Lorsque l'on pense feria et urgences, on pense toros et blessures par coups de corne. « Cette idée doit être balayée, la grande majorité des patients reçus aux urgences - ils ont été près de 800 en cinq jours en 2001 - relèvent de pathologies traumatiques, d'agressions ou d'alcoolisation excessive », explique d'emblée le Pr Jean-Emmanuel de la Coussaye, anesthésiste-réanimateur au CHU de Nîmes et chef de service de réanimation, des urgences et du SAMU.
Tous les services médicaux de la ville travaillent de façon concertée sous la houlette de la préfecture afin de mettre en place, d'une année sur l'autre, un dispositif particulier pour répondre aux besoins de la population locale mais aussi à ceux des milliers de personnes qui envahissent la ville chaque soir pour profiter des bodegas et, plus globalement, de l'ambiance.
Quatre postes avancés
Les déplacements posent un problème crucial dans une ville de taille moyenne encombrée par les véhicules et les piétons ; c'est pourquoi quatre postes de secours avancés (PSA) ont été mis en place aux abords du cur de la ville. « Ces structures mixtes tenues par les pompiers, la Croix-Rouge et des urgentistes de l'hôpital permettent d'effectuer un tri rapide des patients et de pratiquer sur place des petits gestes (généralement des points de suture). Les patients les plus alcoolisés peuvent aussi être pris en charge car, dans chacun de ces postes, des brancards - posés à même le sol pour éviter les chutes - leur sont réservés », explique le Dr Eric Vernhes, médecin de la Croix-Rouge. En 2000, 110 personnes sont passées par ces structures et des soins ont pu être effectués sur place pour la grande majorité d'entre eux (seules 24 personnes ont été évacuées sur l'hôpital).
« Ce dispositif nous permet de limiter le nombre d'entrées aux urgences, mais il n'en reste pas moins que près de 200 personnes sont accueillies quotidiennement pendant les trois jours les plus fréquentés par les visiteurs (vendredi, samedi et dimanche) », indique le Pr de la Coussaye. L'ensemble des personnels médicaux de garde (internes, urgentistes, réanimateurs, anesthésistes, médecins du SAMU) est doublé durant les cinq jours, ce qui représente 45 gardes médicales supplémentaires budgétisées par la direction de l'hôpital.
Les pathologies les plus représentées sont la traumatologie sous toutes ses formes (plaies, agressions, accidents de la voie publique), les comas éthyliques (de 14 à 20 par jour) et les décompensations psychiatriques ou agitations. La majorité de ces personnes viennent à l'hôpital par leurs propres moyens, néanmoins des véhicules de la Croix-Rouge (antennes sanitaires mobiles, ASM), des pompiers (véhicules de secours pour les asphyxiés et les blessés, VSAB) et des camions du SAMU sont présents aux abords de chaque poste sanitaire avancé. « En 2000, par exemple, les 150 volontaires de la Croix-Rouge ont effectué plus de 200 sorties (dont 20 fausses alertes). Ils se sont aussi chargés de l'assistance aux spectateurs des manifestations taurines (bandidos, encieros, abrivados, toros-piscine et corridas) », explique Michel Berthaud, directeur départemental des urgences et du secourisme pour la Croix-Rouge.
Dans l'arène
Si le nombre d'incidents recensés parmi les 3 000 à 5 000 spectateurs des arènes reste très faible, ceux mettant en cause des artistes taurins sont nettement plus élevés. L'Association gardoise de chirurgie taurine est chargée de la médicalisation des corridas des arènes de Nîmes. « Pour chacune des neuf manifestations prévues, 10 médecins ou paramédicaux sont présents dans le redondel (contre-piste) : 2 chirurgiens, 2 anesthésistes, un urgentiste, un généraliste, une infirmière urgentiste, un infirmière de bloc opératoire, un pharmacien et un aide soignant », explique le Pr Francis Navarro, chirurgien digestif à l'hôpital Saint-Eloi (Montpellier). Si le nombre des intervenants, tous bénévoles, peut paraître élevé, c'est parce qu'ils constituent deux équipes distinctes qui doivent être à même de prendre en charge tous les traumatismes survenant en course. « Les gestes chirurgicaux d'urgence peuvent être effectués au sein de l'infirmerie des arènes qui est transformée pour l'occasion en véritable bloc opératoire », analyse le Pr Navarro. C'est ainsi que les médecins ont déjà procédé à des soins d'hémostase immédiats avant de transférer le patient sur l'hôpital de la ville. Parmi les accidents les plus fréquemment recensés, on peut retenir les traumatismes - la semaine dernière au cours de la feria d'Alès, un torero a présenté un traumatisme grave du rachis - et les plaies vasculaires de la cuisse, du triangle de Scarpa et de l'abdomen.
Nîmes connaît chaque année deux autres ferias : l'une en février et l'autre en septembre. Mais, comme le souligne le Pr de la Coussaye, « ces deux événements sont plus tauromachiques que festifs et ne nécessitent pas la mise en place d'une service médicalisé spécifique, en dehors de celui assuré aux arènes ».
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