ALIMENT SANTE
De notre envoyée spéciale
Bien des résultats contradictoires concernant les conséquences métaboliques et pondérales du nombre de prises alimentaires relèvent d'un problème de définition. Qu'est-ce qu'un repas ? Qu'est ce que le grignotage ? Les termes anglo-saxons « snacking », « nibbling » ou « grazing » n'ont pas d'équivalent en français. Un article paru dans le « British Journal of Nutrition » (1997, 77 : suppl 1), montre que, selon les auteurs, un snack est distingué d'un repas, soit pour une question d'horaire, soit du fait d'un plus faible niveau énergétique, soit enfin en raison d'une composition différente.
En France, bon nombre d'auteurs se réfèrent à l'alternative faim/pas faim pour distinguer clairement le repas du grignotage. Didier Chapelot (Laboratoire de physiologie du comportement alimentaire Paris) rappelle les caractéristiques du profil métabolique précédant une prise alimentaire suscitée par la faim (le repas) : baisse de la glycémie et de l'insulinémie, associée à une augmentation des acides gras plasmatiques. Il souligne à ce propos que la prise alimentaire intervenant en dehors de ce contexte métabolique (c'est-à-dire sans faim) favorise le stockage de l'énergie consommée. Ce d'autant plus que la prise énergétique faite lors de grignotages n'est pas compensée par une réduction d'apport au repas suivant.
Le goûter associé à un meilleur contrôle pondéral
A l'inverse, comme le montre une étude épidémiologique française présentée par J.-L. Volatier (AFSSA), la consommation d'un goûter (4e repas) est associée à un indice de masse corporelle plus bas par comparaison à une population ne goûtant pas. La quantité d'énergie consommée au goûter est négativement corrélée avec l'IMC. Ce même travail (INCA) met en évidence que les goûteurs réguliers (4 repas au moins quatre fois par semaine) consomment proportionnellement plus de glucides et moins de lipides que le reste de la population.
Le bénéfice du goûter a été confirmé par un travail original conduit par D. Chapelot sur 24 volontaires (12 goûteurs et 12 non-goûteurs) à qui on demandait de changer leurs habitudes pendant quatre semaines. L'auteur a observé une prise de poids chez les goûteurs habituels à qui on avait supprimé le 4e repas. A l'inverse, les non-goûteurs habituels qui avaient eu une collation l'après-midi n'ont pas modifié leur poids pendant la durée de l'expérience. Ils avaient naturellement compensé cette prise alimentaire en réduisant leur consommation aux autres repas.
Pour sa part, Sandra Drummond (Queen Margaret University College, Edimbourg) souligne : « En dépit de quelques résultats contradictoires dus à la difficile distinction entre fractionnement des repas et grignotage, il semble que l'augmentation du nombre de repas fait disparaître des fringales susceptibles d'entraîner des consommations intempestives. Par ailleurs, le fractionnement favorise la consommation de glucides et diminue celle de lipides. » Ces observations conduisent l'auteur à conseiller le fractionnement des repas chez les personnes désirant contrôler leur poids. Elle précise néanmoins que les prises alimentaires doivent toujours être motivées par la faim et non la seule présence d'aliments appétents.
Le poids de l'habitude
Par ailleurs, les résultats d'une étude expérimentale néerlandaise, rapportés par EMR Kovacs (Maastricht Pays Bas), soulignent l'importance de l'habitude pour le contrôle de la prise énergétique. Ce travail original a, en effet, mis en évidence une meilleure prise en compte par l'organisme d'une surcharge lipidique, chez les sujets bénéficiant de leur nombre habituels de repas, comparés à ceux qui se voyaient imposer un nombre inhabituel de prises alimentaires. Plus la fréquence habituelle des repas était élevée, meilleure était la compensation par l'organisme. L'auteur en conclut que les réactions enzymatiques et hormonales qui interviennent dans le « traitement » digestif, absorptif et métabolique des aliments consommés. Le conditionnement est gage d'efficacité dans une situation donnée. En cas de changement, il faudra un temps d'apprentissage pour retrouver la meilleure efficacité dans le contexte d'une nouvelle fréquence.
En conclusion, ce travail souligne la différence fondamentale entre fractionnement (habituel) des repas, dont fait partie la coutume du goûter, et grignotage sans faim et non contrôlé, entraînant un excédent calorique en fin de journée et favorisant le surpoids.
Symposium organisé par le centre de recherche Lu dans le cadre du 17e Congrès international de nutrition, à Vienne.
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