LE 17 AVRIL 2007 aura lieu pour la cinquième année consécutive la Journée mondiale de l'hémophilie. Relayé et organisé en France par l'Association des hémophiles (AFH), l'événement a pour objectif de sensibiliser le grand public et les acteurs de la société civile à cette maladie grave d'origine génétique qui touche un nouveau-né sur dix mille. Si les traitements ont connu d'importants progrès depuis plus de dix ans, offrant aux personnes hémophiles une vie proche de la normale, des difficultés importantes demeurent, notamment en milieu scolaire. C'est pourquoi l'AFH place la 5e Journée mondiale sous le signe de l'intégration de l'enfant hémophile à l'école.
Six mille infirmières scolaires, 3 000 jeunes hémophiles.
Pour l'AFH, les 6 000 infirmières scolaires apparaissent comme «les acteurs de santé de proximité les mieux à même de diffuser l'information sur l'hémophilie et de prévenir l'isolement, voire la marginalisation» des écoliers. Elle met à leur disposition, grâce au service médical infirmier et social des rectorats, une brochure présentant l'hémophilie et donnant diverses recommandations, en particulier en cas de survenue d'accidents hémorragiques. Sur les 6 000 hémophiles que compte le pays, la moitié sont des enfants et des adolescents ayant une hémophilie sévère ou modérée A (80 %) ou B.
Le passeport pour une intégration scolaire réussie tient en trois lettres : PAI, plan d'aide individualisé. Coordonné par le médecin scolaire, il contient tout ce qu'il convient d'entreprendre (régime alimentaire, par exemple) ou d'éviter : pas de médicament – aspirine tout spécialement –, pas d'alcool sur les plaies, ni de vaccin sans l'avis du médecin spécialiste, rapporte Jean-François Duport, président du comité AFH de la région Centre. Le PAI, qui s'appuie sur l'infirmière, le directeur d'établissement et le corps enseignant, rappelle que la cour de récréation n'est pas un lieu interdit. En revanche, les activités physiques doivent être autorisées par le Centre de traitement de l'hémophilie (CTH) de l'enfant.
Les CTH, présents dans chaque région, assurent une prise en charge globale de la pathologie. En règle générale, les feux verts pour les sports sont donnés au cas par cas, en fonction des risques possibles de traumatisme et de chute, du capital ostéo-articulaire (hémarthroses) de l'élève, dont la préservation sera garantie par une prophylaxie appropriée*, et des goûts de l'intéressé.
Contrairement à la natation, les sports de combat, collectifs et de contact, à l'instar du foot, de même que le ski, sont bannis. L'idéal serait de programmer les séances d'éducation physique le matin, sachant que l'injection de facteurs VIII ou IX, tous les deux ou trois jours, se fait à ce moment de la journée, «de façon que l'hémophile soit le plus protégé».
Le PAI chasse les idées fausses telles que «si l'enfant tombe, ou se coupe, il ne se vide pas de son sang». En revanche, explique Anne Fribault, infirmière au CTH de Tours, «il importe de mesurer l'ampleur de la coupure ou du choc subi, afin de recourir ou non au facteur de coagulation manquant». A ce stade, il est recommandé d'alerter par téléphone les parents et le CTH.
L'école, garant de l'autonomie du jeune hémophile.
En définitive, le plan d'aide individualisé (PAI) participe à la reconnaissance du handicap de l'enfant, tout en évitant de mettre en avant cette différence avec les autres élèves. C'est à ce prix que l'intégration scolaire devient le garant de l'autonomie du jeune hémophile, affirme Jean-François Duport.
Pour Michèle Ibanez, infirmière coordinatrice au CTH de Montpellier, tout doit démarrer dès la maternelle. «Là, la partition se joue avec plusieurs partenaires, explique-t-elle : les parents, le responsable de l'école, l'institutrice, l'aide maternelle , l'infirmière du CTH et l'infirmière scolaire», qui n'occupe jamais son poste à temps complet. C'est à la demande que Michèle Ibanez va sur le terrain pour «dédramatiser l'hémophilie» et conseiller un PAI.
Au collège, ou au lycée, les démarches sont différentes. Le collégien ou le lycéen a appris depuis longtemps déjà à se faire lui-même ses injections et à gérer son hémophilie. Au lycée Victor-Laloux, de Tours (Indre-et-Loire), Josette Tougui, infirmière à temps plein, se rappelle avoir «accompagné, réconforté, mis en confiance Jacques, un adolescent de seconde en prothèse dentaire. Je l'ai épaulé à un moment où il s'interrogeait sur la nécessité de se faire une injection après une coupure superficielle (...) Mais, en fait, si j'ai accompli un bout de chemin à ses côtés, c'est plus par rapport à son naturel renfermé qu'en raison de l'hémophilie».
Pour autant, Josette Tougoui n'a pas fait l'économie, avant même la rentrée des classes, d'une rencontre avec la mère de Jacques et a informé le professeur principal et le professeur de sports de l'état de l'adolescent.
La page du XXe siècle est bien tournée : fini le temps où les médecins croyaient que les vaisseaux sanguins des hémophiles étaient trop fragiles, aux oubliettes le scandale du sang noir qui avait contribué à troubler l'image de l'hémophilie en l'associant à des pathologies transmissibles par voie sanguine. Après le renouvellement prochain de l'Assemblée nationale, l'AFH** déposera au Parlement des enfants un manifeste intitulé « Vivre à cent pour sang » qui réclamera une intégration scolaire sans tache.
* Les traitements antihémophiliques sont dispensés, selon le principe de la rétrocession, par les pharmacies hospitalières.
** www.hemophilie2007.org.
Dans le monde
400 000 personnes seraient atteintes d'hémophilie : une sur cinq seulement est diagnostiquée et bénéficie de traitements.
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