REFERENCE
La maturation du cerveau se fait dans le sens postéro-antérieur. Elle commence dans la région occipitale, dans les deux premiers mois, avec l'acquisition de la poursuite visuelle. Puis, la région rolandique avec l'apparition de la motricité volontaire, l'apprentissage de la préhension et du reste de la motricité. Ensuite, il y a la maturation de la région temporale avec acquisition du langage à partir de 1 an et jusqu'à 4 ou 5 ans, et, en dernier, la maturation de la région frontale avec l'apparition des fonctions plus élaborées qui vont mûrir jusqu'à la puberté. C'est pourquoi, en fonction de l'âge d'apparition de l'épilepsie, le retentissement sera différent.
Il existe deux âges critiques pour l'apparition des crises d'épilepsie : de 3 mois à 12 mois, avec la mise en place des fonctions visuelles et motrices, et de 2 ans à 8 ans, avec la mise en place des fonctions exécutives et du langage.
Chez l'enfant épileptique, différents facteurs peuvent être responsables des troubles cognitifs : l'activité épileptogène, soit les crises en elles-mêmes, soit les anomalies intercritiques ; les désordres liés aux lésions sous-jacentes responsables de l'épilepsie ou associées à celle-ci ; enfin, le rôle des médicaments.
Il existe des troubles du comportement, le plus souvent hyperkinésie mais parfois lenteur, que l'on retrouve notamment dans les épilepsies frontales, voire aussi un comportement autistique. Les principaux troubles retrouvés sont des troubles d'attention, de concentration, de la mémoire. Dans les épilepsies partielles, les troubles sont fonction de la localisation : troubles de la mémoire visuelle dans les épilepsies temporales droites, de la mémoire auditive dans les épilepsies temporales gauches, troubles du langage dans les épilepsies temporales gauches, changement de latéralité dans les épilepsies pariétales. Dans les épilepsies généralisées, les troubles de la mémoire sont moins nets et concernent surtout la mémoire visuelle.
Les troubles cognitifs vont être plus importants dans les épilepsies généralisées que dans les épilepsies partielles, et dans les épilepsies symptomatiques que dans l'épilepsie idiopathique puisque, dans le premier cas, il existe des lésions sous-jacentes.
Statistiquement, on remarque que les enfants épileptiques ont plus de difficultés scolaires que les autres et en particulier, l'échec scolaire est plus important si les crises persistent deux ans après le début de la maladie. Cela montre l'importance de la réponse au traitement pour le retentissement de la maladie. S'il s'agit d'une épilepsie peu invalidante que l'on traite rapidement, il peut y avoir très peu de conséquences. En revanche, si l'épilepsie est rebelle, l'enfant risque de rencontrer des difficultés.
Il est très difficile de faire la part, pour le retentissement sur l'attention, la concentration, la mémoire, de ce qui est dû à l'épilepsie elle-même et de ce qui est dû au traitement, bien que les traitements actuels présentent dans l'ensemble moins d'effets secondaires et soient essentiellement responsables d'hyperkinésies. Les benzodiazépines, qui sont encore parfois nécessaires en association, sont connues pour induire des troubles de mémoire et de concentration.
Il faut au maximum maintenir l'enfant en scolarité normale. La rédaction d'un PAI (projet d'accueil individualisé) réalisé avec les parents, les médecins traitants, les spécialistes, l'équipe éducative et l'équipe médico-sociale scolaire, permet de dédramatiser la situation, de donner la conduite à tenir en cas de crise à l'école, de préciser ce que l'enfant est capable de faire.
Les tabous qui entourent l'épilepsie font que cette maladie représente une souffrance pour l'enfant, une souffrance familiale, augmentée par le regard des autres et notamment en classe. Pour cette raison, l'aide psychologique est nécessaire.
