Pendant longtemps, l'intestin grêle est resté pour le clinicien une « terra incognita », faute d'outils diagnostiques suffisamment performants. Le développement de la capsule vidéo-endoscopique a donc été accueilli avec beaucoup d'espoirs. Rappelons qu'il s'agit d'une « grosse gélule » qui est avalée par le patient et éliminée via le péristaltisme intestinal. Grâce à la présence d'une caméra et d'une source lumineuse, celle-ci permet de fournir des images transmises sur un moniteur vidéo par des capteurs placés sur l'abdomen. Sa principale indication est, pour l'instant, l'exploration des saignements digestifs de cause inexpliquée.
Une équipe allemande a mené la première étude multicentrique prospective afin de comparer les bénéfices de ce nouveau système à ceux de l'entéroscopie peropératoire. Malgré de multiples explorations (endoscopie haute, coloscopie, entéroscopie poussée et entéroclyse de l'intestin grêle), la source du saignement digestif n'avait pu être trouvée chez 32 patients qui présentaient cependant un taux d'hémoglobine abaissé (5,8 ± 1,5 g/dl) ayant nécessité transfusions et hospitalisations.
La capsule a permis de mettre en évidence la cause du saignement chez 18 de ces malades. Il s'agissait dans la majorité des cas d'une angiodysplasie (n = 18). Tous les malades ont subi, au plus une semaine après, une entéroscopie peropératoire.
Pour limiter le nombre d'investigations
Dans 7 cas (22 %), aucun des deux examens n'a été capable d'apporter un diagnostic. En revanche, les résultats obtenus par la capsule vidéo-endoscopique ont tous été confirmés par l'entéroscopie qui n'a apporté aucun bénéfice diagnostique supplémentaire, hormis le fait que l'importance de l'angiodysplasie a été sous-estimée par la vidéocapsule chez deux patients. Ces données plaident ainsi pour une utilisation plus large de ce nouveau procédé qui permettrait de limiter le nombre d'investigations, de réduire le nombre d'hospitalisations et de transfusions tout en permettant un traitement rapide. Dans tous les cas rapportés ici, un traitement par coagulation ou résection a en effet été possible.
Ces données ont notamment été confortées par celles de Pennazio M. et coll. qui se sont intéressés aux résultats de l'exploration par vidéocapsule obtenus chez 20 patients consécutifs ayant un saignement digestif de cause inexpliquée.
Un diagnostic causal a pu être apporté dans 47 % des cas, lorsqu'il s'agissait d'une hémorragie patente (92,3 %), davantage qu'en présence d'une saignement occulte (44,2 %) ou d'un antécédent de saignement (12,9 %). Globalement, la sensibilité de l'examen a été de 89 %, la spécificité de 95 %, la valeur prédictive positive de 97 % et la valeur prédictive négative de 82 %. Quatre-vingt-onze pour cent des malades ont été suivis pendant en moyenne les dix-huit mois suivants. La résolution complète de l'hémorragie a été obtenue chez 86,9 % des 23 malades qui présentaient initialement un saignement patent. Les chiffres ont été nettement moins bons pour les 39 sujets qui avaient un saignement occulte (69,2 %) et les 29 qui avaient été explorés pour un antécédent d'hémorragie (41,4 %), ce qui suggérerait un meilleur pronostic en cas de saignement actif.
La vidéocapsule, si elle n'en est qu'à ses débuts, constitue donc une technique prometteuse qui n'exposerait qu'à un faible nombre de complications ou d'échecs.
Bientôt une capsule biodégradable
Dans une étude rétrospective menée auprès de 245 patients, la technique a été responsable de 7 échecs ; le caecum n'a pu être atteint dans 34 cas sur 204 mais le diagnostic a cependant pu être posé chez 21 patients. Deux malades n'ont pu avaler le dispositif et dans 4 cas, le non-franchissement du pylore a nécessité une aide endoscopique. L'enclavement de la capsule a été la seule complication grave mais rare (4 cas) dont il faut assurément informer les patients.
Enfin, les résultats préliminaires d'une capsule similaire mais biodégradable utilisable en cas de sténoses intestinales, comme c'est le cas dans la maladie de Crohn, pourrait encore accroître les possibilités diagnostiques de cette technique.
D'après les communications de Bolz G (Ludwigshafen, Allemagne), Pennazio M (Turin, Italie), Keuchel M (Hambourg, Allemagne) et Riccioni ME (Rome, Italie).
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