La création du secteur optionnel figure déjà en toutes lettres dans la convention médicale signée cet été… comme elle était déjà inscrite dans la convention de 1993 ! Pourtant, les négociations vont reprendre le 12 octobre entre syndicats de médecins, Assurance-maladie et complémentaires pour remettre une nouvelle fois l’ouvrage sur le métier. Mardi, une première réunion de cadrage a eu lieu entre les deux derniers afin d’évaluer le coût pour les complémentaires du remboursement de ces dépassements régulés. « Nous attendons de l'Assurance-maladie des estimations sur ce que cela va nous coûter et nous voulons comparer nos évaluations, indiquait-on à la Mutualité Française avant la réunion. Jusqu'à présent, le gouvernement nous a dit "signez et après on verra". Mais nous ne sommes pas des payeurs aveugles ou des supplétifs ».
Une accumulation de contentieux
Les pourparlers de cet été avaient simplement fixé le cadre du secteur optionnel. Mais depuis lors les contentieux se sont accumulés avec les pouvoirs publics. A la rentrée, les complémentaires se sont braqués à cause de la hausse des taxes sur leur chiffre d’affaires. Elles redoutent à présent un amendement au PLFSS, présenté par la députée UMP Valérie Rosso-Debord, qui prévoit de taxer les réserves des mutuelles. Ces dernières sont aussi en délicatesse avec le gouvernement au sujet de l’impossibilité pour elles actuellement de contractualiser directement avec des professionnels de santé.
Pour autant, sur le papier, tout semble prêt. Les contours du nouveau secteur ont déjà été négociés depuis octobre 2009. Il ne concernera, dans un premier temps, que les médecins de secteur 2 ou titulaires d’un DP exerçant en plateaux techniques lourds, autrement dit chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens. Ces praticiens pourraient alors s’engager à réaliser 30% ou plus de leurs actes au tarif opposable et à facturer pour les autres des « compléments d’honoraires » inférieurs ou égaux à 50% du tarif opposable. En contrepartie, l’Assurance-maladie participerait au financement des cotisations du praticien.
L’objectif est de faire passer 80% des anesthésistes et 55% des chirurgiens en secteur 1 ou en secteur optionnel. Ambitieux, quand on sait que le syndicat Le Bloc qui représente près de 60% de ces spécialistes n’a pas pris part au protocole d’accord. « Les pouvoirs publics accepteront-ils cette situation absurde qui voudrait que les représentants des intéressés au projet soient exclus des négociations » s’interroge le syndicat, en jugeant le projet actuel « pas acceptable, car il est discriminatoire à l’égard des chirurgiens et des obstétriciens en secteur 1 ». Pour les autres syndicats signataires de la convention, pas question de tout rediscuter. Les spécialistes de la CSMF considèrent que « le texte conventionnel est définitif » et ne « répondra pas à la demande de l’UNOCAM de rouvrir une négociation sur les critères de mise en place du secteur optionnel ». A moins bien sûr, glisse-t-on à l’UMESPE, d’élargir le nombre de bénéficiaires... Le SML campe sur la même position : « application du secteur optionnel seulement selon les modalités du protocole du 20 juillet ».
La fronde des patients
Côté patients, le secteur optionnel ne fait pas l’unanimité. L’UFC-Que Choisir appelle le gouvernement à entendre « le refus exprimé par les usagers et les complémentaires santé d’un secteur optionnel inefficient et coûteux, » redoutant des hausses mécaniques de cotisations. Les associations de patients du CISS, estiment également qu’au « moment où s’amplifient les attaques contre l’égalité d’accès aux soins et à la solidarité, le secteur optionnel sans conditions ne nous paraît pas une bonne mesure » et que la « lutte affichée contre les dépassements d’honoraires risque de se traduire par leur généralisation ». La CGT n’est pas en reste et pointe les risques d’effets pervers du dispositif en faisant « exploser le reste à charge pour les patients ».
Le gouvernement qui avait fixé aux complémentaires un ultimatum pour le 30 septembre a finalement accepté d’accorder aux négociateurs quelques semaines supplémentaires. Le temps presse désormais car le secteur optionnel risque de ne pas survivre en cas d’alternance politique. Dans nos colonnes, François Hollande a jugé la solution du secteur optionnel « pas convaincante ». En forte progression depuis une dizaine d’années, les dépassements d’honoraires s’élèvent désormais à 2,5 milliards d’euros par an.
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