LA PREMIÈRE IDÉE qui vient à l'esprit, au sujet de la croisière de M. Sarkozy, c'est que la gauche ne semble pas avoir été informée que la campagne de l'élection présidentielle est terminée. Jeter l'anathème sur un candidat fait partie du débat démocratique ; continuer à présenter le même comme le monstre de Frankenstein alors que, dans l'intervalle, il a bel et bien été élu président, c'est augmenter artificiellement (et inutilement) l'animosité populaire à son encontre, alors que rien ne se fera en France si toutes les tendances politiques n'oeuvrent pas au redressement du pays dans une atmosphère respirable.
C'est plus fort qu'eux : les chefs de la gauche n'ont pas arrêté pendant trois jours de déverser des flots de venin sur le président élu. François Hollande a même demandé qui payait le voyage de M. Sarkozy, question destinée davantage à jeter le discrédit sur le nouveau président qu'à provoquer une réponse.
De guerre lasse, M. Sarkozy est sorti de ses vacances maltaises pour répondre ce que même M. Hollande savait déjà, à savoir que le milliardaire Vincent Bolloré payait la facture de l'avion privé et du yacht, pas le contribuable. M. Sarkozy a ajouté qu'il n'y avait pas de polémique, et qu'il ne s'excuserait pas, ce en quoi il a raison.
Conflit d'intérêts ?
Car s'il devait s'excuser chaque fois que l'opposition l'agresse, il n'aurait plus le temps de gouverner. Cette minicrise de salon est tellement fabriquée que l'on en vient à douter du sérieux avec lequel la gauche prépare les élections législatives. Elle devrait avoir d'autres chats à fouetter. De son côté, M. Sarkozy a le droit, comme n'importe quel citoyen d'avoir des amis, fussent-ils riches, et aussi une vie privée. Après tout, la presse s'est donné un mal fou pour retrouver sa trace ; pour une fois, elle aurait pu manquer de zèle. Cependant, le problème posé par ces trois jours de vacances n'est pas celui que l'on a bien voulu dire. Trois jours de grand luxe, cela ne signifie pas que l'on se complaise dans le luxe ; si Mme Royal avait été élue, peut-être qu'elle ne se serait pas contentée d'un pique-nique dans le bois de Fausses-Reposes, allez savoir. En revanche, dès lors que Vincent Bolloré agit à l'égard de Nicolas Sarkozy avec générosité, on voit mal le président de la République tenir la dragée haute à l'industriel au cas où une crise les opposerait. Cependant, il n'y aurait conflit d'intérêts que dans un tel cas de figure. Or, M. Bolloré rappelle qu'il a déjà reçu Léon Blum et le roi Mohammed V, et que son entreprise, en 185 ans, n'a jamais travaillé avec l'Etat. Si on réfléchit en fonction des besoins et du destin du pays, on ne doit pas s'enliser dans une querelle qui affecte la dignité de la présidence et qui n'est pas un drame. On voudrait que la gauche se constitue en force de proposition plutôt qu'en machine à dénigrer.
On le voudrait d'autant plus qu'elle a réagi à la perfection aux émeutes et incendies qui continuent à se produire ici où là, cinq jours après l'élection du président. Le député socialiste Manuel Valls a parlé, fort à propos, de « têtes brûlées » et la plupart des socialistes ont dénoncé des comportements qui réduisent la démocratie à peu de choses.
EN HARCELANT SARKOZY POUR TOUT ET POUR RIEN, ON VEUT SURTOUT LE DELEGITIMER
Fort bien. Ceux qui se livrent de nouveau à de telles exactions n'ont rien compris. On leur a suggéré de voter en masse. Ils y sont allés, mais comme ce n'est pas leur candidate qui a été élue, ils sont retournés à leurs bonnes vieilles méthodes. Ils écrivent même sur des panneaux : « Sarkozy dictateur », alors qu'ils ont eu le droit – le privilège – de voter contre lui. En revanche, ils nous font subir la dictature de l'incendie.
Il n'est pas excessif de dire que l'on ne peut rien pour eux. Leur comportement est conforme à ce que l'on fait de mieux, en matière de violence, d'entêtement destructeur, de négation des droits de l'homme, dans le reste du monde.
Restons zen. C'est M. Sarkozy que les Français veulent et il n'y a aucune raison qu'ils contestent la décision de la majorité. Ils finiront par déclencher un profond mouvement de rejet dans la société française, car la violence appelle la violence. Ce qui nous renvoie à la querelle sur les « trois jours » de Sarkozy. Chacun d'entre nous est responsable de ce qu'il fait. Le PS ne peut pas à la fois dénoncer les exactions commises par des voyous et des casseurs professionnels, il ne peut pas rappeler que M. Sarkozy a été élu conformément aux règles les plus rigoureuses de la démocratie et, en même temps, participer à la délégitimation du nouveau président en contestant le moindre de ses gestes. Bien entendu, nous n'irons pas jusqu'à établir un lien entre les « trois jours » et les émeutes, mais on peut craindre que, à attaquer sans répit un nouveau président, on donne une raison de plus de s'insurger, de dénoncer, de rejeter, de nier, de détruire, de saccager à des personnes inqualifiables, mais nombreuses.
Message à tous : préparez les législatives. Restons zen.
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