Le Conseil national de l'Ordre des médecins publie, sur son site Internet, une note qui résume « l'état actuel du droit » concernant la responsabilité des médecins de garde ou d'astreinte.
L'Ordre fait cette mise au point en attendant la clarification du statut du médecin de garde ou d'astreinte qu'il a récemment demandée au gouvernement (« le Quotidien » du 17 octobre). « Le nombre infime de contentieux mettant en cause le comportement des médecins de garde par rapport à l'importance de leur activité ne doit pas occulter l'accroissement significatif des récriminations, voire des plaintes, dont ils font l'objet », rappelle l'Ordre. D'où l'intérêt, pour les médecins, de « mieux connaître ce qu'imposent aujourd'hui la loi pénale et la déontologie, appliquées et interprétées respectivement par la Cour de cassation et la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins ».
A travers leurs décisions respectives, ces deux instances se refusent à donner à chaque appel au médecin de garde le caractère d'une réquisition.
La note de l'Ordre relève que les poursuites pénales pour non-assistance à personne en danger « ont principalement visé les médecins » ces dernières années.
Garder une « trace de l'échange »
De 1991 à 2000, la section disciplinaire de l'Ordre national a pris une cinquantaine de décisions concernant des médecins (généralistes de garde pour la plupart) qui étaient poursuivis pour avoir omis de porter secours à une personne en danger. L'Ordre note d'ailleurs une « augmentation sensible » de ces décisions avec 11 jugements pour la seule année 2000.
Sur le plan pénal, la Cour de cassation a une « position constante » depuis 1949 : c'est au médecin d'apprécier l'utilité ou l'urgence de son intervention, sous le contrôle de sa conscience et des règles de sa profession. A cet égard, l'Ordre note que, à l'instar de sa section disciplinaire, « les juges tiennent compte du sérieux avec lequel l'interrogatoire téléphonique est mené », d'où la nécessité de « conserver par tous les moyens une trace de l'échange » avec l'interlocuteur. Pour le juge disciplinaire, le médecin ne saurait prendre des « mesures dilatoires telles que la prescription de médicaments banals face à un état alarmant ».
En cas de doute sur le péril encouru, le juge disciplinaire et le juge pénal estiment nécessaire le déplacement du médecin de garde.
La section disciplinaire de l'Ordre fait valoir, dans ses décisions, le rôle d'écoute du médecin vis-à-vis de l'appelant, par exemple lorsqu'il s'agit de parents affolés par l'état de santé de leurs jeunes enfants. Selon l'Ordre, le médecin devra « prendre le temps de rassurer l'appelant » et pourra « reprendre contact » avec lui ou avec le médecin traitant.
« Contrairement à une idée reçue », souligne l'Ordre, « le délit de non-assistance à personne en danger n'est pas constitué du seul fait de l'absence de déplacement du médecin sollicité ». Une assistance efficace passe en effet par une action personnelle du médecin et/ou le recours à un tiers (par exemple, un transport médicalisé ou non vers un établissement hospitalier), surtout si le médecin doit faire face à plusieurs urgences simultanément.
Les juges des tribunaux et la section disciplinaire de l'Ordre s'accordent sur l'obligation du médecin de garde non seulement de faire appel personnellement à ce tiers, mais aussi de s'assurer de son intervention effective.
Le médecin peut être exonéré de son obligation d'assistance si lui-même court un risque en se déplaçant pour aller au secours du patient. Néanmoins, un tribunal a récemment condamné un médecin de garde qui ne s'était pas déplacé pour examiner un bébé de onze mois présentant des symptômes alarmants, sous le prétexte qu'il était fatigué et redoutait des chutes de neige. Ce médecin n'avait pas non plus appelé un organisme de secours. L'Ordre reconnaît le caractère « répréhensible » de son comportement, mais s'interroge sur « d'autres situations telles que les appels de nuit au médecin de garde dans des quartiers où les risques d'agression physique sont réels ».
Le document de l'Ordre est disponible sur Internet à l'adresse suivante : www.conseil-national.medecin.fr/CNOM/Actu.nsf/V_RT?OpenView
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