LE QUOTIDIEN - L'UNAFORMEC finalise actuellement ses outils pour une « démarche assurance qualité » en FMC, en particulier un questionnaire d'audit de quatre pages et un document plus détaillé d'une centaine de pages (1). Ces travaux représentent-ils une forme d'aboutissement pour l'UNAFORMEC ?
Dr PHILIPPE BONET - Oui, car l'UNAFORMEC et les structures qui l'ont précédée ont mis toute leur énergie à répandre dans la profession médicale les techniques de formation pour adultes. C'était complètement novateur il y a une vingtaine d'années. Nous avons continué en ce sens à l'UNAFORMEC, avec toujours un regret de ma part : tout d'abord, trop peu d'associations, à mes yeux, appliquaient réellement toutes les stratégies de pédagogie modernes interactives adaptées aux adultes. Et, par ailleurs, rien ne les incitait à mettre ces stratégies en uvre. Une association de FMC locale qui applique ces stratégies, cela lui fait du travail en plus. Et rien ne venait récompenser, ni même authentifier ou légitimer cet effort. La logique de l'assurance qualité, ou démarche qualité en matière de FMC, vient enfin légitimer quelque part cet effort. On va donner dans les mois qui viennent aux associations qui le désirent une procédure permettant d'afficher la qualité qu'elles mettent en uvre.
Concrètement, envisagez-vous que les médecins affichent dans leur cabinet qu'ils ont suivi une FMC de qualité ?
Oui. Pour moi, l'intérêt de la démarche qualité en matière de FMC est double. Il y a un intérêt collectif pour les associations de FMC, de façon à être éventuellement accréditées pour différentes raisons : par exemple, pour la FPC [Formation professionnelle conventionnelle, indemnisée et réservée aux médecins généralistes puisque les spécialistes n'ont pas de convention] qui demande une sorte d'agrément des organismes de FMC locaux et nationaux.
Il y a aussi un intérêt, loin d'être négligeable, pour chaque médecin qui adhère à un groupe associatif respectant les canons de la qualité. Le médecin peut alors prouver (par la liste d'émargement prouvant sa présence à telle ou telle réunion, etc) qu'il a rempli d'éventuelles obligations, si un jour la loi arrive à les définir. En tout cas, il pourra donc dire à ses patients qu'il a suivi X heures de formation dans une association qui a adopté la démarche de qualité.
Cela me semble important, car depuis quelques mois, j'ai rencontré des usagers, entre autres des représentants du CISS [Collectif interassociatif sur la santé], dans le cadre des réunions organisées par « Réforme & Santé » [association fondée en décembre 2000 regroupant l'UNAFORMEC, divers syndicats médicaux et des associations d'usagers qui réfléchissent à une réforme du système de santé fondée sur l'amélioration du service rendu au patient, NDLR].
Les patients/usagers souhaitent une plus grande transparence du système de santé. Ils trouveraient fort légitime - et c'est l'un des chantiers mis en uvre par « Réforme & Santé » -que figurent dans la salle d'attente un certain nombre d'informations concernant le professionnel de santé qu'ils vont rencontrer. Ces informations pourraient, pourquoi pas, être aussi accessibles un jour sur internet, à travers un fichier de l'Ordre ou autre.
C'est une demande formelle des patients aujourd'hui et je la trouve légitime. Si la profession n'organise pas elle-même cette transparence, elle nous sera imposée plus ou moins de l'extérieur et cela ne correspondra probablement pas à nos désirs. Je ne dis pas qu'il faut l'organiser nous-mêmes pour mieux nous camoufler, mais pour faire preuve de transparence à l'égard des usagers de santé et le faire de façon cohérente, et non pas sous forme de scoop journalistique.
Union de pensée
Dans cet esprit, vous préparez un colloque, prévu en septembre, sur l'évaluation des pratiques professionnelles, en partenariat avec MG-Form (l'organisme de FMC de MG-France) et le Collège national des généralistes enseignants (CNGE). Menez-vous un travail en commun ?
Non, mais nous avons une union de pensée. Nous avons estimé utile de présenter ensemble, de façon officielle, aux responsables en matière de santé, nos outils respectifs d'évaluation des professionnels.
Le projet de loi de modernisation sanitaire, qui doit réformer la FMC, se fait attendre.
Je continue à déplorer que la législation précisant les obligations des médecins soit en jachère, puisque le plan Juppé n'a pas été appliqué. Le projet de loi censé pallier cette carence ne figure pas encore au calendrier parlementaire. Cela fait déjà un an qu'a priori , la plupart des structures ont donné leur accord pour la réforme de la FMC prévue par le projet de loi de modernisation sanitaire. Il y avait des aménagements souhaitables pour les praticiens hospitaliers, qui ont été acceptés, mais à part ça, rien n'a changé. Cette espèce de carence législative est inacceptable aujourd'hui. Je déplore qu'on ait mis le train en marche dans le désordre : le wagon de la FPC roule mais il manque la locomotive qui devrait définir globalement à quelles obligations un médecin en exercice doit se soumettre.
(1) Pour en savoir plus sur la démarche qualité en FMC, voir le dossier de 12 pages qui lui est consacré dans le dernier numéro (n°43) de la revue trimestrielle de FMC « TLM » . 125, Bd Diderot, 75012 Paris
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