O N sait que la fracture du col du fémur accroît la mortalité et la morbidité et l'on se doutait qu'une maladie psychiatrique est de mauvais pronostic.
L'équipe de Sharon Nightingale (Leeds) a déjà montré, dans une précédente étude, que la survie six mois après la fracture est diminuée chez les patients présentant une démence ou un délire, mais pas chez ceux qui ont une dépression. Il fallait donc savoir si la dépression ne met pas tout simplement plus longtemps à altérer le pronostic que la démence et le délire. Pour cela, la même équipe a suivi la même cohorte de patients jusqu'à un total de deux ans.
Cette cohorte se compose de tous les patients de 65 ans et plus admis dans deux hôpitaux universitaires (A et B) de la même ville et devant être opérés d'une fracture du col fémoral sur une période de dix-neuf mois. L'état de tous les patients était évalué avec des tests classiques. Au bout de deux ans, la survie de la cohorte était analysée.
Au départ, 903 patients remplissaient les critères d'inclusion. Mais 178 (19 %) n'ont pas été retenus dans l'étude : 78 ont refusé ; 41 étaient physiquement trop faibles pour être interrogés pour le bilan psychiatrique ; 19 entendaient trop mal pour cet interrogatoire ; 14 sont décédés avant l'interview ; 10 n'ont finalement pas été opérés ; 8 avaient une dysphasie ; 1 ne parlait pas anglais ; 1 a été transféré dans un autre hôpital. L'échantillon s'est donc réduit à 713 patients. Parmi eux : 208 (28 %) étaient sains sur le plan psychiatrique, 294 (40 %) avaient une démence, 108 (15 %) avaient un délire, et 93 (13 %) avaient une dépression (parmi eux, 66 n'avaient pas de traitement antidépresseur, ce qui suggère qu'il s'agissait soit d'un début de dépression, soit d'une dépression méconnue) ; enfin, 28 (4 %), qui avaient un autre trouble psychiatrique (alcoolisme, schizophrénie, troubles anxieux et phobies), n'ont pas été pris en compte dans l'analyse.
Deux ans après l'admission, 347 (47 %) patients étaient décédés, 384 étaient encore en vie, aucun n'ayant été perdu de vue. Résultat : après ajustement pour les facteurs confondants, la dépression, le délire et la démence, détectés tôt après la fracture de hanche, augmentent de façon substantielle le risque de décès dans les deux ans. La mortalité était plus élevée dans un des deux hôpitaux, même après contrôle des variables comme le statut socio-économique.
Prise en charge psychiatrique ou psychosociale
Les auteurs estiment que, de leurs résultats, on peut tirer trois types d'enseignements :
- une maladie psychiatrique est fréquente chez les sujets admis à l'hôpital pour fracture de hanche ; étant donné les conséquences, des interventions psychiatriques ou psychosociales doivent donc compléter la réhabilitation physique ;
- les études prospectives sur les conséquences de la dépression sur une affection physique doivent durer suffisamment longtemps afin de ne pas passer à côté d'observations importantes ;
- les différences entre les hôpitaux peuvent être liées à des variations concernant la globalité des soins.
« Lancet » du 21 avril 2001.
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