Les chiffres 2010 de l’observatoire sur la sécurité montrent un accroissement de 80 % des agressions dont sont victimes les professionnels de santé, généralistes en tête. Est-ce la traduction d’une explosion des faits de violence ou est-ce lié à un nombre accru de déclarations de leur part ?
Dr Michel Legmann. La réponse se situe, je pense probablement entre les deux. Depuis que nous avons créé, Jaques Lucas et moi, cet observatoire, nous essayons chaque année de faire progresser dans l’esprit des médecins la nécessité de déclarer une agression et de porter plainte. Ceci n’était pas dans la culture médicale. Donc, chaque année, ça progresse et certainement que cet aspect-là joue un rôle. Mais l’évolution de l’incivilité et de la criminalité que l’on constate de manière générale dans notre société n’épargne pas le corps médical. Nous sommes ici situés presque en avant par rapport à un certain nombre d’intervenants dans la société puisque nous devons garder des liens avec tout le monde, y compris dans les zones de non-droit où, quelquefois, la police et les pompiers hésitent à se rendre, alors que le médecin appelé en urgence doit aller y faire sa visite.
L’Ordre et les pouvoirs publics s’apprêtent à rendre public leur plan d’action pour répondre à ce phénomène…
Dr M. L. De la constatation des faits, il faut maintenant passer à des actions concrètes, et si possible, à une thérapeutique de ces actes d’incivilité et d’agressions. Nous sommes en train d’élaborer avec les trois ministères concernés que sont la Santé, la Justice, et l’Intérieur un protocole qui comprendra un certain nombre de mesures allant dans le sens d’un accroissement de la sécurité pour les professionnels de santé : facilitation des dépôts de plainte, fonctionnaires dédiés en zone de police comme en zone de gendarmerie, liaison avec des moyens interventionnels ambulatoires, en clair des patrouilles de police, facilement joignables, et pourquoi pas des caméras devant certains cabinets pluridisciplinaires, prises en charge par les collectivités territoriales. Bref, tout un arsenal de mesures pratiques.
Enfin, vous assimilez cet accroissement de l’insécurité à un problème de santé publique.
Dr M. L. Tout simplement parce que dans les problèmes que connaît actuellement la démographie médicale, il est évident que l’insécurité joue un rôle bien entendu. Une réalité d’autant plus prégnante que la féminisation de la profession s’est largement accrue. La signature du protocole visant à sécuriser l’exercice des professionnels de santé que j’évoquais précédemment est imminente. C’est un début de réponse. Ensuite, il faudra décliner tout cela sur le territoire, avec les Agences régionales de santé, les préfets, le procureur de la République et les instances départementales et régionales de l’Ordre. Tout le monde est ainsi concerné et devient partie prenante. Il y a des spécificités locorégionales et ce sont donc les instances qui sont parties prenantes sur le terrain qui doivent s’en préoccuper.
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