La majorité des troubles auditifs surviennent avec l’âge, la première étiologie est la presbyacousie. 5,4 millions de personnes en France souffrent d’une surdité moyenne à profonde, dont 3,5 millions âgées de plus de 60 ans. Au-delà de 50 ans, une personne sur cinq présente une atteinte au moins légère et une personne sur dix plus importante (moyenne à totale). Ces chiffres augmentent avec l’âge pour atteindre plus d’une personne sur deux après 80 ans (Enquête Handicap-Santé par l’INSEE et la DRESS, 2008).
La surdité affecte la qualité de vie. Le handicap est d’abord social, avec des difficultés pour suivre une conversation dans un environnement bruyant et le retentissement sur la communication est source d’isolement. La perte auditive est également associée à une accélération du déclin cognitif ; une perte de 25 dB équivaut à une réduction de performance cognitive de 7 ans ! En dehors de l’isolement social et du déclin cognitif la perte auditive est également associée à d’autres symptômes. La moitié des personnes atteintes de surdité rapportent une autre limitation fonctionnelle motrice, psychique, intellectuelle, cognitive ou visuelle.
En dehors de tous ces retentissements, la surdité est responsable d’un coût non négligeable, celui de la compensation du handicap auditif, ce coût augmente d’autant que la surdité est sévère et responsable d’une perte d’autonomie.
Un champ de mesures possibles
À ce jour, il n’y a pas de campagne de dépistage systématique généralisée et c’est la gêne auditive du patient qui motive une consultation et permet de découvrir une surdité. Mais l’évolution étant lentement progressive, de nombreux patients s’habituent et ne consultent qu’à un stade plus avancé. Des moyens de dépistage existent. Un simple questionnaire réalisé en cabinet chez le médecin peut être utilisé dès 55 ans. Il s’agit de questions telles que : Avez-vous des difficultés pour entendre ? Pour suivre une conversation dans le bruit ? Utilisez-vous une aide auditive ?
D’autres mesures sont également possibles tels que des tests clinique en dépistage (voix chuchotée, tic-tac de montre), pouvant être combinés à un test d’audiométrie tonale portable. Des tests auditifs plus spécialisés comme l’audiométrie tonale et vocale permettent d’objectiver et de caractériser la surdité quantitativement en dB et qualitativement (surdité de transmission, surdité de perception ou mixte) ainsi que d’évaluer l’intelligibilité (capacité de compréhension de mots). Les Potentiels Évoqués Auditifs (PEA) permettant l’exploration de toutes les voies auditives sont souvent demandés devant une asymétrie auditive (c’est-à-dire une différence d’audition entre les deux côtés).
La découverte d’une surdité impose un bilan diagnostic réalisé par le médecin ORL qui comprend au minimum un examen otoscopique, audiométrique et une impédancémétrie. Dans les situations atypiques ce bilan doit être complété selon les cas par une imagerie (TDM, IRM) et des explorations fonctionnelles audio vestibulaire (PEA, VNG). La première cause de surdité du sujet âgé reste la presbyacousie ; atteinte neurosensorielle bilatérale symétrique liée à l’âge, prédominant sur les fréquences aiguës. D’autres étiologies sont possibles telles que des atteintes génétiques, l’otospongiose, l’otite chronique, Une attention particulière sera portée aux surdités asymétriques pour lesquelles on recherchera une pathologie rétro cochléaire, type neurinome de l’acoustique à l’aide d’une IRM. D’autres symptômes tels que vertiges et acouphènes doivent être recherchés, leurs présences orientant parfois vers d’autres atteintes otologiques.
Seules 20 % des personnes ayant des limitations fonctionnelles auditives moyennes à totales sont équipées d’un appareillage auditif. Le dépistage systématique de la surdité permettrait une prise en charge plus précoce par appareillage de la population concernée. Après identification des patients présentant des atteintes auditives débutantes et bilan réalisé par le médecin ORL celui-ci oriente vers une réhabilitation audio-prothétique la plus précoce possible et l’instauration d’un suivi. La prise en charge d’une surdité comprend le traitement étiologique chaque fois que possible, et le traitement symptomatique par compensation de la perte auditive. Il s’agit le plus souvent d’un appareillage bilatéral par prothèse auditive externe, associé dans les cas les plus sévères à une rééducation orthophonique. Le choix du type de prothèse se fera selon les besoins d’amplification, les critères anatomiques et le choix du patient. Dans les situations moins fréquentes de surdité totale, le traitement chirurgical par Implant Cochléaire peut être discuté.
L’efficacité de l’aide auditive sur les effets cognitifs, psychologiques, sociaux et émotionnels de la surdité n’est plus à démontrer ! Après une période de réglage, les bénéfices de l’appareillage sont évalués par questionnaire de satisfaction sur le dispositif et il existe une forte corrélation entre le temps d’utilisation de l’appareil et le bénéfice de celui-ci.
Les personnes appareillées précocement s’adaptent plus facilement et obtiennent un meilleur bénéfice de l’aide auditive que celles appareillées plus tardivement, à âge et déficit identiques, ce qui renforce l’idée d’un bénéfice du dépistage permettant une prise en charge précoce. La Fondation Jacques Chirac, lors de son 5e colloque le 5 février 2015 : « Loi Handicap : quel bilan ? quel futur ? » fera une proposition dans ce sens.
* Professeur d’ORL, CHU de Toulouse, et Interne des Hôpitaux de Toulouse
** Inscriptions sur www.fondationjacqueschirac.fr
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