Décision Santé. Pourquoi lancer ce mouvement de grève totale et illimitée à partir du 12 novembre avec une mobilisation à Paris le même jour alors que votre principale revendication, garantir la liberté d’installation sur l’ensemble du territoire n’est même pas mentionnée dans l’accord signé par les syndicats libéraux ?
Étienne Pot. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les menaces sur la liberté d’installation sont toujours aussi présentes. Pour preuve, on peut citer les propos du directeur de l’assurance maladie qui s’est exprimé à plusieurs reprises sur la nécessité d’effectuer un zonage. Ce qui veut dire en substance, on verra à ce moment-là… Quant aux promesses de ministre, il faut pour le moins s’en méfier. Nous devons rester vigilants sur la liberté d’installation. Certes dans le PFLSS 2013, il n’y a que des mesures incitatives. Mais notre mobilisation est un message à tous : nous n’accepterons aucune contrainte sur l’installation des jeunes médecins.
D. S. Au risque d’épuiser les troupes puisqu’il n’y a pas de menace aujourd’hui?
E. P. Quel que soit le moment de la menace, les internes n’hésiteront pas à descendre dans la rue. Mais nos revendications ne se limitent pas à la seule liberté d’installation. Nous demandons aussi une amélioration des conditions de travail des internes. Une circulaire a été publiée sur ce thème. Pour autant rien n’a changé. Nous souhaitons être signataires des négociations conventionnelles. C’est notre avenir qui est en cause. Enfin, nous appelons à ce que les médecins soient indépendants des mutuelles. La création de réseaux de soins nous paraît problématique pour les patients.
D. S. Vous vous mobilisez davantage pour l’avenir de la médecine libérale que pour la défense de l’hôpital public.
E. P. Il ne faut pas chercher à mettre des médecins dans les cases. 50 % des internes exerceront dans le secteur libéral, 50 % dans le milieu hospitalier. En défendant les conditions de formation des internes et le respect des conditions de travail, c’est aussi un combat en faveur de l’hôpital public. Il n’y a pas d’engagement en faveur de l’un ou l’autre mode d’exercice. Nous enfourchons avec la même vigueur ces deux chevaux de bataille. D’ailleurs nous bénéficions de soutiens de plus en plus nombreux chez nos confrères hospitaliers. À cet égard les propos qui s’efforcent de faire passer les médecins comme des délinquants sont pour le moins inacceptables. Cela jette l’opprobre sur l’ensemble de la profession. Chaque médecin est touché dans son for intérieur.
D. S. Dans le contexte de crise, cette grève n’est-elle pas un mouvement qui dans la population serait celui de privilégiés ?
E. P. Nous défendons 15 000 internes qui effectuent entre 70 et 100 heures de travail par semaine pour un salaire autour de 1 500 euros par mois. Je n’ai pas l’impression de faire une grève de luxe mais de défendre une médecine de qualité, qu’elle soit libérale ou hospitalière. Certes, le message peut être transformé comme le fait Marisol Touraine régulièrement dans les médias. Mais voilà ce à quoi nous sommes attachés et défendons dans ce mouvement.
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