LA RENCONTRE, la semaine dernière, entre la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, et le président de l'association vosgienne des surirradiés de l'hôpital d'Epinal, Philippe Stabler, n'avait pas d'autre finalité que de prendre en compte le désarroi des victimes. Au nom de la centaine de personnes qu'il représente aujourd'hui, Philippe Stabler a souligné que, au-delà des chiffres impressionnants de patients surirradiés, «il y a des gens qui souffrent».
«Cette rencontre est d'un grand réconfort», a indiqué Philippe Stabler, en rappelant qu'il faisait partie du «groupe qui a été irradié à 8%». Evoquant ses séquelles – des «problèmes intestinaux», résume-t-il –, il a toutefois voulu ajouter que les rayons lui avaient sauvé la vie et lui avaient permis de venir à bout de son cancer de la prostate. «Il ne faut pas que les gens aient peur de la radiothérapie. Mes séquelles viennent de la surirradiation», a-t-il insisté.
Au total, ce sont plus de 4 900 patients traités par radiothérapie à l'hôpital Jean-Monnet d'Epinal qui ont reçu des surdoses, entre 1989 et 2006, à la suite de trois erreurs distinctes. Vingt-quatre hommes, traités pour un cancer de la prostate, ont ainsi fait l'objet d'un surdosage de l'ordre de 20 %, entre mai 2004 et août 2005, dont cinq sont décédés. Quelque 400 autres personnes ont été victimes d'une surirradiation de l'ordre de 8 % durant un traitement du cancer de la prostate entre 2000 et novembre 2006. Enfin, une troisième erreur a concerné 4 500 patients traités entre 1989 et 2000 pour différents cancers, dont 300 d'entre eux ont subi une surirradiation de 7 % entre juillet 1999 et juillet 2000. «Le Numéro Vert (le 0800.636.636) qui a été mis en place la semaine dernière afin que toute personne inquiète ou potentiellement concernée puisse obtenir les réponses à ses questions a déjà été appelé par 1500per-sonnes», a indiqué Roselyne Bachelot. La ministre, qui attend de l'Irsn une évaluation «des conséquences cliniques possibles pour les patients traités sur la période 1989-2000», a assuré qu'elle veillerait à ce que les victimes soient indemnisées «de la meilleure façon et dans les meilleurs délais». «Il est extrêmement important que les patients reçoivent dans les meilleurs délais les indemnisations auxquelles ils ont droit», a-t-elle insisté. La ministre de la Santé devrait, d'ici à la fin du mois, recevoir les propositions du président de l'Institut national du cancer, le Pr Dominique Maraninchi, qui coordonne le groupe de travail sur la radiothérapie. Elle doit également annoncer prochainement «des mesures fortes destinées à développer l'assurance qualité et la radiovigilance, à améliorer l'information des patients et la formation des professionnels en termes de moyens humains, matériels et réglementaires», comme la mise en place de la dosimétrie in vivo ou le doublement du nombre de radiophysiciens en cinq ans.
Les généralistes dénoncent le manque d'information
«L'accident des patients irradiés du centre hospitalier d'Epinal met dramatiquement le doigt sur l'incapacité de notre système de santé à repérer et à limiter les anomalies et les effets négatifs des traitements médicaux», dénonce, dans un communiqué, le syndicat des médecins généralistes vosgiens (MG-88). «Il est désolant que les médecins traitants des patients suivis à Epinal et soumis à des risques de surdosage radiothérapeutique ne bénéficient à ce jour que d'une seule source d'information: les médias nationaux ou régionaux!», ajoute le Dr Patrick Bastien, délégué régional de Lorraine de MG-France. «L'administration de l'hôpital et sa tutelle n'ont, depuis le début de cette affaire, jamais contacté les médecins généralistes des malades exposés pour les informer et leur demander de prendre un contact systématique avec leurs patients. Le choix, délibéré ou non, de l'hôpital a été de traiter directement avec les familles, les privant de la médiation de leur médecin généraliste traitant», regrette-t-il. Jean-Yves Grall, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation de Lorraine, a indiqué qu'une réunion d'information, en lien avec le Conseil de l'Ordre des médecins des Vosges, aura lieu le 19 septembre au Palais des congrès d'Epinal sur le dossier des surirradiés.
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