A l'issue de la campagne menée depuis juin 2000 sur les animaux à risque (c'est-à-dire retrouvés morts, euthanasiés ou accidentés), la direction générale de l'alimentation (DGAL) avait souligné que « 90 % des cas d'ESB se recrutent parmi les animaux nés en 1993, 1994 et 1995 » (« le Quotidien » d'hier). Une proportion qui prouve, commente Martin Hirsch, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaires des aliments (AFSSA), que, « malgré l'interdiction des farines animales dans l'alimentation des bovins depuis 1990, les animaux restaient exposés à la contamination », confirmant par là-même les suspicions sur les contaminations croisées de farines qui existaient dans les exploitations au niveau de l'alimentation du bétail.
Fourchette haute
L'autre « grand enseignement » de cette étude scientifique, c'est la sous-estimation jusqu'alors effectuée de la proportion des animaux touchés par le prion pathogène. « Le taux de prévalence parmi les bovins à risque, ceux exclus de la chaîne atteint 1,6 cas pour 1 000, souligne à cet égard Martin Hirsch. Ce niveau est nettement supérieur à celui qui pouvait être estimé par la seule surveillance clinique et dans le haut de la fourchette évoquée avant le démarrage du programme. »
En juin 2000 en effet, les spécialistes avaient annoncé qu'ils s'attendaient à un taux de prévalence de la maladie de 0,01 à 3 pour 1 000. On découvre donc que les signes caractéristiques de la maladie de la vache folle pouvaient passer parfois inaperçus aussi bien des éleveurs que des vétérinaires, dans le cadre du programme d'épidémiosurveillance clinique. A moins que des acteurs de la filière n'aient cédé à la pression en omettant sciemment le signalement de certains cas.
L'AFSSA, quoi qu'il en soit, dans ses conclusions, estime que « dans 83 % des cas, l'animal détecté (positif) a présenté des signes cliniques qui n'ont cependant pas conduit à ce que soit notifiée une suspicion clinique. Dans certains cas, cela peut être attribué à une faiblesse du fonctionnement du système d'épidémiosurveillance. Dans d'autres cas, cela peut montrer la difficulté de procéder à une suspicion clinique quand les signes ne sont pas caractéristiques de la maladie ».
En tout cas, l'interdiction des farines carnées pour l'ensemble des animaux de rente apparaît aujourd'hui, rétrospectivement, comme une mesure pleinement justifiée. Même si, en contrepartie, la question de l'élimination de ces farines reste cruciale. « Nous sommes confrontés à un flux (...) qui est de l'ordre de 10 000 tonnes par semaine, ce qui est considérable », souligne Dominique Voynet. « Nous ne disposons plus que de trois sites en France, qui nous permettent d'avoir une certaine sécurité de stockage jusqu'au mois de septembre », a précisé la ministre de l'environnement. Au-delà de cette échéance, Mme Voynet a annoncé qu'une « stratégie complète de l'incinération » devrait être arrêtée pour résoudre le problème, « sans créer, cependant, de surcapacités, parce qu'il s'agit de faire face à une difficulté ponctuelle et à l'élimination en quelques années de ces farines ».
Les consommateurs, cependant, semblent retrouver confiance dans la filière bovine. Ce secteur n'enregistre plus qu'une baisse de 10 % par rapport à sa consommation antérieure à la crise de novembre 2000. « Nous avons encore gagné 5 % ce dernier mois », précise le ministre de l'Agriculture. Jean Glavany a invité l'ensemble de la filière produits carnés à intensifier encore leurs efforts. Le gouvernement se réserve, quant à lui, d'améliorer l'étiquetage en saisissant la Commission européenne d'une réglementation plus explicite sur le type racial et la catégorie de l'animal.
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