La pilule risque d’être dure à avaler pour de nombreuses femmes ! Mercredi dernier, la Ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, a annoncé le prochain déremboursement dans un an des pilules contraceptives de 3e génération. Et déjà certaines voies s’inquiètent d’un éventuel impact négatif sur l’accès à la contraception et s’interrogent sur le bien fondé de la décision.
Risque thromboembolique accru
La prise de position du ministère se fonde en fait sur l’avis de la commission de transparence de la HAS rendu le même jour, qui a estimé insuffisant le service médical rendu (SMR) de ces pilules. Arguant notamment d’un risque thromboembolique, certes faible (3 à 4 cas pour 10 000 utilisatrices), mais plus élevé que sous pilules de 2e génération. Déjà en 2007, la HAS avait relevé pour ces pilules « un risque thromboembolique veineux relatif » et ne leur avait accordé un SMR favorable qu’en seconde en intention. « Malheureusement, nous n’avons absolument pas été suivi regrette le Pr Gilles Bouvenot, président de la commission de la Transparence, et la consommation a augmenté d’années en années alors que dans le même temps le surrisque thromboembolique se précisait ». À tel point que fin 2011, « nous avions assez d’arguments pour affirmer l’existence d’un risque au moins multiplié par 2 ». Avec notamment une publication du BMJ d’Octobre 2011 allant dans ce sens.
Parallèlement, les données en vie réelle ont sérieusement écorné le dogme de la meilleure tolérance de ces pilules, les nouveaux progestatifs utilisés (désogestrel, gestodène ou norgestimate) ne semblant finalement pas moins pourvoyeurs d’effets indésirables ( acné, prise de poids, etc..) que leurs aînés.
Avantage à la seconde génération
Au total, « les pilules de 3e génération ne sont donc pas mieux tolérées , pour un surrisque thromboembolique accru » résume le Pr Bouvenot. D’où la décision de déremboursement prise par la ministre, quelques heures seulement après la délibération de la HAS.
« Un signal fort pour les femmes et les prescripteurs » souligne le Pr Bouvenot, puisqu’il sous-tend qu’il est désormais « préférable d’utiliser des pilules de seconde génération ». «Les pilules de 3e génération ne sont pas très dangereuses, mais plus dangereuses que les autres, ce qui nous a conduit à donner cet avis » précise-t-il. Et de souligner que la HAS voulait «faire courir aux femmes le moins de risques possibles», d’autant plus qu’il s’agit « de femmes jeunes et en bonne santé».
Pour autant « pas d’inquiétude excessive » insiste le Pr Bouvenot pour qui il n’y a pas lieu d’arrêter brutalement ces pilules. Le ministère va dans le même sens puisque le déremboursement ne sera effectif qu’à compter du 30 septembre 2013. D’ici là, « une période d’adaptation sera laissée aux femmes utilisant ces pilules, afin qu’elles puissent, avec leurs médecins, et au moment du renouvellement de leur prescription, choisir un autre mode de contraception, remboursé si elles le souhaitent, » explique le ministère de la Santé.
Ruptures contraceptives ?
Malgré cet échéancier, certains craignent déjà un impact négatif sur l’accès à la contraception. En France, entre 1,5 et 2 millions de femmes utilisent aujourd'hui une des 50 pilules de 3e génération actuellement sur le marché. « Que va-t-il se passer pour ces femmes ? » s’interroge la secrétaire générale du Planning familial, Marie-Pierre Martinet sollicitée par l’AFP. Et de pointer les risques potentiels de «ruptures contraceptives», soit par peur sanitaire, soit pour raison financière. « Ce risque est putatif, répond le Pr Bouvenot, alors que celui de thrombose est bien réel ».
Déremboursées mais toujours autorisées
Par ailleurs, «s'il y a un problème sanitaire, c'est normal qu'on dérembourse mais pourquoi les laisse-t-on sur le marché?» poursuit Marie-Pierre Martinet. De fait, pour le moment, ces pilules gardent leur autorisation de mise sur le marché et peuvent donc continuer à être prescrites. Fin 2011, l’ANSM – en charge des AMM – avait d’ailleurs jugé que « le rapport bénéfice-risque des contraceptifs oraux restait positif quelle que soit leur composition »….
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature