En abordant sous un angle médical, social, psychanalytique et éducatif la délicate question de la sexualité des jeunes, le rapport co-signé par Brigitte Letombe, gynécologue, la psychanalyste Sophie Marinopoulos et le Pr Nisand, responsable du pôle de gynécologie obstétrique du CHU de Strasbourg, dénonce l’explosion des grossesses non désirées en particulier chez les jeunes. Les auteurs entendent s’attaquer à une exception française paradoxale : la pilule du lendemain et l’IVG restent encore aujourd’hui les seules solutions gratuites et anonymes. La contraception en dehors des centres de planning familial demeure payante et nécessite une autorisation parentale.
« La Hollande, les Pays-Bas et la Suisse ne connaissent pas ce problème, alors que chez nous le nombre d’IVG chez les moins de 25 ans a doublé en 20 ans », souligne le Pr Nisand. Toutes ces IVG ne sont pas évitables. Environ un tiers concernent des jeunes femmes qui ont par ailleurs une conduite à risque mais comment faire pour les autres ? « Nous devons venir en aide à ces jeunes qui souhaitent avoir des relations sexuelles sans que les parents ne soient au courant, alors que dans notre pays 4 femmes sur cinq habitent à plus de 100 km d’un centre de planning familial. » Le Pr Nisand affirme qu’aujourd’hui l’action doit reposer sur tous les médecins, y compris les généralistes, mais aussi les sages femmes, infirmiers et pharmaciens qui devraient être rémunérés pour intervenir dans les écoles pour parler d’éducation sexuelle aux enfants dès l’école primaire. Seuls des réseaux locaux pluridisciplinaires formés à l’orthogénie permettraient cette prévention à grande échelle voulue par Jeannette Bougrab qui déplore la non-application de la loi du 4 juillet 2001 et d’une circulaire du 17 février 2003 qui font pourtant de l’éducation à la sexualité une obligation légale tout au long de l’enseignement primaire et secondaire à raison d’au moins trois séances par an et par niveau. « En baissant les bras, nous livrons l’éducation sexuelle de nos enfants à la pornographie. La consommation addictive de films observée chez les garçons d’une dizaine d’années dégrade l’image qu’ils ont des femmes, ils vont mal et auront d’immenses difficultés à se construire », lance le Pr Nisand.
Un appel à Xavier Bertrand.
Au moment où les pilules qui sont sur le marché depuis plus de 40 ans viennent de bénéficier d’une baisse des prix, le Pr Nisand réclame haut et fort que les contraceptions les plus innovantes, les plus modernes et les meilleurs soient accessibles à toutes. Un forfait contraception qui permettrait aux jeunes de ne rien débourser jusqu’à 18 ans lui semblerait déjà un grand pas, même si les patchs et les anneaux mériteraient eux aussi un remboursement. « Xavier Bertrand ne veut rien entendre sur cette question pourtant, la prise en charge d’une pilule qui revient à 80 € par an me semble une bonne solution par rapport aux 60 000 IVG évitables avant 25 ans qui coûtent – ni plus ni moins – 30 millions d’euros à la société chaque année », conclut-il. Le professeur Anne Gompel, responsable de l’unité de gynécologie médicale et endocrinienne à l’Hôtel-Dieu à l’AP-HP, surenchérit : « L’industrie pharmaceutique doit aussi faire des efforts sur les prix, car il s’agit tout de même de molécules qui ne coûtent pas cher à produire. » La secrétaire d’État à la Jeunesse et la Vie associative prend la balle au bond et promet de tout faire pour convaincre.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature