Grippe
La vaccination contre la grippe concerne les virus majeurs à l'origine des épidémies qui se succèdent ou alternent tous les ans. Le vaccin antigrippal tient donc compte des virus circulants, mais l'objet de la vaccination n'est pas d'empêcher ou de diminuer la circulation des virus. La philosophie actuelle, en France comme dans la plupart des pays développés, explique le Dr Jean-Claude Manuguerra (Institut Pasteur, Paris) est d'éviter les hospitalisations et les décès. Autrement dit, prévenir les risques de complications graves, notamment chez les personnes les plus exposées à ces risques, à savoir les sujets âgés de 65 ans et plus ainsi que les personnes affectées de comorbidités. Les professionnels de santé sont invités à se faire vacciner, notamment, afin de ne pas être eux-mêmes à l'origine des contaminations des personnes à risque.
Les recommandations vaccinales en 2003.
La première grande recommandation concerne les personnes de 65 ans et plus chez qui sont enregistrés 90 % des décès attribués à la grippe. C'est la recommandation la plus facile à mettre en œuvre, avec un effet pervers lié à la notion d'une maladie qui touche plutôt les personnes âgées. Néanmoins, précise le Dr J.-C. Manuguerra, ce n'est pas tant l'âge qui intervient mais les facteurs de comorbidité qui augmentent avec l'âge. Les autres recommandations concernent les enfants de 6 mois à 18 ans, dont l'état de santé nécessite un traitement prolongé par aspirine (syndrome de Kawasaki compliqué, arthrite juvénile) ; les personnes qui séjournent dans des établissements de santé de moyen ou long séjour, quel que soit l'âge, où il s'agit de prévenir les effets souvent graves d'une grippe nosocomiale. Une autre recommandation liée à une comorbidité concerne les personnes atteintes des pathologies suivantes : affections broncho-pulmonaires chroniques (dont l'asthme, la dysplasie broncho-pulmonaire, la mucoviscidose), cardiopathies congénitales mal tolérées, insuffisance cardiaque, valvulopathies graves, néphropathies graves, syndrome néphrotique pur et primitif, drépanocytose homozygote et hétérozygote, diabète insulinodépendant ou non insulinodépendant non équilibré par le seul régime, déficits immunitaires cellulaires (VIH) dont l'indication de vaccination est faite par l'équipe qui suit le patient. Enfin, une recommandation, récemment introduite en France, incite à la vaccination les professionnels de santé et tout professionnel en contact régulier et prolongé avec des sujets à risque.
Au chapitre du remboursement, les recommandations se retrouvent classées en 9 ALD prises en charge par la Cnam. Ce sont le diabète, l'insuffisance cardiaque grave et les cardiopathies, l'insuffisance respiratoire (seuls les asthmes très graves sont pris en compte, d'où la difficulté d'application des recommandations), les affections neurologiques, musculaires et épileptique graves, les déficits immunitaires primitifs graves ainsi que l'infection par le VIH, les néphropathies chroniques graves, l'hémoglobinopathie, la mucoviscidose.
Une couverture vaccinale variable.
Si les recommandations vaccinales sont relativement faciles à appliquer chez les sujets âgés de 65 ans et plus (la couverture vaccinale atteint 76 % selon la dernière mise à jour de la Cnam en novembre 2003), elles sont très difficiles à mettre en œuvre chez les personnes en ALD (la couverture vaccinale n'atteint que 25 %), qui ne se sentent pas concernées bien qu'elles reçoivent les prises en charge de la Cnam.
Chez les professionnels de santé, les difficultés d'application des recommandations sont liées à un problème logistique, avec la nécessité de répéter tous les ans une injection, ainsi qu'à la question toute théorique d'une exposition annuelle non naturelle à une forte dose d'antigène qui pourrait perturber l'immunité (à laquelle il n'y a pas de réponse actuellement). On ne reconnaît pas actuellement la couverture vaccinale de ces professionnels.
Une autre notion freinant l'application de la vaccination est liée à l'idée fausse que la grippe peut survenir après la vaccination (alors qu'il s'agit de virus inactivés). Le problème est plutôt lié à la grande variation de l'efficacité vaccinale selon l'âge et les critères imposés : bonne efficacité en termes de prévention des hospitalisation et des décès ; moins bonne efficacité en termes de prévention de l'infection, surtout pour les sujets très âgés. Sans oublier une mauvaise identification de la grippe liée à l'infection possible par d'autres virus (VRS, para-influenzae...) qui biaise la perception de l'efficacité de la vaccination.
D'après un entretien avec le Dr Jean-Claude Manuguerra, Virologue, institut Pasteur, Paris.
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