GILLIAN BOOTH et ses collaborateurs de l’Institute for Clinical Evaluative Sciences de Toronto (Canada) ont cherché à savoir à partir de quel âge les sujets diabétiques commencent à encourir un risque cardio-vasculaire élevé, c’est-à-dire atteignant 20 % ou plus à dix ans (soit un minimum de 20 événements pour 1 000 années-personnes). Pour ce faire, ces chercheurs n’ont pas lésiné sur les moyens, puisqu’ils ont mené leur étude sur la quasi-totalité de la population de l’Ontario, soit plus de 9 millions d’individus, dont quelque 379 000 étaient diabétiques.
Un suivi sur six ans.
Tous les événements cardio-vasculaires survenus dans cette vaste cohorte entre avril 1994 et mars 2000 ont été recensés, ce qui englobait les infarctus du myocarde, les accidents vasculaires cérébraux et les décès liés à une cause cardio-vasculaire.
Cela a permis de montrer que le diabète est globalement responsable d’événements défavorables plus précoces que dans la population générale. Pour les diabétiques, le passage dans la catégorie à haut risque est ainsi intervenu, en moyenne, quinze ans plus tôt que pour les sujets exempts de diabète. Plus précisément, chez les individus atteints de diabète qui ont été victimes d’un infarctus du myocarde, d’un accident vasculaire cérébral ou sont décédés d’une cause quelconque, la transition d’un niveau de risque cardio-vasculaire modéré à un niveau élevé s’est produite vers l’âge de 48 ans s’il s’agissait d’un homme et de 54 ans dans le cas d’une femme.
Un flou en partie levé.
A l’heure actuelle, les recommandations demeurent relativement empiriques en ce qui concerne l’âge d’instauration d’un traitement vasculoprotecteur chez les sujets diabétiques. Cela tient en grande partie au fait que rares sont les essais contrôlés à avoir inclus des diabétiques âgés de moins de 40 ans. Les sociétés savantes de nombreux pays préconisent de se fonder, chez les diabétiques de type 2, sur les mêmes objectifs thérapeutiques que ceux définis dans la prévention secondaire de la maladie coronarienne. En 2005, l’International Diabetes Federation a publié des recommandations stipulant, notamment, qu’un sujet diabétique de type 2 âgé de plus de 40 ans doit être considéré comme exposé à un haut risque d’événement cardio-vasculaire, quel que soit son sexe et qu’il présente ou non des facteurs de risque cardio-vasculaire ou coronariens préexistants. L’American Diabetes Association a adopté une position similaire, sans toutefois faire de distinction entre diabètes de type 1 et de type 2. En revanche, au Royaume-Uni, le National Institute for Health and Clinical Excellence a élaboré des tables d’estimation du risque permettant d’iden- tifier les diabétiques de type 2 relevant d’une prévention primaire. En l’absence d’instrument équivalent utilisable chez le diabétique de type 1, il a été proposé de prendre l’âge de 35 ans comme seuil pour l’instauration d’une prévention primaire par statine chez un tel patient dès lors qu’il ne présente aucun antécédent cardio-vasculaire.
Des algorithmes sont nécessaires.
Le travail de Booth et coll. clarifie quelque peu les choses en montrant que, de façon générale, avant l’âge de 40 ans, les diabétiques n’encourent qu’un risque cardio-vasculaire faible à modéré, tout au moins sur le court terme. Ces données tendent donc à contredire les conceptions actuelles selon lesquelles tout diabétique adulte doit être considéré comme exposé à un haut risque d’événénement cardio-vasculaire quels que soient son âge et le type de son diabète. Si les diabétiques d’âge moyen doivent expressément faire l’objet d’une stratégie agressive de réduction du risque, il semblerait que, en dessous de 40 ans, les modalités de prévention doivent être individualisées, au cas par cas, en fonction du contexte clinique. En revanche, il reste à élaborer des algorithmes appropriés de prise en charge du risque cardio-vasculaire chez ces diabétiques jeunes.
G.L. Booth et coll. « Lancet » du 29 juin 2006.
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