Parfois, lorsque l'épilepsie n'est pas bien stabilisée, que l'enfant présente des troubles d'adaptation, de comportement qui peuvent gêner les apprentissages, il est possible de proposer une classe d'adaptation le temps de la stabilisation (par exemple lors de la mise en route du traitement), pour qu'il puisse être dans des conditions d'apprentissage favorables - petits effectifs, prise en charge individuelle - et ensuite de lui faire réintégrer une classe ordinaire.
Si le maintien dans le milieu scolaire n'est pas possible, on peut faire des CII (contrat d'intégration individualisé) soit en classe ordinaire, soit dans les CLIS (classe d'intégration scolaire), soit dans les UPI (unité pédagogique d'intégration) pour les plus grands.
Quelle que soit l'importance du retentissement de l'épilepsie, l'enfant aura besoin d'un aménagement, que ce soit un tiers temps pour compenser la lenteur, une institutrice spécialisée ou une prise en charge par le RASED (réseau d'aide spécialisé aux enfants en difficultés, présent dans l'école et comportant une psychologue scolaire, une rééducatrice psychopédagogique, une rééducatrice psychomotricienne).
Récemment a été créé sur Paris un service de soins à domicile spécialisé pour enfants épileptiques : le SESSAD (service d'éducation spéciale et de soins à domicile pour enfants avec épilepsie). Ce service a été fait pour les enfants qui ont a priori la capacité de suivre une scolarité ordinaire ou spécialisée avec une aide. Le but est de soutenir leur intégration scolaire et sociale en définissant avec la famille un projet individualisé et en travaillant en réseau avec les professionnels de l'éducation nationale et les différents intervenants auprès de l'enfant. L'enfant peut aller au centre pour certaines rééducations ou les intervenants peuvent se déplacer à domicile, à l'école ou au centre de loisir en fonction des besoins. Les professionnels de ce service sont tous spécialisés dans l'épilepsie de l'enfant : neuropédiatre, pédopsychiatre, neuropsychologue, psychologue, psychomotricienne, orthophonistes et éducateurs spécialisés. Une évaluation très précise est faite des déficits cognitifs présentés par ces enfants, permettant une rééducation spécifique en fonction des troubles et une meilleure intégration à l'école.
Ces orientations sont décidées après passage en CDES (commission départementale de l'éducation spécialisée). Pour les épilepsies compliquées, cela permet en outre une prise en charge par la Sécurité sociale avec d'éventuelles attributions d'allocations.
Dans les cas les plus sévères, les enfants ne peuvent pas toujours suivre une scolarité normale. Il existe des établissements médicaux éducatifs : EMP (externat médico-pédagogique), IMP (institut médico-pédagogique), EMP ou IMP-Pro (EMP ou IMP professionnel). Il existe aussi des établissements spécialisés pour enfants épileptiques.
Pour les adolescents ayant un niveau scolaire normal mais une épilepsie sévère, il existe des internats.
Toutes ces adresses peuvent être communiquées par la CDES.
Conférence du Dr Florence Pinton (unité de rééducation neuropsychologique de l'hôpital Bicêtre), dans le cadre des formations organisées par le service de santé scolaire de la DASES, Paris.
Conduite à tenir en cas de crise d'épilepsie à l'école
- Allonger l'enfant sur le côté si possible.
- Observer le déroulement de la crise et noter sa durée.
- Ne pas contraindre l'enfant, laisser la crise se dérouler, ne rien lui mettre dans la bouche.
- Mettre quelque chose (pull) sous la tête pour éviter les traumatismes, éloigner les objets contondants.
- Si la crise dure peu, mettre ensuite l'enfant au calme et prévenir les parents.
- Si la crise dure plus de 5 minutes ou est très violente, faire une injection intrarectale de diazépam (0,5 mg/kg, une ampoule de 10 mg si le poids est supérieur à 20 kg).
- Si la crise ne cède toujours pas, appeler le SAMU (15) et refaire éventuellement une deuxième injection intrarectale.
Dans tous les cas, prévenir les parents.
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