« Music-Hall », de Jean-Luc Lagarce

Fanny Ardant, une belle fille comme elle

Publié le 13/01/2009

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L’ESPACE VIDE des Bouffes du Nord. Il est jonché de vieux papiers, bouteilles de plastique, canettes. On apprendra vers la fin que ces détritus sont l’hommage cruel du public aux artistes qui vont surgir dans leurs manteaux dignes de Beckett.

Trois personnages dans leurs trench-coat et feutres enfoncés sur le crâne. Deux boys et « la fille ». Deux boys fins, minces, comme les garçons de revue. Filiformes. Éric Guérin, Francis Leplay. Ils ont l’échine souple, ils prennent des coups. Mais ils partent. Et « la fille » en est à son 13e et 14e partenaire…

Dans des costumes de Virginie Gervaise et les lumières de Françoise Michel, Lambert Wilson met en scène «Music-Hall», pièce souvent montée de Jean-Luc Lagarce parce qu’elle parle aux acteurs de leur métier. Douloureusement, avec cocasserie, tragiquement,

Splendide dans sa robe de star d’un vert pâle, étole de fourrure aux épaules, fausse blonde dont on voit les racines, drôle, grande, dominante, la fille. Celle du bordel ou de la rue, la fille perdue, la drôle de fille. Jamais une femme, jamais une star, une étoile, une grande vedette de music-hall… Mais ici, c’est Fanny Ardant qui joue. Elle est le contraire. Elle est dans la lumière, elle est splendide. Sacré geste que d’aller jouer le désespoir des planches quand on est sa gloire. Mais elle est une actrice racée, audacieuse, elle sait être désarmante et drôle et tragique sans jamais sombrer dans le pathétique.

Lambert Wilson qui aime et comprend ce personnage et ses deux boys, qui aime surtout, soulignons-le, et la met en valeur, la langue superbe et rétive de Lagarce, signe un spectacle sobre, probe, bouleversant. On rit, on pleure.

Théâtre des Bouffes du Nord, à 20 h 30 du mardi au samedi, en matinée le samedi à 15 h 30. Jusqu’au 14 février (01.46.07.34.50). Durée : 1 h 25 sans entracte. Texte publié aux Solitaires Intempestifs.

A. H.