Interrogatoire et examen
Il n'est pas rare de découvrir, au-delà de 50 ans, des lésions de rupture tendineuse asymptomatique, controlatérale à l'épaule algique. L'examen débute par un interrogatoire couplé à un examen clinique. Des radiographies récentes sont un préalable indispensable à l'examen ultrasonore à la recherche d'une pathologie osseuse méconnue, de la morphologie de l'acromion et de calcifications.
Le compte rendu échographique
Plusieurs points importants sont à préciser sur le compte rendu, soutenu par une imagerie précisément annotée :
– l'étude des tendons (long biceps figure 1, subscapulaire, supra-épineux et infra-épineux), en appréciant l'épaisseur et l'échostructure tendineuses, une éventuelle douleur au palper échoscopique, une éventuelle hyperhémie en Doppler couleur ;
– la trophicité des masses musculaires (notamment l'infra-épineux) ;
– l'état des reliefs osseux du tubercule majeur (trochiter) et du tubercule mineur (trochin) ;
– l'articulation acromio-claviculaire ;
– une éventuelle bursite sous acromio-deltoïdienne (figure 2) ;
– des signes éventuels de conflit lors des manoeuvres dynamiques : recherche notamment d'une convexité supérieure pathologique du ligament acromio-icoracoidien (figure 3) avec sensation de ressaut sous la sonde lors des tests dynamiques.
La rupture de coiffe
a) rupture transfixiante
–En phase aiguë, la rupture est souvent masquée par l'hématome qui colmate la brèche et le signe clé (très spécifique à cette phase) est alors la présence d'un double épanchement en intra-articulaire (autour du biceps) et en extra-articulaire (bourse sous acromio-deltoïdienne).
– En phase chronique, la rupture (qui concerne dans la plupart des cas en premier le supra-épineux) se manifeste par la disparition de toute structure tendineuse et/ou méplat localisé avec perte de la convexité supérieure de la face superficielle de la coiffe, voire une zone hypoéchogène transfixiant toute l'épaisseur du tendon.
L'échographie apprécie la taille de la rupture en différenciant la rupture postérieure préservant les fibres antérieures du supra-épineux antérieur (qui, elles-mêmes, protègent le biceps) de la rupture antérieure susceptible de venir au contact du biceps. La rupture de l'infra-épineux est exceptionnellement isolée et correspond le plus souvent à l'extension vers l'arrière d'une lésion du supra-épineux.
L'analyse du biceps est un temps important de l'examen car c'est l'atteinte de ce biceps qui est souvent la cause des douleurs. L'extension vers l'avant de la rupture peut, dans des cas évolués, entraîner une luxation interne du biceps, qui est le plus souvent associée à une désinsertion du subscapulaire.
b) rupture non transfixiante
Le diagnostic de rupture non transfixiante (notamment de la face profonde) est difficile, soumis aux conditions techniques d'échogénicité du patient et à l'expérience de l'opérateur : en outre, il est souvent difficile de trancher entre rupture de la face profonde et tendinopathie à l'insertion (encore dénommée «enthésopathie»).
Tendinopathie sans rupture
Les signes diffèrent suivant la localisation de l'anomalie :
– Au biceps, on note un épaississement tendineux, une modification d'échostructure, une douleur au palper échoscopique et la présence de liquide dans la gaine du biceps. La présence d'un épanchement isolé de la gaine est, en revanche, non spécifique et atteste de la présence de liquide dans le récessus inférieur de l'articulation.
– Au niveau des autres tendons, la tendinopathie affecte en priorité la face profonde et terminale du tendon au contact de l'insertion osseuse prenant le nom d'« enthésopathie » par référence à l'enthèse (dénomination concernant la terminaison du tendon sur l'os). Elle se manifeste par un épaississement hypoéchogène du tendon, associé en phase chronique à une spiculation du relief osseux, montrant bien la notion de complexe lésionnel « os-tendon » caractéristique de l'enthèse.
Dans les deux cas, le Doppler couleur (à effectuer sur des tendons détendus) recherche une hyperhémie témoignant du caractère actif « symptomatique » de la tendinopathie.
La présence de calcifications (enthésopathie calcifiante (figure 4) n'est pas forcément synonyme de « douleur » et il existe bon nombre de calcifications asymptomatiques, notamment sur la partie postérieure du supra-épineux. Le caractère symptomatique de la calcification est à rattacher à une douleur au palper échoscopique, une topographie bursale de la calcification, une hyperhémie en Doppler ou à un accrochage de la calcification sous l'auvent acromial lors des tests dynamiques.
Le Doppler participe également à la recherche d'une éventuelle capsulite (le patient est alors souvent limité au début en rotation externe) qui peut se manifester par une hyperhémie de l'intervalle des rotateurs (zone anatomique grossièrement comprise entre le biceps et le supra-épineux antérieur) voire un épaississement du ligament coraco-huméral, à confronter au côté controlatéral.
Au-delà du bilan le plus exhaustif possible des lésions, la préoccupation du médecin prescripteur est aussi de connaître la cause de la douleur. Les explorations du biceps et de la bourse sous-acromiodeltoïdienne sont particulièrement importantes car c'est souvent leur pathologie qui est en cause dans la genèse de cette douleur. C'est ainsi qu'il est fréquent de constater que de larges ruptures postérieures sont souvent bien tolérées (notamment rencontrées sur l'épaule controlatérale au motif de la consultation) car elles épargnent le biceps ; en revanche, les ruptures antérieures, venant au contact du biceps, sont plus souvent bruyantes. De même, l'inflammation de la bourse sous acromio-deltoïdienne est une cause classique de douleur en particulier nocturne.
Poursuivant les données d'un examen clinique et d'un interrogatoire bien conduits, l'échographie de l'épaule a une place certaine dans l'exploration de la coiffe. Un appareillage moderne couplé à une formation spécifique de l'opérateur, l'exploration systématique des deux épaules, le rendu de clichés annotés (permettant une relecture ultérieure et autorisant un avis sur la qualité de l'étude) sont des conditions indispensables à la crédibilité de cette technique, à la confiance des prescripteurs, et à la réussite de l'examen.
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