P OUR Elisabeth Guigou, la mise à contribution (confirmée) de la Sécurité sociale pour financer les allégements de charges liés aux 35 heures relève de la plus pure logique.
La croissance et les créations d'emploi (favorisées par la réduction du temps de travail) sont aujourd'hui « la meilleure garantie des recettes de la Sécurité sociale », a expliqué la ministre de l'Emploi et de la Solidarité à l'issue de la réunion de la commission des Comptes de la Sécurité sociale. Puisque la Sécu bénéficie de retours financiers importants (la manne des cotisations supplémentaires), elle doit « naturellement » contribuer au financement des 35 heures. Et la boucle est bouclée.
Reste que le manque à gagner pour la Sécurité sociale est considérable : en 2000, la facture des 35 heures, pour elle, s'élève à 13,2 milliards et, pour 2001, l'addition nette devrait encore atteindre, selon les prévisions, quelque 3,3 milliards de francs, dont trois à la charge du seul régime général.
Les organisations patronales ont eu les réactions les plus virulentes, condamnant « des tuyauteries opaques ». Le président du Medef a dénoncé « un détournement inacceptable » des ressources de la Sécu et s'est interrogé sur « l'utilité » du rôle du patronat dans les organismes sociaux dans ces conditions. La CGPME, quant à elle, a carrément menacé de remettre en cause sa participation dans les instances du régime général. La CFDT, qui préside la CNAM, a également protesté « avec force » contre la volonté du gouvernement d'utiliser 13 milliards pris sur le budget de la Sécurité sociale (pour financer les exonérations de charges patronales en 2000). A droite, Alain Madelin, président de Démocratie libérale (DL) a qualifié cette ponction de « hold-up » et Charles Descours (RPR) a évoqué « une bombe à retardement au cur même de la Sécurité Sociale ». Quant à Bernard Accoyer (RPR), il a estimé que « ces manipulations comptables sont injustes envers les cotisants et insultantes envers les partenaires sociaux ».
Anticipant le tollé, Elisabeth Guigou avait pourtant tenté de calmer le jeu. Elle a annoncé la mise en place effective du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de Sécurité sociale (FOREC), qui n'était pour l'instant que virtuel, et elle a surtout promis « de nouvelles règles de compensation » par l'Etat, qui feront l'objet d'une « concertation » avec les partenaires sociaux notamment.
Reste que, désormais, c'est bel et bien une logique de compensation partielle des allégements de charges par l'Etat aux régimes de Sécurité sociale qui prévaut (et non plus une compensation intégrale, comme le stipulait la loi de 1994). La Sécu devra donc payer, un peu ou beaucoup. Elisabeth Guigou a simplement assuré que cette contribution serait, en tout état de cause, plafonnée, pour éviter que la note des 35 heures n'entraîne, à elle seule, les comptes dans le rouge.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature