« C'est une bombe, nous sommes écurés, la guerre est déclarée ! » Aucun mot ne semble trop fort au Dr Xavier Lambertyn, généraliste dans l'Oise et membre de la Coordination nationale des médecins généralistes, après l'envoi par le préfet de réquisitions à un certain nombre de ses confrères.
« Depuis le jeudi 13 mars, les généralistes d'une bonne vingtaine de secteurs de garde de l'Oise reçoivent des réquisitions signées par le préfet, pour le week-end du 15 et 16 mars, ainsi que pour la semaine suivante », indique-t-il avant de préciser : « Depuis quelques temps, dans certains secteurs de garde de l'Oise, les médecins assuraient les gardes, mais seulement de 20 h à 23 h en semaine, et de 8 h à 20 h les week-ends, et peu à peu, le mouvement a fait tâche d'huile ; nous étions en négociations avec les CODAMU (comités départementaux de l'aide médicale urgente) au sujet de la permanence des soins, et une réunion était prévue sur ce sujet avec la DDASS (direction départementale des Affaires sanitaires et sociales) et l'Ordre départemental, le préfet aurait au moins pu attendre les conclusions de ces réunions ! »
Juridiquement, estiment les généralistes de l'Oise, il est presque impossible de ne pas déférer à une réquisition préfectorale. Toutefois, une réunion intersyndicale avec des représentants de MG-France, de la CSMF, de la FMF et de la coordination devait avoir lieu ce week-end, afin de déterminer les suites à donner à l'affaire.
Le dialogue n'est pas rompu
Pour Walter Vorhauer, président de l'Ordre de l'Oise, le jugement est plus nuancé : « Il y a trois types de secteurs dans le département ; pour ceux qui n'ont fourni aucun tableau de garde, je comprends ces réquisitions effectuées par la puissance publique, même si elles ne constituent pas la meilleure réponse ; les secteurs qui ont des tableaux de garde validés n'ont naturellement pas reçu de réquisition ; en revanche, c'est une surprise que le préfet ait inclus dans ses réquisitions les secteurs aux tableaux incomplets (1) ; l'Ordre souhaiterait que les listes de réquisition lui soient adressées avant, cela aurait permis de négocier. » Le Dr Vorhauer organise une réunion sur ce sujet demain mardi avec les responsables des tours de garde de l'Oise et la directrice de la DDASS, et pense que la situation « devrait pouvoir s'arranger ».
Annick Piquet, directrice de la DDASS de l'Oise et, à ce titre, à l'origine des réquisitions signées par le préfet, souhaite relativiser les choses : « Le dialogue n'est absolument pas rompu avec les médecins, mais comprenez que sur les 37 secteurs de garde de l'Oise, il y en a 22 ou 23 qui ne produisent pas de tableau de garde, ce qui correspond à un bassin de population d'environ 200 000 personnes ; cela fait des mois que nous constatons que la couverture n'est pas optimale, c'est un euphémisme, et si nous en sommes venus là, c'est que malgré tout le temps qu'on a laissé aux médecins pour s'organiser, rien n'a avancé. Il est exact qu'il n'y a pas eu d'avertissement préalable de notre part, mais il y a eu rappel à l'ordre de la part de l'Ordre départemental. Quant à certains médecins qui auraient reçu un avis de réquisition pour des secteurs de garde aux tableaux régulièrement complétés, il se peut qu'il y ait eu ici ou là des distorsions ou des erreurs, nous allons avoir des réunions à ce sujet pour faire le point. » De source intersyndicale, on indique qu'un courrier signé par tous les responsables syndicaux de l'Oise va être prochainement adressé au préfet « pour le mettre face à ses responsabilités ».
(1) C'est-à-dire des tableaux où les gardes ne sont plus assurées passé 23 h en semaine et 20 h le week-end.
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