Face à un patient qui devrait arrêter de fumer, le médecin peut être tenté de vouloir agir en tant qu'expert en insistant sur la nécessité de la démarche. Le risque est alors de créer une situation de « bras de fer » psychologique entre le médecin et le patient, qui, à terme, peut aboutir à l'abandon, par le médecin, de l'objectif fixé.
LE TABAGISME est un facteur de risque cardio-vasculaire majeur. Il favorise le développement et la progression de la maladie athéroscléreuse par le biais de différents effets : un effet vasculaire prothrombotique, par son action sur les plaquettes et l'endothélium, et un effet sur les lipides (augmentation du LDL cholestérol et des triglycérides, diminution du HDL cholestérol), mais aussi une stimulation des marqueurs inflammatoires (protéine C réactive, albumine et fibrinogène...) qui à leur tour augmentent le risque cardio-vasculaire et des effets métaboliques (intolérance au glucose, facteur de risque de diabète de type 2, augmentation de la quantité de graisse abdominale en dépit d'un indice de masse corporelle (IMC) bas, l'IMC étant plus faible chez les fumeurs que chez les non-fumeurs ou les ex-fumeurs).
Ces effets qui exposent le fumeur à une augmentation importante du risque cardio-vasculaire sont dépendants à la fois de la quantité de cigarettes fumées par jour et de la durée du tabagisme.
Le tabagisme étant un facteur de risque modifiable, tous les efforts doivent être déployés pour réduire sa prévalence, à la fois chez les patients déjà atteints de maladie cardio-vasculaire et chez les sujets en bonne santé ou asymptomatiques, et ce quel que soit l'âge.
Comment amener un patient à prendre la décision d'arrêter ?
Différentes études ont permis de dégager des facteurs associés à de meilleures chances de réussite de sevrage tabagique. Outre une forte motivation, les facteurs prédictifs de succès sont : un haut niveau d'éducation ou socio-économique, une faible consommation de cigarettes, l'absence d'entourage fumeur, une faible consommation d'alcool, un âge de début tardif, une durée de tabagisme brève, un long délai entre l'éveil et la première cigarette.
Cependant, il apparaît nécessaire de tenir compte des traits de personnalité et des associations avec des vulnérabilités psychopathologiques pour adapter les prises en charge et les messages en fonction des sujets.
Le Dr Henri-Jean Aubin (Limeil-Brévannes) souligne la difficulté, pour tous les médecins d'amener leurs patients à prendre la décision d'arrêter de fumer, ils sont souvent confrontés à des résistances difficiles à vaincre.
La nature des interactions entre le médecin et son patient prend toute son importance.
Face à un fumeur invétéré, le médecin qui veut l'amener à arrêter peut naturellement choisir d'agir en qualité d'expert, et tenter de le persuader, de lui prouver qu'il est impératif d'arrêter de fumer. Le patient, en réponse à cette attitude à type de confrontation, a une réaction de réactance psychologique, il va développer des résistances à tous les arguments du médecin qui vont renforcer son attitude et essayer d'être encore plus persuasif dans son discours.
Le risque est alors de créer une situation de « bras de fer » psychologique entre le médecin et le patient, qui, à terme, peut aboutir à l'abandon, par le médecin, de l'objectif fixé.
Pour le Dr Aubin, trois leviers permettent de lancer la dynamique de changement chez le patient :
- l'importance du changement, en amenant le patient à considérer les bénéfices de l'arrêt du tabagisme ;
- la confiance du patient en sa capacité à mettre en œuvre un changement ;
- le sentiment de responsabilité du patient, qui doit s'approprier la décision d'arrêter de fumer.
Le patient se sentira prêt à changer s'il prend conscience des conséquences de son tabagisme et des bénéfices d'un arrêt du tabac et s'il a une confiance suffisante en sa capacité à entreprendre le changement.
Le style utilisé par le médecin aura un impact important sur la dynamique de changement. La confrontation renforce les résistances alors qu'une information factuelle, valorisant les bénéfices attendus et respectant la liberté d'analyse du patient, renforcera sa motivation.
D'après la communication du Dr Henri-Jean Aubin : « Prise en charge du tabagisme en cardiologie », lors de la session commune Société française de tabacologie/SFC, présidée par le Pr D. Thomas Paris et le Dr Y. Berlin (Paris).
Les bénéfices cardiovasculaires du sevrage
– Amélioration rapide de la fonction endothéliale et diminution rapide du risque de thrombose.
– Diminution franche du risque coronarien dès la première année.
– Diminution du risque de récidive d'infarctus du myocarde de 36 % à 5 ans et du nombre d'événements cardiovasculaires après un geste de revascularisation.
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