De notre correspondante
à New York
« Le principal résultat de notre étude est que la survenue d'un trouble du rythme ventriculaire durant les premières minutes après une épreuve d'effort est un facteur indépendant, rare mais puissant, qui prédit la mortalité », commente pour « le Quotidien » le Dr Michael Lauer, cardiologue à la Cleveland Clinic Foundation (Ohio), qui a dirigé la recherche. « Cette étude, jointe à d'autres, indique que l'épreuve d'effort demeure un outil clinique important et extrêmement utile. »
« Pour évaluer les patients atteints d'une maladie cardiaque connue ou soupçonnée, les médecins se reposent de plus en plus sur des tests d'imagerie onéreux et court-circuitent ou ignorent l'épreuve d'effort », poursuit-il. « En agissant ainsi, je crains qu'ils ne desservent leurs patients. Lorsque l'épreuve d'effort est interprétée correctement, en prêtant attention à la capacité d'exercice, aux changements de fréquence cardiaque pendant et après l'exercice, et maintenant à une arythmie ventriculaire, elle devient l'un des tests pronostiques les plus puissants disponibles. De plus, l'épreuve d'effort est sûre, facile à réaliser et relativement peu coûteuse. »
Marqueurs d'une ischémie du myocarde
Depuis son introduction il y a cinquante ans, le test d'effort est la pierre angulaire des examens diagnostiques coronariens. Traditionnellement, son interprétation repose presque entièrement sur les observations faites durant l'effort. Le niveau maximal d'exercice du sujet est un puissant prédicteur de pronostic. Plusieurs observations sont des marqueurs d'une ischémie du myocarde : sous-décalage du segment ST (> 1 mm), sus-décalage du segment ST en l'absence d'onde Q, angor, arythmie ventriculaire et réponse inadéquate de la TA ou de la fréquence cardiaque à l'exercice. Enfin, le score de Duke sur tapis roulant, qui intègre l'ampleur de la déviation du segment ST, la présence ou non d'angor et la capacité d'exercice en unités métaboliques, fournit une estimation utile du pronostic.
Toutefois, l'observation pendant la période de récupération, au cours des quelques minutes qui suivent l'arrêt, peut aussi fournir des informations. Ainsi, l'apparition d'un sous-décalage du segment ST a la même valeur pronostique que durant l'exercice.
Dans une précédente étude (« New England Journal of Medicine », 1999), l'équipe a montré que, à l'arrêt de l'exercice, un délai de retour à la baisse de la fréquence cardiaque prédit un mauvais pronostic, avec un risque de décès multiplié par quatre dans les six années suivantes. Ce délai résulte d'une réactivation inadéquate du tonus vagal (ou parasympathique).
Dans leur nouvelle étude, les chercheurs ont examiné si la survenue d'une arythmie ventriculaire après l'exercice, au moment de la réactivation vagale, peut signer un mauvais pronostic. Ils ont en effet pensé qu'une réactivation vagale insuffisante pourrait s'accompagner d'extrasystolie ventriculaire.
Risque relatif de 1,5
Leur étude a le mérite de porter sur une vaste cohorte de 29 244 patients (56 ans en moyenne, 70 % d'hommes) adressés pour épreuve d'effort, sans insuffisance cardiaque, valvulopathie ou arythmie. Les chercheurs ont recherché, durant et après l'exercice, la survenue d'une « extrasystolie ventriculaire fréquente » (au moins 7 battements ventriculaires prématurés par minute, bigéminisme ou trigéminisme ventriculaire, doublets ou triplets ventriculaires, tachycardie, flutter, torsade de pointe, ou fibrillation). Une arythmie ventriculaire est survenue chez 3 % des patients strictement pendant l'exercice, 2 % strictement pendant la récupération, et 2 % pendant l'exercice et la récupération. Durant les cinq ans de suivi, 1 862 décès sont survenus.
Les résultats, après ajustement, montrent qu'une arythmie ventriculaire pendant la récupération prédit indépendamment un risque accru de décès (RR ajusté de 1,5) pendant les cinq années suivantes, mais pas l'arythmie ventriculaire durant l'exercice. Ces résultats, remarquent en conclusion les chercheurs, « sont en faveur de l'importance centrale de la médiation vagale dans la fonction cardiaque ».
« New England Journal of Medicine », 27 février 2003, pp. 775 et 781.
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