PRATIQUE
La fonction d'équilibration met en jeu des capteurs périphériques (vestibulaires, visuels et proprioceptifs), des centres d'intégration au niveau du système nerveux central (noyaux vestibulaires du tronc cérébral, cervelet, cortex...), des voies effectrices motrices (stabilisation du corps grâce en particulier aux voies vestibulo-spinales) et oculomotrices (stabilisation du regard). Ces différents éléments vont être touchés par le vieillissement. Il existe une diminution des différentes populations cellulaires : cellules neurosensorielles vestibulaires, neurones ; avec augmentation des seuils de sensibilité de ces cellules et altération des synapses. Les principales modifications visuelles sont : une diminution de l'acuité, une altération de l'adaptation à l'obscurité et de la perception des formes et contrastes, ainsi que certaines pathologies liées à l'âge : cataracte, dégénérescence maculaire. Il existe une diminution de la force musculaire et de la sensibilité profonde. Enfin, la plasticité du système nerveux central, qui permet une adaptation rapide lors des atteintes vestibulaires, voit ses performances diminuer avec l'âge. La combinaison, d'une part, de ces éléments liés au vieillissement, d'autre part, de pathologies anciennes pouvant secondairement décompenser, et, enfin, de facteurs plus généraux tels que l'effet potentiellement iatrogène de certaines thérapeutiques, ou des atteintes ostéo-articulaires et neurologiques, fragilise la personne âgée par modifications de sa fonction d'équilibration.
Du point de vue vestibulaire, l'exploration des influences respectives des informations visuelles, vestibulaires et proprioceptives, à l'aide de plate-formes asservies (EquitestR), a permis de décrire le syndrome d'omission vestibulaire. Dans celui-ci, les tests vestibulaires conventionnels, en particulier les épreuves caloriques, sont normaux. En revanche, lors de la mise en jeu des différentes composantes sensorielles sur la plate-forme, l'inefficacité des afférences vestibulaires est établie. Même si le petit nombre de ces plates-formes limite leur accès, l'intérêt de ce diagnostic est la possibilité d'une amélioration fonctionnelle grâce à une rééducation vestibulaire spécialisée.
Enfin, on peut souligner qu'un certain nombre de sujets âgés, en parfait état général, conservent des activités physiques et sportives importantes. Certaines études épidémiologiques ont cependant montré qu'ils étaient eux aussi exposés aux risques de troubles de l'équilibre et de chutes, probablement en raison de ces phénomènes rattachés au vieillissement et qui les touchent aussi.
Les renseignements fournis par l'interrogatoire sont essentiellement de quatre ordres :
- la description des symptômes : leur type (instabilité, crises vertigineuses) ; leur durée et la présence d'éventuels facteurs déclenchants (lever, rotation de la tête) ou signes associés (troubles auditifs, visuels...) ;
- les antécédents, y compris anciens, pouvant être corrélés à une atteinte vestibulaire rapidement compensée et décompensant secondairement : traumatisme crânien, otite chronique, médicaments ototoxiques (aminosides pour tuberculose en particulier) ;
- les pathologies associées et traitements en cours ;
- l'évaluation de la sévérité des symptômes et de leur retentissement qui est possible grâce à des échelles et questionnaires spécifiques.
L'examen clinique permet de rechercher des signes vestibulaires : nystagmus spontané, déviation des index, la présence d'un nystagmus provoqué lors de la manuvre de Dix et Halpike, en rapport avec un vertige paroxystique positionnel bénin. Cette manuvre restera prudente et douce en cas de pathologie rachidienne cervicale ou d'athéromatose carotidienne. L'examen permet d'évaluer la station debout, et, grâce à des échelles fondées sur des tests simples (épreuves de Tinetti...), il est possible de quantifier la fonction d'équilibration et le risque de chute. Cette évaluation prend en compte les atteintes ostéo-articulaires, neurologiques, tout comme la masse musculaire, qui est parfois nettement diminuée avec retentissement sur la force musculaire.
Finalement, au terme de l'examen clinique, le praticien est orienté soit vers une très probable atteinte vestibulaire, soit vers un déficit neurosensoriel autre, visuel en particulier, soit enfin vers une atteinte multifactorielle.
Elles sont intéressantes pour authentifier une atteinte de l'oreille interne. L'audiométrie recherche une atteinte auditive asymétrique suspecte de processus évolutif. Elle permet aussi de dépister une presbyacousie associée. Les épreuves caloriques peuvent authentifier une atteinte vestibulaire uni- ou bilatérale (hypo- ou aréflexie) et évaluer le niveau de compensation de celle-ci. Une hyperréflexie bilatérale liée à une atteinte centrale est parfois retrouvée. La suspicion d'atteinte évolutive (tumeur des voies audio-vestibulaires, type neurinome de l'acoustique) conduit à réaliser une imagerie. Les plates-formes, statiques ou dynamiques, explorent la voie vestibulo-spinale. Ce sont des outils diagnostiques et thérapeutiques (suivi de la rééducation).
En fonction des données cliniques, les investigations sont orientées vers un bilan ophtalmologique, la recherche d'un trouble métabolique (thyroïde, dyslipidémie...), une imagerie cérébrale, la prise en charge d'un syndrome dépressif associé.
Les objectifs thérapeutiques sont doubles : réduire les symptômes et diminuer le risque de chutes. Dans la mesure du possible, le traitement sera adapté à une cause authentifiée : manuvre libératoire en cas de vertige paroxystique positionnel bénin, rééducation vestibulaire spécialisée en cas de décompensation secondaire d'une atteinte ancienne, correction d'une atteinte oculaire, traitement médical et kinésithérapie adaptée à une pathologie ostéo-articulaire... Dans tous les cas, il est utile de prendre en compte le degré d'autonomie de la personne âgée, en particulier au domicile. Des mesures d'aménagement et d'aide sociale peuvent être utiles. Dans tous les cas, la rééducation fonctionnelle et l'entraînement physique adapté sont intéressants.
Les troubles de l'équilibre des personnes âgées sont le plus souvent d'origine multifactorielle. L'identification d'une cause spécifique, en particulier vestibulaire périphérique, repose sur les données cliniques qui orientent les indications du bilan paraclinique, avec réalisation d'épreuves vestibulaires. La rééducation est à la base du traitement d'un certain nombre de pathologies, et elle contribue au maintien de l'autonomie.
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