LE QUOTIDIEN
Elisabeth Guigou a présenté le PLFSS à la commission des Affaires sociales. Comment accueillez-vous ce texte ?
En fait, il n'y a pas grand-chose dans ce projet de loi : très peu de mesures nouvelles, peu de réformes, rien sur la régulation des dépenses. C'est le vide. Le point majeur de ce texte, c'est le financement, c'est-à-dire les équilibres d'ensemble, le FOREC (fonds chargé de financer les allégements de charges sociales pour le passage aux 35 heures), les fonds de réserve. Et sur ce point, il y a évidemment beaucoup à dire quant aux prévisions économiques du gouvernement.
Vous les estimez trop optimistes ? (1)
Mais les hypothèses du gouvernement sont profondément irréalistes ! Il n'y a aucun doute là-dessus. Aujourd'hui, plus personne ne croit à une croissance de 2,3 % pour 2001 et de 2,5 % pour 2002. Ce budget, pour tout dire, n'est pas sincère, il n'y a aucune chance de le réaliser. Et tout ce que répond Elisabeth Guigou, quand on le lui fait remarquer, c'est qu'il ne sert à rien d'ajouter aux inquiétudes, de dramatiser.
Il n'y a pas de redressement pérenne. Tout fléchissement de la croissance entraînera la réapparition de déficits massifs. Prenons l'exemple de la branche maladie : aucune mesure d'encadrement des dépenses de santé n'a été appliquée, ni les reversements ni les lettres clés flottantes.
Non, car ce n'est pas le mode de régulation que nous souhaitons. Ce que je dis, c'est que, depuis 5 ans, il ne s'est rien passé, on a laissé les dépenses filer, alors que la croissance était là.
Faux-semblant
Pour l'opposition, n'est-il pas contradictoire de dire que les objectifs de dépenses fixés sont irréalistes, tout en critiquant le dérapage des dépenses de santé ?
Ce qui est certain, c'est que le Parlement ne peut plus se contenter du faux-semblant que constitue l'ONDAM (objectif national de dépenses d'assurance-maladie). Nous n'avons aucun élément sur la détermination, sur la justification sanitaire de ce chiffre « balancé ». Pas un mot dans tout le PLFSS, ni dans les annexes. Chaque année, la majorité vote l'ONDAM parce qu'elle y est bien obligée. Et puis, chaque année, on a un dérapage financier considérable (17,3 milliards en 2000 et au moins 15,8 milliards en 2001, NDLR). Alors, plus ou moins habilement, le gouvernement « rebase » l'ONDAM. C'est un jeu de passe-passe un peu ridicule. Tout le système est à revoir.
Les objectifs pluriannuels, c'est du plus haut comique. Comment peut-on établir des prévisions pluriannuelles quand on est incapable de les faire annuellement ? C'est un non-sens, même s'il est légitime de s'interroger sur l'augmentation des dépenses de santé sur une longue période. En ce qui concerne le Haut Conseil de la santé, ça fera un organisme de plus.
Notre marge de manuvre dans ce domaine est très limitée. Cela dit, je considère que la discussion parlementaire qui s'annonce doit être, pour l'opposition, l'occasion de tracer les grandes lignes de son programme sur ces questions sanitaires et sociales. Le débat sur le PLFSS, c'est quand même une grande rencontre avec la nation. Or, pour l'instant, il est vrai, les travaux communs de l'opposition n'ont pas donné grand-chose sur ces sujets. Le problème de la régulation des dépenses est le plus difficile, il n'y a pas d'accord total au sein de l'opposition. J'ai l'impression que le RPR est encore, malgré tout, dans l'esprit des ordonnances Juppé. Nous, nous sommes extrêmement critiques.
Avec Martine Aubry, au moins, on pouvait discuter. On abordait toutes les questions sur le fond, même si elle n'était pas exempte de mauvaise foi. Avec Elisabeth Guigou, le dialogue est totalement impossible. Elle se dérobe à tout débat sérieux. J'ai le sentiment d'un mépris absolu.
(1) Les comptes de la Sécu pour 2002 sont fondés sur une hypothèse d'augmentation de 5 % de la masse salariale et sur une croissance du PIB de 2,5 %.
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