U NE des difficultés rencontrées par les médecins face à un patient porteur d'un épithélioma spinocellulaire de la tête ou du cou est d'en établir le pronostic. En dehors d'arguments cliniques, tels que la présence d'adénopathies ou de métastases, à la valeur inconstante, il existe un réel besoin de marqueurs du potentiel de la tumeur à disséminer ou récidiver. Dans cette quête, les médecins du « Groupe oncologie de la tête et du cou » de l'Institut Curie (Paris) ont exploré la voie de la chaîne alpha du récepteur soluble de l'interleukine 2 (sIL2Ralpha). Une molécule dont ils ont déjà montré qu'à taux élevé, elle s'associe à une survie écourtée. Reste à savoir si cette élévation peut être considérée comme un marqueur pronostique. La confirmation fait l'objet d'une « lettre » au dernier « Lancet ».
E. Tartour et coll. ont enrôlé, dans une étude prospective multivariée, 234 patients atteints d'un épithélioma spinocellulaire. Un prélèvement sanguin a été effectué dès le diagnostic posé et avant traitement, afin de déterminer le taux du récepteur sIL2Ralpha. Le chiffre de 70 pmol/l a été retenu comme valeur seuil.
Une survie globale de 29,8 %
Une période de suivi de trente-six mois a confirmé l'hypothèse de départ des chercheurs français. Un taux élevé de sIL2Ralpha, à l'inclusion, est corrélé à une survie courte. La survie globale, à ce terme, est de 29,8 % (12,4-47,2 %) pour un taux sérique dépassant 70 pmol/l ; elle passe à 64,4 % (CI : 95 %; 55,9-72,9 %) en dessous de ce seuil.
Au sein des multiples paramètres, analysés de façon multivariée, seulement quatre variables influent sur la probabilité de survie : la concentration en sIL2Ralpha, la présence d'adénopathies lors du diagnostic, le statut fonctionnel et le stade de la tumeur.
Les médecins français affinent l'analyse, en s'intéressant ensuite à la récidive locale et à la survie sans métastase. Pour la première, ils mettent en valeur une tendance, non significative, entre le taux de sIL2Ralpha et la rechute in situ ; significative avec les trois autres marqueurs. En revanche, en ce qui concerne la survie sans métastase, la corrélation est nette. Seulement 11,5 % des patients au taux de sIL2Ralpha bas à l'inclusion ont développé des métastases en trente-six mois, contre 34 % dans l'autre groupe.
Les auteurs précisent qu'au cours du travail 20 % des décès ont été liés à la présence de métastases, ce qui pourrait expliquer le rôle de cette variable sur la survie globale. Quant à la valeur prédictive du taux de sIL2Ralpha, elle ne semble pas modifiée par le traitement quel qu'en soit le type (chirurgie avant ou après radiothérapie, avec ou sans chimiothérapie).
La chaîne alpha du récepteur de l'IL2 est essentiellement exprimée par les cellules T activées, et à un moindre niveau par les cellules B activées, les cellules NK, les monocytes, les éosinophiles et quelques cellules tumorales. La chaîne alpha membranaire de l'IL2Ralpha est souvent clivée de la surface cellulaire puis larguée sous la forme d'un récepteur soluble (sIL2Ralpha) capable d'inhiber l'activité de l'IL2 et de se comporter comme un immunosuppresseur.
« Lancet », vol. 357, 21 avril 2001, pp. 1 263-1 264.
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