Un échantillon représentatif

Fumer tue la fonction érectile

Publié le 28/03/2006
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ON SE RAPPELLE que la Massachusetts Male Aging Study (étude sur des hommes vieillissants), menée dans une cohorte d’hommes (40-70 ans) vivant à Boston, avait montré une association entre le tabagisme et un risque doublé de troubles fonctionnels érectiles, après ajustement pour d’autres facteurs qui influent. Et qu’un autre travail mené au Vietnam (Mannino et coll.) chez 4 462 vétérans âgés de 31 à 49 ans, a révélé que les fumeurs rapportent 1,5 fois plus souvent que les non-fumeurs qu’ils souffrent d’impuissance.

Les auteurs de la nouvelle étude australienne se sont adressés à une population non sélectionnée. Ils ont recherché les facteurs associés à une dysfonction érectile dans un grand échantillon de 8 367 hommes australiens âgés de 16 à 59 ans (parmi les données provenant de l’étude ASHR ou Australian Study of Health and Relationship), une étude de population où l’on suit la santé des participants sur les plans de la sexualité et de la reproduction.

Un total de 19 307 adultes âgés de 16 à 59 ans ont répondu à un questionnaire posé par téléphone. Les données ont été analysées pour 8 367 hommes. L’activité sexuelle a été analysée d’une manière large, qui prend en compte les relations sexuelles avec partenaire et la masturbation. Les résultats ont été corrigés pour des variables confondantes : âge, statut marital, langue parlée à la maison, éducation, âge lors de la première relation sexuelle, traitement pour problème cardiaque, présence d’un diabète, prise d’alcool, et surtout, habitudes vis-à-vis du tabagisme.

Un trouble érectile a été défini comme «une difficulté à avoir ou à maintenir une érection lorsque le sujet le souhaite, le problème ayant persisté pendant plus d’un mois au cours de l’année précédente».

Près d’un homme sur dix.

Quasiment, un homme sur dix a rapporté souffrir de troubles de la fonction érectile (9,1 %). Plus d’un quart (27,2 %) des hommes qui ont répondu au questionnaire étaient fumeurs, avec 20,9 % d’entre eux consommant moins de 20 cigarettes par jour et 6,3 % plus que ce nombre.

En comparant avec les non-fumeurs, le risque relatif ajusté de troubles de la fonction érectile est de 1,24 (IC à 95 % de 1,01 à 1,52, p = 0,04) pour ceux qui fument un nombre inférieur ou égal à 20 cigarettes par jour et de 1,39 (IC à 95 % de 1,05 à 1,83, p = 0,02) pour ceux qui fument davantage.

L’étude fait aussi apparaître d’autres facteurs associés de manière significative et indépendante au trouble de la fonction érectile : un âge plus avancé, un niveau bas d’éducation, la prise de médicaments cardiotropes.

A l’inverse, une consommation modérée d’alcool (de un à quatre verres par jour) est associée à un risque réduit de troubles érectiles.

Le risque augmente avec le nombre de cigarettes.

On note que le risque augmente avec le nombre de cigarettes fumées. «Les programmes de promotion de la santé publique pourraient utiliser le lien qui unit le tabagisme et les troubles fonctionnels érectiles pour aider les jeunes hommes à arrêter de fumer», estiment les auteurs.

Les études ont souvent été limitées par l’usage d’échantillons de petite taille et/ou sélectionnés. Cette étude s’appuie sur une observation représentative de la population dans son ensemble. On note qu’en Australie, la prévalence du tabagisme est élevée, la moyenne des hommes fumeurs est de 19 % (comparativement à 16 % dans d’autres régions équivalentes) et, chez les jeunes hommes, elle est de 24 % (20-29 ans).

Maintenant, il reste à établir de manière formelle le lien de causalité entre le fait de fumer et les problèmes d’érection.

C. Millet et coll. (Camperdown, Australie) dans « Tobacco Control », 2006 ; 15 : 136-139.

> Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7929