LES MÉDECINS se plaignent de la multiplication des contrôles tatillons des caisses primaires d'assurance-maladie (Cpam). Depuis quelques semaines, ils ripostent. MG-France a annoncé son intention d'attaquer le directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (Uncam) pour harcèlement (« le Quotidien » du 7 mai 2005).
Espace Généraliste a quant à lui décidé de soutenir devant les juridictions compétentes, à savoir le tribunal administratif ou le tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass), les dossiers des médecins qui seraient l'objet de «pressions abusives». La cellule juridique du syndicat, fondée il y a un an, a enregistré 150 à 200 demandes d'assistance depuis sa création. Dans la majorité des cas, les médecins généralistes sont l'objet d'analyses de leur activité, se font contrôler leurs prescriptions de médicaments, d'affections de longue durée (ALD) et d'arrêts de travail.
Pour une charte du contentieux.
Pour le syndicat, l'ampleur des contentieux et les motifs invoqués par les médecins-conseils des caisses ne sont pas acceptables. «Nous nous faisons empoisonner la vie au quotidien, explique le Dr Claude Bronner, président d'Espace Généraliste. Nous avons décidé de ne plus nous laisser faire.»
Le Dr Serge Bernstein, généraliste à Villetaneuse (93), a été contrôlé en septembre sur ses prescriptions comme dix-sept de ses confrères de Seine-Saint-Denis. «Un entretien qui a duré huit heuresavec deux ou trois médecinsconseils qui se relayaient pour me demander de justifier mes ordonnances», témoigne le Dr Bernstein. Choqué par le déroulement de la procédure, le médecin a décidé de fonder une association de défense des médecins contrôlés. «Nous voulons veiller au respect du droit de la défense et lutter contre l'arbitraire, explique le Dr Bernstein . Les règles doivent être transparentes.»
Fabrice Di Vizio, avocat à la cour, spécialiste de droit en santé et conseiller d'Espace Généraliste, relève que le comportement des médecins-conseils de l'assurance-maladie a changé radicalement depuis la réforme de 2004. «Nous avons le sentiment que ces médecins-conseils ont un sentiment d'impunité et cherchent à faire des exemples avec des médecins ordinaires», explique-t-il. Dans ce contexte de démographie médicale à la baisse, l'avocat redoute «le découragement des vocations et le discrédit de la profession».
La cellule juridique d'Espace Généraliste plaide pour une réforme des modalités du contrôle médical et demande la rédaction d'une charte encadrant le contentieux ouvrant le droit aux médecins poursuivis de connaître précisément les faits qui leur sont reprochés.
L'assurance-maladie estime infondé le reproche de harcèlement. «La détection des cas se fait à partir de données statistiques et les contrôles sont très encadrés par la loi», explique Pierre Fender, directeur de la répression des fraudes à l'assurance-maladie. Ces deux dernières années, la Cnam a ainsi mis sous entente préalable pour les arrêts de travail 180 médecins sur les 54 000 généralistes en exercice.
Espace Généraliste entend poursuivre son action en interpellant le gouvernement et l'Ordre des médecins pour mettre fin à cette «situation intenable». Le prochain plan de redressement des comptes que doit annoncer aujourd'hui le directeur de l'Uncam n'est pas fait pour rassurer la cellule juridique d'Espace Généraliste. L'assurance-maladie prévoit en effet d' «étendre les possibilités de mise sous accord préalable aux offreurs de soins déviants».
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