SOYONS SÉRIEUX : les perdants du premier tour ne sont pas du tout les victimes du mode de scrutin ; même si 50 % du vote se faisait à la proportionnelle, l'UMP aurait la majorité absolue. Au Modem, pourtant, on se plaint amèrement ; on fait remarquer que les communistes, avec 4,85 % des voix, peuvent espérer une quinzaine de sièges à l'Assemblée, mais que les bayrouistes, avec 7,4 %, risquent de n'en obtenir qu'un ou deux. Conclusion : le système est injuste.
Faux. Les communistes, qui sont par ailleurs en voie de disparition pour n'avoir pas renoncé aux dogmes collectivistes (en Italie, les anciens communistes ne s'appellent même plus communistes), se battent là où ils sont bien implantés, connus et reconnus, et ils ont un accord électoral avec le PS. François Bayrou, qui est d'une obstination rare, a d'abord perdu le concours des membres de l'UDF dont la notoriété est la plus grande ; puis, il a envoyé quelques centaines de novices, sacrés candidats d'un coup de plat de l'épée sur l'épaule, dans un maximum de circonscriptions où les malheureux étaient inconnus, ou concurrencés par un UDF historique ou encore sur une terre où le centrisme n'existe pas. Ce n'est pas de cette façon qu'on fait élire des députés. L'erreur de M. Bayrou, c'est de croire qu'un résultat national s'applique dans une infinité de microcosmes. On vote pour un candidat à la présidence et après, on vote pour un homme ou une femme en qui on a confiance. La célébrité de M. Bayrou, ou ce qu'il peut avoir de charisme, ou ce qu'il peut y avoir d'enthousiasmant dans ses idées, ne déteint pas sur tous ceux qui se réclament de lui. Il suffit de voir que même Marielle de Sarnez, numéro deux du Modem, que la France entière connaît, a été éliminée, dans le XIVe arrondissement de Paris. Elle n'avait aucune chance contre Serge Blisko (PS) et Nicole Guedj (UMP). « L'injustice » faite au Modem, en l'occurrence, c'est qu'il est davantage un mouvement sécessionniste de l'UDF que l'UDF elle-même.
La différence entre mai et juin.
De même, Ségolène Royal, qui se bat avec courage pour la mobilisation de l'électorat socialiste, a tort de continuer à se réclamer de ses « 17 millions de voix », comme si elles lui appartenaient définitivement. Tout le monde aura compris que le Parti socialiste n'a pas retrouvé aux législatives la totalité des électeurs de Ségolène Royal, pour la bonne raison qu'ils sont libres de voter pour elle en mai et de voter pour d'autres en juin. On sait bien pourquoi l'ex-candidate socialiste continue, avec des procédés de publicité pour la lessive, à invoquer le premier tour de la présidentielle : elle entend bien prendre la tête du PS dont elle prétend être devenue le chef naturel. Mais sa stratégie n'a pas varié d'un pouce depuis le début de l'année : elle est entièrement tournée vers la conquête, pas vers l'exercice du pouvoir. Il s'agissait d'arriver à l'Elysée en 2007 ; et si c'est impossible, d'y parvenir en 2012. Quant au programme, qui s'en soucie ?
LE PS DOIT ADMETTRE QU'IL Y A DU BON DANS LES IDEES DU BLAIRISME ET DE LA NOUVELLE GAUCHE
Conquérir le pouvoir, exercer le pouvoir.
On peut faire beaucoup de reproches à Nicolas Sarkozy, mais on ne saurait nier qu'il n'a jamais voulu le pouvoir que pour l'exercer. Même s'il faut se méfier des grands élans du coeur, cela doit signifier qu'il entend améliorer la condition de ses concitoyens. C'est pourquoi la gauche ne peut rien gagner cette année : elle n'a pensé qu'à arracher le pouvoir à la droite parce qu'il lui semblait que la droite, avec Villepin, était à terre ; elle a complètement sous-estimé Nicolas Sarkozy, qu'elle a accablé de critiques sans qu'elle s'aperçût de sa remarquable intelligence tactique et même, pourrait-on dire sans la moindre crainte d'encenser le personnage, de la vision, qu'il a poursuivie avec constance, d'une droite qui triompherait dès l'instant où elle affaiblirait beaucoup, et pour longtemps, le Front national.
Le PS doit admettre qu'il y a du bon dans le blairisme et la Nouvelle gauche ; c'est dans cette direction qu'il doit s'orienter. Qu'il laisse aux excités de l'extrême gauche intolérante le rêve de l'égalitarisme. On ne fait pas une politique avec le coeur sur la main, mais dans le plus rigoureux des pragmatismes. N'est valable que ce qui marche, pas ce qui devrait marcher. Le PS dispose d'assez de talents pour procéder, vite et bien, à sa refondation. Certes, la déprime le guette, si elle n'est déjà installée. Le temps pansera les plaies.
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