LE PROCÉDÉ N'EST PAS nouveau. A plusieurs reprises déjà, « le Quotidien » a mis en garde ses lecteurs contre les pratiques de certaines sociétés qui proposent l'insertion des coordonnées professionnelles dans des annuaires imprimés ou électroniques en échange de fortes sommes d'argent (voir notre édition du 2 avril 2003).
Certains praticiens s'inquiètent des courriers de relance récemment reçus. Le Dr Charlotte Meyer n'a pas pris garde le jour où elle a retourné, daté et signé un document ambigu qui s'apparentait à une simple vérification de coordonnées, alors qu'il s'agissait en fait d'un contrat d'insertion dans un annuaire professionnel. Elle n'a jamais payé les 1 010,62 euros que lui a réclamés AnnuairePRO en mars 2003. Après avoir porté plainte auprès du tribunal de grande instance de Colmar, chargé du dossier, elle a cru l'affaire classée. Erreur. « Je viens de recevoir un nouveau courrier me demandant 1 010,62 euros pour la deuxième année d'abonnement », s'étonne la gynécologue. Le Dr Meyer l'ignorait : les contrats d'AnnuairePRO sont automatiquement renouvelables, ils durent deux ans au minimum.
Le TGI de Colmar a reçu plusieurs milliers de plaintes contre AnnuairePRO, venant de médecins, mais aussi d'associations, de chefs d'entreprise, etc. Dans l'attente du résultat de l'instruction pénale, les victimes ont intérêt à surseoir à tout paiement ; elles peuvent porter plainte auprès du tribunal de Colmar, qui reste compétent même si AnnuairePRO a déménagé à Strasbourg. Elles ont également intérêt à résilier leur contrat et à garder copie de cette lettre, conseille une avocate. Cela leur garantit qu'à partir de cette date elles ne doivent plus rien à AnnuairePRO. Car on ne peut présumer de l'irrégularité de cette société : « Si le tribunal juge la société légale, celle-ci sera alors en droit de poursuivre l'ensemble de ses cocontractants en recouvrement de paiement », précise l'avocate.
Nouveaux pigeons.
Malgré la médiatisation de ces affaires, les actions en justice menées et parfois les condamnations prononcées contre elles - en 2001, le tribunal de Sens a annulé le contrat et attribué des dommages et intérêts à un professionnel qui avait porté plainte contre le Tour travel guide -, ces sociétés, basées le plus souvent à l'étranger, poursuivent leurs actions et cherchent de nouveaux pigeons. C'est ainsi que le Dr Olivier Grinda a reçu un premier courrier d'European City Guide (ECG) en avril dernier. « C'était pendant la campagne des élections européennes, raconte ce praticien libéral . J'ai cru que c'était pour créer un annuaire européen des endocrinologues. Le courrier précise en gros caractères que l'actualisation des données n'entraîne aucun frais, je ne me suis pas méfié. » A tort, car le courrier indique aussi, mais en bas et en tout petit, que « le prix est de 857 euros par édition ». Aujourd'hui, le Dr Grinda en est à son troisième courrier de relance assorti de menaces d'huissier.
Pourtant, l'ECG, basé en Espagne, a déjà été condamné à verser deux amendes (22 896 euros en 2002 puis 300 000 euros en 2003) par le gouvernement de Catalogne. Mais l'entreprise a fait appel, puis a déménagé à Valence, où les sanctions infligées à Barcelone ne s'appliquent pas. Pour Xavier Gaziello, directeur régional de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en Languedoc-Roussillon, il ne fait nul doute qu'ECG va continuer à exercer des pressions auprès de ses clients, « le seul but recherché étant la récupération de sommes par intimidation ».
Sur son site Internet*, la Dgccrf (Direction de la concurrence) conseille, en cas de renvoi du courrier initial, de saisir un tribunal civil ou un tribunal de commerce pour demander l'annulation du contrat sur le fondement du vice de consentement. La victime peut aussi saisir la Dgccrf de son département d'une plainte afin de lui donner une suite soit sur la base de la publicité mensongère (si l'entreprise est située en France), soit dans le cadre de la coopération administrative internationale (si l'entreprise est domiciliée à l'étranger).
*http://www.finances.gouv.fr/DGCCRF/04_dossiers/consommation/annuairespr…
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