LOI sur le droit d'information du malade, judiciarisation du rapport avec le médecin, inquiétudes face aux infections nosocomiales, débat sur l'euthanasie, mais aussi espoir formidable soulevé par le progrès médical face au cancer et au sida : autant d'éléments qui ont chamboulé la relation qu'entretient depuis 25 siècles le malade avec le médecin.
C'est pour tenter de la définir que les Grands Débats de Radio France, en collaboration avec l'Urml d'Ile-de-France, ont posé les questions « Comment se faire entendre par son médecin ? », « Qu'en est-il de la relation patient-médecin ? » lors d'un échange public à la faculté de médecine de Necker à Paris. Le débat était organisé à l'occasion de l'exposition réalisée sur ce thème par l'artiste Patrick Corillon, à l'initiative de l'Urml, ouverte jusqu'au 14 avril à la Maison de Radio France (« le Quotidien » du 18 mars).
« La relation entre nos patients et nous est très importante pour pouvoir faire une médecine de qualité. Or il est insuffisant de débattre seulement entre nous. C'est pourquoi nous espérons que ce genre de débat sera le début d'une longue discussion avec la société », souligne le Dr Bernard Huynh, président de l'Urml d'Ile-de-France. Un souhait qui trouve son écho dans le grand public, si on en croit Olivier Kaeppelin, conseiller pour le développement de la politique culturelle de Radio France : « Nous recevons un nombre exponentiel d'appels de nos auditeurs sur ces questions. La relation patient-médecin est au centre des questions de notre société, comme en témoignent les nombreux livres parus dernièrement et écrits par des patients ou par des médecins. »
La première raison du changement de la relation est l'avènement de nouvelles technologies de plus en plus performantes : « Une médecine uniquement technicienne abstrait le malade de sa personnalité, elle fait du médecin un ingénieur médical et du patient un utilisateur du système de santé. Dans ce cadre, le malade devient de plus en plus exigeant et parfois injuste », analyse l'historien et anthropologue Jean-Pierre Peter. Heureusement, il existe toujours une médecine de la relation et de la confiance, que veut défendre le Pr Bernard Debré : « La relation est duale : nous nous retrouvons avec un savoir gigantesque, mais aussi l'angoisse de choisir la meilleure thérapeutique. Nous sommes parfois terrifiés par notre propre pouvoir et le malade est évidemment très anxieux. Le risque est que les deux parts se replient sur elles-mêmes. Mais la présence d'une relation de confiance intervient pour 30 % dans la guérison. »
Rééquilibrage.
La médecine n'est faite que de relations particulières. Dès que l'on attend de quelqu'un quelque chose qui touche à la vie et à la mort, la relation est forcément complexe : « L'angoisse obère la relation. On se rend bien compte soi-même en tant que médecin comment on change de psychologie face à un confrère lorsqu'on devient un malade », rappelle le Pr Jean-Paul Escande. Une vision partagée par le journaliste Jean-Marc Sylvestre, qui a raconté son expérience de malade dans « Une petite douleur à l'épaule gauche » : « Le malade est en situation de faiblesse et parfois de désespérance, et le premier souci du médecin est l'efficacité. » Un rééquilibrage de cette relation passe certainement par une meilleure formation des médecins à la relation. C'est pourquoi, aujourd'hui, à la faculté de médecine de Necker, comme dans d'autres universités françaises, les étudiants bénéficient dès la première année de cours d'éthique médicale.
Des extraits du débat seront diffusés sur la City Radio de Paris dans les prochaines semaines et dans son intégralité sur France Inter au cours de l'été.
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