Transmise par la tique Ornithodoros sp. , la fièvre à Borrelia duttonii est fréquente en Tanzanie centrale ; elle peut être grave, notamment chez les femmes enceintes et les enfants.
Dans les villages où cette affection est endémique, le taux d'infestation des habitations par le vecteur Ornithodoros sp. est très élevé (jusqu'à 88 %) et le taux d'infection de ces tiques par Borrelia sp. dépasse 60 %. En 2001, on a découvert que ces tiques pouvaient être infectées non pas uniquement par Borrelia duttonii mais aussi par des espèces inconnues de Borrelia (que l'on a appelé Borrelia type C). Il était important de savoir si ces spirochètes inconnues pouvaient aussi infecter la population humaine. Voilà qui est fait, grâce à un nouveau travail signé William Kisinza et coll., et publié dans « The Lancet ».
Examen sur lame et PCR
Ce travail a été conduit dans le village de Muungano, situé à 12 km au nord-est de l'hôpital de Mvumi, lui-même situé à 40 km au sud-est de Dodoma. La nouvelle étude a consisté à prélever des échantillons de sang à deux groupes d'enfants de Muungano entre octobre et novembre 2002 : d'une part, chez 54 enfants de moins de 5 ans, présentant une fièvre associée à des vomissements, à une sensation de froid, à des douleurs articulaires ou rachidiennes ou à des maux de tête ; d'autre part, chez 307 enfants asymptomatiques.
Ces prélèvements ont fait l'objet, d'une part, d'un examen sur lame au microscope, d'autre part, d'un examen par PCR (Polymerase Chain Reaction).
Sur les 54 enfants malades, on a trouvé 3 (6 %) infections à Borrelia sp. à l'examen au microscope et 6 (11 %) à la PCR. Parmi les 307 enfants asymptomatiques, on a détecté 7 (2 %) infections au microscope et 13 (4 %) à la PCR. Au total, 19 infections ont été détectées par PCR. Le génotypage a été réalisé avec succès dans 17 cas sur 19 : (6 chez des enfants malades et 11 chez des enfants asymptomatiques) :
- le génotypage chez les 6 enfants malades a montré : 5 B. duttonii (dont 4 de type Ly et 1 de type 2(B) et 1 de type 3 (inconnu) ;
- chez les 11 enfants asymptomatiques, il a montré : 6 B. duttonii type Ly, 4 de type 3 (inconnu), 1 de type 5 (inconnu) et 2 non identifiés.
Sur le plan phylogénétique, cette nouvelle espèce inconnue, non encore dénommée, diffère de B. duttonii et d'autres espèces africaines, à savoir B. recurrentis et B. crocidurae. Elle est plutôt proche de B. anserina, B. parkeri, B. turicatae et de B. hermsii.
Les types 3 et 5 correspondaient à Borrelia de type C, inconnue, détecté en 2001 chez les tiques.
La recherche d'un vaccin se complique
« La découverte d'une nouvelle Borrelia sp. chez des humains et chez les tiques, dans un endroit où la fièvre transmise par les tiques est endémique, suggère que les organismes provoquant de telles fièvres en Tanzanie sont plus complexes qu'on ne le croyait », estiment les auteurs.
« Avec B. crocidurae en Afrique de l'Ouest, il y a clairement au moins trois Borrelia sp. provoquant une fièvre transmise par les tiques en Afrique, ce qui rend compliqué le projet de développer des vaccins. Toutefois, en Afrique de l'Est tout du moins, le fait que les tiques endophiles transmettent les deux espèces de pathogènes indique que la prévention par le contrôle vectoriel est une méthode viable », concluent les auteurs.
« The Lancet » du 18 octobre 2003, pp. 1283-1284.
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