investir durablement sur la médecine générale. « Sur les deux chantiers principaux qui correspondent aux attentes de la profession, à savoir la permanence des soins et la démographie, il y a une réelle volonté d'avancer, en tout cas dans le discours », affirme-t-il. MG-France a décidé de mener dans chaque département un état des lieux précis et validé de « l'existant » (tours de garde, secteurs qui manquent de médecins) pour que les aides financières prévues dans l'accord signé avec la CNAM (forfait d'astreinte, aides à l'installation dans les zones prioritaires) puissent être « fléchées » et « concrètes ».
Le gouvernement s'est engagé à ce que les préfets conduisent ce même travail de recueil des besoins départementaux pour la permanence des soins.
Reste à savoir comment les médecins se détermineront dans les prochaines semaines. Selon l'UNOF, « la grève des gardes est toujours aussi bien suivie » et « 5 000 médecins » auraient encore été réquisitionnés le week-end dernier dans la quasi-totalité des départements (voir en page 4).
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