L'ASSURANCE-MALADIE « est une magnifique boutique qui ne fonctionne pas très bien », a résumé Bertrand Fragonard lors de son audition devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale. Dans leur rapport remis le 23 janvier au ministre de la Santé, les membres du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie « se sont bien gardés d'évaluer les marges disponibles », a fait remarquer le président de cette instance. Pourtant, « ces marges sont très significatives, à la fois dans le système ambulatoire et le système hospitalier. On peut améliorer la performance du système de soins et en termes de qualité et en termes de coût ».
Bertrand Fragonard a déclaré aux députés de la commission qu' « il serait absurde que le système reste sans pilotage ferme ». Dans le système actuel de « gouvernance chaotique », même l'Etat « n'est pas un pilote » à ses yeux, dès lors que cette gouvernance se caractérise surtout par son « émiettement ». « Rebattre les cartes, c'est bien, c'est tout à fait nécessaire, mais il ne faut pas trop tarder parce que, pendant ce temps, le déficit file », a-t-il souligné. « On ne va pas tout boucler d'ici à juillet ; mais jeter les bases est tout à fait souhaitable. »
« Evaporation » conventionnelle.
Le président du Haut Conseil a mis l'accent sur la nécessité d' « associer les professionnels de santé et les usagers à la réforme. Le drame, c'est qu'on a déjà cherché à le faire ». Parmi les écueils rencontrés jusqu'à présent, Bertrand Fragonard a rappelé que les accords conventionnels se sont souvent « évaporés » après évolution du contexte ou annulation du Conseil d'Etat.
Autre obstacle : les caractéristiques mêmes des professions de santé. « Il faut s'appuyer sur les professionnels, mais encore faut-il qu'ils le veuillent, a relevé le président du Haut Conseil. Ils sont parfois en rivalité électorale, ils ont leurs intérêts matériels et moraux. Il faut qu'ils les dépassent pour partager une vision commune. Cela n'a pas toujours été le cas. » Il a cité par exemple « l'absence de programme finalisé sur les prescriptions » et la mise en place relativement tardive (en 1993) des références médicales opposables ou RMO. « On peut aller plus vite et de manière plus brutale, mais alors on n'évitera pas les conflits avec les professionnels de santé », a-t-il souligné, tout en ayant « la conviction » que, maintenant, les choses « bougent de manière positive ». A la question « le système conventionnel est-il en panne ? », l'ancien directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie a répondu « oui, plutôt ». Sa relance sera « l'un des enjeux de la période à venir ».
A propos de l'idée d'une déresponsabilisation des patients via la carte Vitale et le tiers payant, Bertrand Fragonard estime que la gratuité a « très vraisemblablement » favorisé « un effet inflationniste » difficile à mesurer. Malgré tout, « s'il y a un seul chiffre à retenir, c'est que 5 % des assurés mobilisent 60 % des dépenses », a-t-il rappelé. D'où la nécessité de « concentrer vers eux » l'information sur la qualité.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature