ON PEUT ÊTRE médecin lourdais et ne pas entonner des alléluia quand le pape se rend en pèlerinage dans la cité mariale. Ainsi le Dr Francis Camino. Ce généraliste installé en plein centre-ville se rappelle «le mauvais souvenir» du précédent voyage, lorsque Jean-Paul II, le 15 août 2004, était venu à Lourdes. «La ville avait été littéralement verrouillée par les autorités, dans un rayon de 20 à 30km, raconte-t-il. Avec neufconfrères, je faisais partie de l'équipe de garde censée répondre aux urgences. En fait, malgré les macarons qui nous avaient été distribués, nous sommes restés confinés trois jours durant à l'intérieur de nos cabinets. Il nous était même interdit de nous approcher des fenêtres sur le passage du pape.»
Les autorités semblent avoir retenu les enseignements de ce ratage de la PDS. «Lourdes va rester ouverte, accessible et fluide, promet Jean-Pierre Artiganave, avec un minimum d'interdictions de circuler, sauf aux abords immédiats du cortège pontifical, comme lundi, entre 6h15 et 9heures à proximité de l'hôpital.»
Dix volontaires.
C'est justement à l'hôpital, à proximité des urgences, que les omnipraticiens lourdais ont décidé cette fois de s'installer, avec une maison médicale de garde exceptionnelle. «Du vendredi à midi au lundi à 8heures, nous allons nous relayer en binômes par plages de douze heures, explique le Dr Philippe Ayela, président de l'association lourdaise d'urgence médicale. Dix volontaires se sont proposés sans difficulté, sur les vingt-cinq généralistes que compte la ville. Et nous avons averti le SAMU et la DDAS par courrier que nous excluons tout déplacement à domicile, les patients pouvant théoriquement se déplacer jusqu'à nous et les cas de détresse vitale relevant de la régulation des PMA.»
«À Lourdes, poursuit le Dr Ayela, nous avons l'habitude de vivre des situations paroxystiques, avec des pointes jusqu'à 400000 pèlerins recensés. Et nous n'avons jamais été dépassés par les événements. L'esprit très confraternel qui règne entre nous y est sans doute pour beaucoup.»
La présence d'un grand nombre de malades et de handicapés ne constitue pas, semble-t-il, un facteur aggravant, leur prise en charge étant assurée par les médecins des associations hospitalières.
Le Dr Bernard Grenet fait partie des dix volontaires qui seront présents au CH. «On peut s'attendre à deux jours difficiles, pronostique-t-il. Malgré le déploiement militaire et policier, le pire peut toujours arriver. Et la configuration du site des sanctuaires n'est pas la plus facile pour réagir à une catastrophe ou à une panique générale.»
Comme le redoute un chauffeur de taxi, «en l'absence de tout plan de circulation, avec des directives incompréhensibles, l'option de laisser circuler toutes les voitures risque d'entraîner des conséquences dramatiques et ingérables. Et ce ne sont pas deux malheureux hélicos qui y changeront quoi que ce soit».«La plupart des confrères restent parfaitement paisibles», note pourtant le Dr Alain Goussé, lui aussi d'astreinte à la maison médicale.
Jusqu'au dernier moment, des interrogations cruciales vont nourrir les conversations, dans les cabinets et les salles d'attente. «On ne sait pas combien exactement de pèlerins feront le voyage, résume le Dr Ayela, ni quelles conditions nous réserve la météo. De fortes chaleurs peuvent influer fortement sur le bilan médical.»
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