« Au vu des résultats de notre étude et des données antérieures, rien ne justifie l'administration de lidocaïne chez les patients en arrêt cardiaque dû à une fibrillation ventriculaire (FV) et résistant au choc électrique. Dans cette indication, l'amiodarone est l'antiarythmique de choix. » Cette conclusion de Paul Dorian et coll. va à l'encontre de la plupart des protocoles utilisés dans ces situations, où, selon les recommandations internationales, un antiaryhtmique est indiqué (FV résistant à 3 chocs électriques ou plus).
Jusqu'ici la lidocaïne constituait le traitement de choix, sans qu'aucune étude contrôlée n'ait démontré son efficacité. Cependant, un certain nombre de données avaient déjà contribué à remettre en cause son utilisation systématique.
Un essai sur 20 patients avait montré une efficacité plus grande de l'amiodarone. Une étude rétrospective sur des arrêts cardiaques survenus à l'hôpital avait révélé un nombre de décès plus élevé chez les patients ayant reçu de la lidocaïne que chez ceux qui n'en avaient pas reçu.
La première et seule étude contrôlée qui a évalué l'efficacité d'un antiarythmique (amiodarone versus placebo) dans la prise en charge de patients en arrêt cardiaque par FV ou tachycardie ventriculaire était l'étude Arrest (amiodarone in out-of-hospital resuscitation of refractory sustained ventricular tachycardia) de 1999 : 44 % de survie à l'admission chez les patients traités contre 34 % avec le placebo.
Une amélioration de 90 %
Le travail de Dorian et coll. est donc la première étude contrôlée d'une telle ampleur comparant la lidocaïne et l'amiodarone. Elle a inclus entre novembre 1995 et août 2001, 347 patients pris en charge pour un arrêt cardiaque, par les équipes de secours mobiles de la région de Toronto.
Ils avaient eu : soit une FV résistant à 3 chocs électriques, à l'injection I.V. d'adrénaline et à un quatrième choc ; soit une récidive de FV et une première défibrillation réussie.
Les kits de réanimation (pour I.V.) contenaient soit de l'amiodarone et un placebo, soit de la lidocaïne et un placebo : 180 patients ont reçu de l'amiodarone (5 mg/kg) et 167 patients de la lidocaïne (1,5 mg/kg).
Le critère principal retenu était le taux de survie à l'arrivée dans une unité de soins intensifs (USI).
Les résultats sont nettement en faveur de l'amiodarone : 41 patients traités par amiodarone ont été admis en USI (soit un taux de survie de 22,8 %), contre 20 traités par lidocaïne (soit une survie de 12 %). L'amélioration relative est donc de 90 %.
Les autres facteurs prédictifs de la survie ont été : un délai plus court d'administration du traitement et le retour spontané et transitoire à un rythme sinusal avant traitement. Mais, pour un même délai, les résultats sont meilleurs pour l'amiodarone que pour la lidocaïne.
Aucune différence n'a été observée entre les deux groupes concernant les effets secondaires (bradycardie traité par atropine ou troubles tensionnels traités par dopamine). Cependant, la proportion de patients en insuffisance cardiaque globale a été plus élevée sous lidocaïne (28,9 % contre 18,4 %).
« L'étude n'a pas été conçue pour évaluer le taux de survie à la sortie de l'hôpital, mais ses résultats sont en accord avec ceux de l'étude Arrest et suggèrent fortement que l'amiodarone est plus efficace dans les premiers stades de la réanimation. »
Seule l'utilisation de l'amiodarone en préhospitalier peut être une limite car elle est peu facile d'emploi et d'un coût élevé.
« New England of Medicine », 21 mars 2002, vol. 346, n° 12, pp. 884-890.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature