P LUSIEURS études ont déjà incriminé le parvovirus B19 dans des morts in utero du deuxième trimestre, le plus souvent par anasarque foeto-placentaire. Au troisième trimestre, le virus est aussi responsable d'arrêt de grossesse mais de causes autres que l'anasarque. Ce sont précisément les morts in utero de cause indéterminée auxquelles se sont intéressés des virologues suédois, afin de déterminer la prévalence de cette infection virale. On comprend, en effet, que la fréquence de l'infection puisse être est un élément déterminant en matière de dépistage, voire de stratégie préventive durant la grossesse
L'équipe de Stockholm a donc recherché par PCR, immunohistochimie et examen anatomopathologique, la présence du virus B19 dans le placenta et les tissus de 113 foetus morts in utero (après la 22e semaine de grossesse), issus d'une fausse couche spontanée (avant la 22e semaine) ou d'une interruption médicale de grossesse. Pour connaître la fréquence du portage asymptomatique du virus, les chercheurs ont également examiné les tissus placentaires de 53 grossesses menées à terme.
L'étude a inclus les tissus de 47 foetus morts in utero à un âge gestationnel compris entre 32 et 34 semaines, de 37 fausses couches spontanées de causes inconnues, entre la 12e et la 21e semaine et de 29 cas d'avortements induits pour malformation foetale ou retard de croissance intra-utérine, entre la 12e et la 22e semaine.
Un seul cas d'anasarque foeto-placentaire
Un nombre important de foetus morts in utero étaient porteurs de l'ADN viral (15 %) contre 5 % dans les tissus de fausses couches spontanées, 0 % dans ceux des avortements induits et 0 % dans les placentas d'enfant nés à terme en bonne santé. Trois des neufs cas porteurs de l'ADN viral avaient des preuves histo-immunochimiques de l'infection (inclusions et protéines virales). Les mères de ces trois foetus morts au deuxième trimestre étaient porteuses d'IgM et d'IgG spécifiques au moment de la naissance.
Un seul avait un anasarque foeto-placentaire. Chez les autres foetus décédés aux deuxième et troisième trimestres de gestation porteurs de l'ADN viral, l'infection était moins évidente (pas de preuve d'infection aiguë chez les mères et absence de signe histologique). Pour certaines femmes ayant arrêté leur grossesse au troisième trimestre, une séroconversion à IgG est apparue de manière retardée, de deux à six mois plus tard. La sérologie maternelle n'est donc pas un bon test diagnostique, d'autant que la réponse IgM dure de deux à quatre mois et qu'une infection persistante peut déjà être en cause dans la transmission au stade précoce de la grossesse. L'absence de preuve histologique ou immunologique lors d'une infection chronique persistante du foetus donne toute sa valeur à la recherche en PCR. Bien qu'un lien direct entre l'infection et la mort foetale ne puisse pas être clairement établi en cas de PCR positive par absence de conséquences pathogènes visibles, on sait que le parvovirus a un tropisme pour de nombreux tissus foetaux en dehors des précurseurs hématopoïétiques, comme le foie, le cur et l'endothélium. Autant de causes possibles de mort in utero.
Le parvovirus B19, dont la séroprévalence chez l'adulte atteint de 50 à 70 %, provoque une infection lytique des précurseurs érythropoïétiques à l'origine d'un arrêt transitoire de l'érythropoïèse. Il provoque chez l'enfant un érythème infectieux (5e maladie) avec fièvre et rash cutané et des tableaux plus diffus chez l'adulte avec fièvre et malaise général parfois suivi d'arthralgies de longue durée. L'anémie, secondaire à l'inhibition de l'érythropoïèse, peut avoir des conséquences fatales chez l'immunodéprimé et les personnes porteuses de troubles hémolytiques. Chez la femme enceinte, le virus peut se transmettre verticalement au foetus dans 30 % des cas. Au total, on estime que de 4 à 16 % des fausses couches et des morts in utero sont liées à cette infection avec un pic de fréquence durant le second trimestre.
Thomas Tolfvenstam et coll., « The Lancet », vol. 357, 12 mai 2001.
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